L’Almanach international
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27 mai : la fête des mères en Bolivie commémore un massacre
Chaque 27 mai, en Bolivie on commémore le massacre des héroïnes de Coronille survenu en représailles d’un acte de résistance des femmes de la ville de Cochabamba. Cela s’est passé en 1812, dans le cadre de la guerre d’indépendance contre les Espagnols.
Chaque 27 mai, en Bolivie on commémore le massacre des héroïnes de Coronille (las Heroínas de la Coronilla) survenu en représailles d’un acte de résistance des femmes de la ville de Cochabamba. Cela s’est passé en 1812, dans le cadre de la guerre d’indépendance contre les Espagnols.
Le 27 mai 1812, les troupes de la ville de Cochabamba ayant été décimées, les femmes de la ville se sont retranchées, avec leurs enfants, au sommet de la colline de Saint-Sébastien, autrefois appelée la Coronilla, pour tenter de protéger leur ville. Résistance désespérée car les Espagnols ont donné l’assaut et massacré une centaine d’entre elles.
En 1927, en souvenir de leur courage, le président bolivien Hernando Siles Reyes a choisi le 27 mai pour instituer en Bolivie une fête des mères (el Día de la Madre). Ce n'est pas un jour férié, mais les écoles et les jardins d'enfants organisent des activités et des festivités tout au long de la journée.
Depuis quelques années, on fait une reconstitution de la bataille sur la colline de Saint-Sébastien, avec environ 400 acteurs, des professionnels, mais aussi des étudiants et même des renforts fournis par l’armée. Ainsi mis en scène, le courage de l'héroïne Manuela Gandarillas, à l’origine de la rébellion a impressionné le public.
Selon les historiens, toutefois, les femmes rebelles du 27 mai 1812 n’avaient pas en tête l'idée de l'indépendance du Haut-Pérou (ce qui sera plus tard la Bolivie), telle qu'elle sera conçue le 6 août 1825. Celle-ci est une idée plus tardive, fruit d’un processus, qui impliquera des réflexions politiques et des structures mentales qui n'étaient pas présentes en 1812.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 26 mai 2024
19 avril : le débarquement des 33 patriotes à l’origine de l’Uruguay
L’Uruguay commémore le débarquement d’un groupe de révolutionnaires en exil, venus pour chasser les autorités brésiliennes qui administraient le pays. Ce qui permettra à l’Uruguay de proclamer son indépendance quelques semaines plus tard.
C’est une geste patriotique que l’Uruguay célèbre chaque 19 avril par un jour férié. Avant d’exister en tant qu’État, l’Uruguay a vu son territoire disputé par les Argentins, les Brésiliens et même les Anglais. En 1821, le pays a été annexé par le Brésil, sous le nom d'« État Cisplatino ». Le 19 avril 1825, à 23 h., un groupe de révolutionnaires uruguayens en exil dirigé par Juan Antonio Lavalleja, traversait secrètement le fleuve Uruguay et débarquait sur la plage d'Agraciada. Ils étaient trente-trois. L’Uruguay avait constitué la province orientale de l’Argentine, si bien que ces patriotes, encouragés par l’Argentine, étaient appelés les Orientaux et ce jour férié commémore le Desembarco de los 33 Orientales.
Une fois sur l’autre rive du Rio de la Plata, ils plantèrent ce qui sera connu sous le nom de drapeau des 33 Orientaux et prêtèrent serment d'expulser le gouvernement brésilien d'Uruguay. Quatre mois plus tard, faute d’avoir réintégré le giron argentin, l'Uruguay déclarait officiellement son indépendance du Brésil, le 25 août 1825. Après 500 jours de combats (guerre Argentine-Brésil), le Brésil finira par reconnaître l'indépendance de l'Uruguay en 1828.
Des années plus tard, alors que l'État oriental de l'Uruguay devenait une nouvelle nation souveraine, sur ordre du gouverneur et capitaine général de l'État, le général de brigade Juan Antonio Lavalleja, le colonel de l'époque, Manuel Oribe, reçut l'ordre de préparer la « Liste officielle des 33 Orientales ». » de 1825, qui fut certifiée par le général Lavalleja le 28 juillet 1830.
Cette liste comprenait : le Colonel Don Juan Antonio Lavalleja, lieutenant-colonel Don Manuel Oribe ; les sergent-majors Don Pablo Zufriategui et Don Simón del Pino ; les Capitaines Don Manuel Lavalleja, Don Jacinto Trápani, Don Manuel Freire, Don Gregorio Sanabria, Don Santiago Gadea, Lieutenants Don Basilio Araujo, Manuel Menéndez, Enseigne Don Atanasio Sierra, Don Pantaleón Artigas ; Sergents Don Juan Spikerman, Don Andrés Areguat, Don Celedonio Rojas ; Cabos, Avelino Miranda, Agustín Velázquez ; le cadet Don Andrés Spikerman ; Soldats Ramón Ortiz, Juan Ortíz, Ignacio Nuñez, Francisco Lavalleja, Carmelo Colmán, Santiago Nevas, Juan Rosas, Juan Acosta, Luciano Romero, Ignacio Medina, Felipe Carapé, Baqueano Andrés Cheveste. Esclaves Joaquín Artigas et Dionisio Oribe'. (Ces deux derniers furent libérés par Lavalleja comme soldats, au quartier général de Barra del Pintado de la Florida, en juin 1825).
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 19 avril 2024
10 février : l’Érythrée célèbre l’offensive victorieuse qui a permis son indépendance
Le 10 février, le FPLE prenait la ville de Massawa. Cette victoire sera décisive pour l’accession à l’indépendance de l’Érythrée. Elle est célébrée chaque année, le 10 février, sous le nom de Journée Fenkil. Mais cette journée patriotique sert grandement à la propagande du régime autoritaire érythréen. Car si l’Érythrée a gagné son indépendance, les Érythréens n’ont pas pour autant conquis leur liberté. Leur dictateur est un des plus oppressifs du continent.
L’Érythrée, ancienne colonie italienne, avait été associée à l’Éthiopie pour ne former qu’un seul État. Mais Adis Abeba ayant bafoué son autonomie, une guerre d’indépendance a débuté en 1961. En 1988, le Front de populaire de libération érythréen (FPLE) prend Afabet, où se trouvaient les quartiers généraux de l'armée éthiopienne au nord-est de l'Érythrée, forçant le retrait de l'Éthiopie vers les plaines de l'ouest. Le FPLE progressait ensuite vers Keren, deuxième ville d'Érythrée. Ayant perdu le soutien de l’URSS, l’armée éthiopienne se trouvait affaiblie et le FPLE, soutenu par d'autres forces rebelles éthiopiennes, poursuivit son avancée vers les positions éthiopiennes. Le 8 février 1990, les forces du FPLE lançaient une offensive contre l'armée éthiopienne près de la ville de Massawa, c’est l’opération Fenkil (ou deuxième bataille de Massawa). Le 10 février, le FPLE prenaient la ville. Cette victoire sera décisive. Elle est célébrée chaque année, le 10 février, sous le nom de Journée Fenkil (Fenkil ፈንቅል).
Plus de 40 000 soldats éthiopiens ont été tués, capturés ou blessés ; 80 chars ont été capturés et 30 autres chars incendiés ; et la force navale éthiopienne fut anéantie. La libération de Massawa, ville portuaire de la mer Rouge, a eu une importance stratégique dans la lutte pour l'indépendance car elle a entraîné la fermeture de la principale artère de transport de la logistique et de l'armement de l'armée éthiopienne en Érythrée. Plus de 300 officiers militaires de haut et de bas rang, dont le général de brigade Tilahun Kilfe, le général de brigade Ali Haji Abdulahi et le capitaine Tsegaye Mekonen, ont été faits prisonniers au cours de cette bataille rapide et décisive. Le dictateur éthiopien sera renversé en mai 1991 ce qui met fin à la guerre et l’indépendance de l’Érythrée sera acquise le 27 avril 1993.
Le 10-Février est en Érythrée une journée patriotique qui sert grandement à la propagande du régime autoritaire érythréen. Car si l’Érythrée a gagné son indépendance, les Érythréens n’ont pas pour autant conquis leur liberté. En 1987, Isaias Afwerki s’était imposé comme le chef du FPLE ; sera le premier président de la république à l’indépendance… 37 ans plus trad, il est toujours au pouvoir. Son régime est un des plus répressifs au monde.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 9 février 2024
20 juin : la journée des martyrs de la guerre de libération de l'Érythrée
En Érythrée, c’est la Journée des martyrs, un jour férié pour rendre hommage à ceux qui sont morts pour la libération du pays de l’emprise éthiopienne entre 1961 et 1991, un conflit qui a fait 100 000 victimes (pour une population de 5 millions, à l’époque), mais qui a légué au pays une des dictatures les plus terribles au monde.
En Érythrée, c’est la Journée des martyrs (Mealti Sematat), un jour férié pour rendre hommage à ceux qui sont morts pour la libération du pays entre 1961 et 1991.
La guerre de libération a pour origine la décision de l’ONU, en 1952, de rattacher cette ancienne colonie italienne à l’Éthiopie. L'Érythrée aurait dû jouir d’une large autonomie dans le cadre d’une fédération, mais l'empereur éthiopien Hailé Selassié, n’a pas joué le jeu. Il réduit très vite l’autonomie promise. Le pouvoir éthiopien a imposé l'amharique comme langue officielle à la place du tigrinya, interdit l'usage du drapeau érythréen, imposé la censure et déplacé les centres d'affaires hors de l'Érythrée… Finalement, le parlement érythréen a été dissous unilatéralement et l’Érythrée a été annexée en 1962, en toute illégalité.
La guerre de libération des Érythréens contre l’Éthiopie a commencé il y a 62 ans, en 1961, avec les premières opérations militaires du FLE (Front de libération de l’Érythrée) et a duré jusqu’au 24 mai 1991, soit une guerre de 30 ans qui s’est terminée il y a 32 ans tout juste. Le conflit a fait 100 000 victimes (pour une population de 5 millions, à l’époque).
Mais cette longue et terrible guerre a militarisé le pays et permis l’accession au pouvoir d’Isaias Afwerki, le chef du FLE. Celui-ci dirige le pays d’une main de fer depuis trois décennies. Le dictateur érythréen est, aujourd’hui, l’un des plus anciens au monde. Le pays a récemment retrouvé la paix, mais le service militaire qui dure trois ans sous un régime de terreur a fait de très nombreuses victimes mais celles-ci ne font pas partie des martyrs commémorés chaque 20 juin. Il a aussi provoqué l’exode de près d’un demi-million de jeunes gens qui fuit le pays pour y échapper. Le résultat, c’est que les Érythréens sont surreprésentés parmi les demandeurs d’asile en Europe, pour un pays peuplé d’à peine 6 millions d’habitants.
D’ailleurs, une nouvelle guerre entre l'Érythrée et l'Éthiopie s'est déroulée de mai 1998 à juin 2000 pour quelques arpents de terres désertiques provoquant la mort de quelques dizaines de milliers de personnes. Les escarmouches frontalières ont continué, augmentant chaque année (souvent en juin) le nombre des martyrs, jusqu’en 2018, quand a été conclu, soudainement, un accord de paix entre les deux pays.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde
8 mai : le « premier martyr » algérien de la guerre de libération
Le 8 mai a été décrétée Journée nationale de la Mémoire, commémorant les victimes des massacres du 8 mai 1945. Cette année, c’est la troisième édition de cette journée de mémoire.
La France et l’Algérie commémorent la même journée, celle du 8 mai 1945, mais sans se référer à la même mémoire. Trois quarts de siècle après l’événement, les blessures ne passent pas. En mai 2020, le président Tebboune annonçait une Journée nationale de la Mémoire, commémorant les victimes des massacres du 8 mai 1945. Cette année, c’est la troisième édition de cette journée de mémoire.
À Sétif (Algérie) en dépit du couvre-feu imposé à la population autochtone, quelque 10 000 Algériens défilent pour réclamer la liberté. Un drapeau algérien est brandi. Un officier de police français sort une arme vise le porteur du drapeau et le tue de 2 balles. Ce jeune scout s’appelait Bouzid Saâl, une stèle honore aujourd’hui la mémoire de ce « premier martyr de la guerre de libération ». D’autres coups de feu sont tirés sur la foule en panique faisant 35 morts. Ce ne sont que les premiers d’une journée de massacre qui décimera 10 à 20 000 Algériens du Constantinois et une centaine de colons. On est en 1945, la France fête la fin de la Seconde Guerre mondiale… et en Algérie, la guerre d’indépendance commence ce même jour. Ce 8 mai 1945 est le jour où tout a basculé. Il devenait évident pour la majorité des Algériens que dorénavant la France et l’Algérie n’aurait pas la même destinée. Les Français mettront du temps à le réaliser. Les premiers mots d’excuses à propos des morts de cette funeste journée de la part des autorités françaises ne viendront que le 8 mai 2005.
Sous le slogan « Une mémoire qui refuse l'oubli », les festivités officielles doivent se dérouler samedi à Sétif, à 300 km à l'est d'Alger. La Journée de la mémoire a été instituée par une loi adoptée à l'unanimité le 23 juin 2020 par l'Assemblée populaire nationale (APN).
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde
18 février : l'Algérie célèbre ses martyrs pour conforter son régime
La Guerre d’indépendance est au cœur de l’identité nationale algérienne. La Journée nationale du Chahid (combattant mort durant le conflit) en est l’une des principales manifestations. Mais aujourd’hui, la jeunesse qui aspire à un nouveau régime, n’y attache plus la même importance.
La guerre d’indépendance est au cœur de l’identité nationale algérienne. La Journée nationale du Chahid (يوم الشهيد), les combattants morts durant le conflit, en est l’une des principales manifestations. Mais aujourd’hui, la jeunesse qui aspire à un nouveau régime, n’y attache plus la même importance.
Cette Journée du Chahid n’a été instaurée qu’en 1992. La date du 18 février fait référence à la création le 18 février 1947 de l'Organisation spéciale (OS), une organisation militaire clandestine, bras armé du MPLA, le mouvement de Messali Hadj. Ce personnage a été longtemps occulté par l’histoire officielle mais l’OS appartient pleinement à la mythologie de la Guerre d’indépendance. En 1947, le FLN n’avait pas encore été fondé. La date de la création de l’OS est certainement approximative, mais le 18 février a l’avantage de rappeler une autre date celle du 18 février 1957, le jour où la « question algérienne » était présentée devant l’Assemblée générale des Nations unies. À partir de cet autre 18 février, le conflit algérien n’a plus été un seul problème intérieur français mais une affaire relevant du droit international. En effet, la Guerre d’Algérie n’a pas été qu’un conflit de terrain, elle a aussi été une guerre diplomatique, menée de main de maître par les nationalistes algériens.
Cela dit, le pays est indépendant depuis le 5 juillet 1962 et la Journée du Chahid n’a été inventée que trente ans plus tard, à usage interne. À l’époque, il s’agissait de légitimer un régime mis à mal par les assauts des islamistes qui ont fait régner la terreur pendant une décennie en Algérie. Aujourd’hui encore, cette commémoration a pour mission de conforter un gouvernement à bout de souffle qui a été vivement contesté par le Hirak (les manifestations populaires qui ont secoué le pays à partir 22 février 2019) et qui a pris un tour très répressif depuis quelques mois.
Faute d’appuyer sa légitimité sur la démocratie, le pouvoir algérien cultive le souvenir de la Guerre d’indépendance. C’est ce conflit qui a permis à un clan de s’imposer à la tête du pays et d’y demeurer jusqu’à aujourd’hui. Avec le temps, il est de plus en plus difficile de jouer sur la corde du combat anticolonialiste. Depuis la mort du général Ahmed Saïd, en décembre 2019, le chef d’État-Major de l’armée qui lui a succédé est trop jeune pour avoir participé à la guerre de libération. Il en est de même du président Tebboune en poste depuis novembre de la même année. Tous deux, néanmoins, ont la Guerre d’indépendance comme héritage politique, faute de pouvoir appuyer leur mandat sur la volonté du peuple.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde
Sur l’Algérie lire aussi : Géopolitique de l’Algérie par Kader A. Abderrahim
3 janvier : l’Estonie se souvient de ceux qui sont tombés pour libérer le pays de l’emprise russe
Aujourd’hui à 10h30 précise, l’Estonie tout entière est invitée à observer une minute de silence en souvenir des soldats morts pendant la guerre d’indépendance (28 novembre 1918-3 janvier 1920) contre l’Armée rouge. Cette année, quelques mois après l’agression de l’Ukraine par la Russie, les Estoniens vivent cette journée avec une émotion particulière.
Aujourd’hui à 10h30 précise, l’Estonie tout entière est invitée à observer une minute de silence comme chaque 3 janvier. Cette année, quelques mois après l’agression de l’Ukraine par la Russie, les Estoniens vivent cette journée avec une émotion particulière.
L’Estonie avait proclamé son indépendance, le 24 février 1918, profitant de la désorganisation de l’empire russe par la révolution d’Octobre et la cessation des combats sur le front est. Mais, le 28 novembre, quelques jours après la défaite de l’Allemagne qui tenait la région, alors qu’un gouvernement estonien clandestin apparaissait au grand jour, la Russie lançait une offensive pour tenter reprendre le contrôle de l’Estonie.
La guerre d’indépendance a commencé par le franchissement de la rivière Narva par l’Armée rouge. Le lendemain, celle-ci prend la ville du même nom qui n’était défendue que par une ligue composée de lycéens. Alors que les combats se poursuivent dans l’est du pays, le gouvernement estonien négocie un traité de paix. Aidés par les Finlandais et les Scandinaves, les Estoniens parviennent à tenir tête au pouvoir bolchevique russe. Un traité est finalement signé à Tartu le 2 janvier 1920, le lendemain le cessez-le-feu entre en vigueur à 10h30. Ce 3 janvier 1920 marque la fin de cette guerre que les Estoniens appellent la Guerre de la liberté (Vabadussõda) car elle a permis l’émergence, pour la première fois dans l’Histoire, d’une Estonie indépendante laquelle se maintiendra pendant 20 ans avant de retomber sous la coupe de Moscou.
Au total, 74 505 combattants ont participé à cette guerre d'indépendance du côté estonien, 5 540 d’entre eux ont été tués. C’est leur mémoire qui est commémorée par ce Jour commémoratif des morts de la guerre de libération de l'Estonie (Eesti Vabadussõja mälestuspäev). Chaque année, depuis 1991, le 3 janvier, tous les édifices publics accrochent le drapeau national, la population apporte des fleurs au monument de la place de la Liberté, à Tallinn. Les Estoniens sont invités à commémorer les soldats morts avec une minute de silence à 10h30 précise,Une minute de silence est observée à l’heure où les canons se sont tus, le 3 janvier 1920. Puis les cloches se mettent à sonner dans toute l’Estonie. Le 3 janvier, qui n’est pas férié, aurait pu servir de fête nationale, mais on lui a préféré le 24 février 1918, date de la proclamation d’indépendance qui aurait pu rester lettre morte sans la victoire de janvier 1920 sur l’Armée rouge.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde
1er novembre : la « révolution » algérienne
L’Algérie commémore sa « Révolution de novembre ». Ce jour-là en 1954, une série d’attentats coordonnée par un FLN qui faisait pour la première fois parler lui, marquait le déclenchement de la Guerre de libération nationale.
L’Algérie commémore sa « Révolution de novembre ». Ce jour-là en 1954, une série d’attentats coordonnée par un FLN qui faisait pour la première fois parler lui, symbolisait le déclenchement de la Guerre de libération nationale. Ce jour férié en Algérie est marqué par des défilés militaire et la glorification de la guerre d’indépendance.
De cette « Toussaint rouge », les Français ont surtout gardé l’image de ce jeune instituteur français qui venait prendre son premier poste dans le bled et qui fut abattu après l’attaque du bus dans lequel il voyageait. Il faudra cependant de longs mois avant que Paris ne réalise qu’une guerre avait commencé ce jour-là. L'Algérie célèbre le début officiel de sa guerre de libération, laquelle avait, en fait, débuté en 1945, le 8 mai, mais, à l’époque, peu l’avaient vraiment compris.
68 ans après cette « révolution », le régime totalement fossilisé, appuie toujours sa légitimé sur ce conflit de libération que seuls les Algériens les plus âgés ont connu. Cette année, 2022, Alger a choisi la date symbolique du 1er novembre pour abriter le 31e sommet de la Ligue arabe afin de rappeler le soutien arabe à la Révolution algérienne mais aussi marquer son retour sur la scène diplomatique. La victoire finale de cette guerre de libération qui s’est achevée en 1962 fut aussi diplomatique : elle est aussi le fruit du soutien de plusieurs pays arabes, notamment de l’Égypte, dès 1954, de l'Arabie Saoudite qui a plaidé pendant des années pour la cause algérienne devant l'ONU, mais aussi de la Syrie, du Yémen, du Liban et d’autres.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde
19 mars : hommage aux victimes de la guerre d'Algérie
La France commémore le 60e anniversaire du cessez-le-feu du 19 mars 1962. En 2012, cette date a été instituée “Journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie” mais elle ne fait pas l’unanimité…
La France commémore le cessez-le-feu du 19 mars 1962, une célébration qui ne fait pas l’unanimité. Pour les appelés (1,2 millions) et leur famille, cela marque la fin d’un long et pénible engagement qui longtemps n’a pas eu droit à l’appellation de guerre. La date du 19 mars était célébrée depuis longtemps par les associations d’anciens combattants, mais elle n’a eu droit à une reconnaissance officielle qu’en 2012, pour le 50e anniversaire, comme Journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc. Cette année pour le 60e anniversaire, l’événement est plus marqué qu’à l’ordinaire même si la guerre en Ukraine l’a relégué au second plan.
Le 19 mars comme date de l’hommage national aux morts en Algérie continue cependant à être rejetée par les représentants des « rapatriés » et des harkis. Si le 19 mars évoque la joie du retour des militaires français dans leur famille, il marque également l’amorce d’un drame pour les rapatriés, contraints au déracinement, et le début d’une tragédie pour les harkis, massacrés dans les semaines qui suivirent, au mépris des accords d’Evian. Si bien que le président Chirac avait inventé une nouvelle date d’hommage aux morts de la guerre d’Algérie, le 5 décembre. Mais faute du moindre fondement historique, elle est aujourd’hui peu marquée.
En Algérie, le 19 mars n’est pas férié, ce n’est que la Fête de la victoire (النصر). La vraie fête d’indépendance est le 5 juillet (date sa proclamation en 1962 et anniversaire du début de l’occupation du pays par les Français, le 5 juillet 1830). Avec le Hirak, beaucoup en Algérie rêvaient d’un seconde libération (une seconde indépendance pour certains !), et sont aujourd’hui très déçus que le mouvement se soit enrayé. Le système politique algérien, sclérosé et corrompu, est accusé par la majeure partie de la population d’avoir confisqué la victoire et l’indépendance au profit d’une petite élite.
A Paris, une cérémonie débute 16h30 au mémorial du quai Jacques Chirac qui a été complètement transformé pour l’occasion (remise de décorations, discours de la ministre déléguée aux Armées et dépôt de gerbes) - La cérémonie à l’Arc de Triomphe est à 18h30 (dépôt de gerbes et ravivage de la flamme).
Le 19 mars est dédié aux victimes du conflit : 30 à 35 000 Français (dont 25 000 militaires et 6 à 10 000 civils, ces derniers, en majorité tués après le 19 mars), 350 à 400 000 Algériens selon les historiens (et non un millions et demi d’après le discours officiel) quand aux harkis, les supplétifs algériens de l’armée française, la fourchette pour eux est encore plus large : de 30 à 150 000, selon les sources, et en comptants les règlement de compte après le 19 mars.
16 mai : le Soudan du Sud célèbre son armée, actrice de deux guerres sanglantes
La Journée de l'APLS (SPLA Day) est un jour férié au Soudan du Sud célébré chaque année le 16 mai. Elle commémore la formation de l'Armée populaire de libération du Soudan (SPLA, Sudan People's Liberation Army)
La Journée de l'APLS (SPLA Day) est un jour férié au Soudan du Sud célébré chaque année le 16 mai. Elle commémore la formation de l'Armée populaire de libération du Soudan (SPLA, Sudan People's Liberation Army)
La SPLA a été formée pendant la guerre civile soudanaise comme mouvement de guérilla. Le 16 mai 1983, un groupe de mutins de l'armée soudanaise a ouvert le feu dans une caserne près de la ville de Bor. Le colonel John Garang de Mabior a été envoyé pour réprimer la rébellion, mais au lieu de cela, il a pris la direction de la SPLA nouvellement formée et a commencé à recruter de nouveaux soldats.
L’origine de cette mutinerie de soldats originaires du Sud-Soudan est la décision du gouvernement du Soudan d’imposer la charia, y compris aux chrétiens vivant au sud du pays. Il a fallu deux décennies à la SPLA pour parvenir à ses fins, c’est-à-dire à la division du Soudan en deux pays distincts. C’est à dire un Soudan du Sud d’abord autonome, puis indépendant. Tout au long de la guerre civile, la SPLA était dirigée par John Garang. Celui-ci est mort en 2005 dans un accident d'hélicoptère alors qu’un accord venait d’être signé avec le gouvernement de Khartoum. Il a été remplacé par Salva Kiir qui deviendra le premier président de la république du Soudan du Sud.
La république du Soudan du Sud a finalement été proclamée en 2011 après un conflit sanglant (deux millions de morts recensés) qui provoqua également le déplacement de quatre millions de civils. L’APLS est devenue l'armée régulière du nouvel État. Le SPLA Day est l’Anniversaire de la Fondation de l’armée de libération populaire du Soudan (APLS).
En réalité, certaines unités rebelles n'ont pas été intégrées à l'armée nationale, d’autres ont fait sécession de l’APLS… un autre conflit presque aussi terrible a débuté en décembre 2013 : une nouvelle guerre civile a ensanglanté le Soudan du Sud jusqu’en février 2020, provoquant 400 000 morts et à nouveau 4 millions de déplacés. La Journée de l’APLS ne fait pas référence à cet épisode encore très récent dans les mémoires.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde
4 février : l'Angola, 60 ans après le déclenchement de sa guerre d'indépendance
Le 4 février 1961, débutait la lutte armée qui allait aboutir à l’indépendance de l’Angola, le 11 novembre 1975. Cette date est célébrée chaque année dans une région différente. Mais, c’est aussi une journée de manifestations contre le régime.
C’était il y a 60 ans jour pour jour, une poignée de militants prenaient d’assaut deux prisons de Luanda, celle de São Paulo et la Casa de Reclusão pour libérer plusieurs des leurs, retenus par les Portugais pour leur militantisme anticolonial. Alors que colonies françaises d’Afrique venaient d’obtenir leur indépendance, les Angolais commençaient vraiment à s’impatienter. Les Portugais avaient pris pied à Luanda, cinq siècles plus tôt.
Le 4 février 1961, commençait la lutte armée qui allait aboutir à l’indépendance du pays le 11 novembre 1975. Cette journée, le Dia do Início da Luta Armada de Libertação Nacional, est célébrée chaque année dans une région différente. Cette année pour le 60e anniversaire, c’est la province du Bengo qui a cet honneur. C’est là, ainsi qu’à Luanda, que se dérouleront les principales festivités.
Ce jour est aussi celui de manifestations de la jeunesse contre un pouvoir corrompu issu du MPLA, le Mouvement populaire de libération de l'Angola, qui a libéré le pays et qui le dirige depuis 45 ans, sans aucune alternance. Vainqueur d’une guerre civile aussi cruelle que celle qui a chassé les Portugais, ce mouvement de libération s’est approprié le pays. Aujourd'hui, le clan de l’ancien président José Eduardo Dos Santos, en particulier sa fille ainée Isabel, est au cœur de scandales politico-financiers qui exaspèrent la population. Le pays a été peu touché par la covid mais ne parvient pas à sortir de la crise économique. La manne pétrolière est confisquée par le clan au pouvoir, tandis que la population sombre dans la misère. Le 4 février est aussi une journée de manifestation de la jeunesse de Luanda contre cette réalité. Avec un slogan “45 ans, ça suffit !”.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 4 février 2021