L’Almanach international
Parce que chaque jour est important quelque part dans le monde
6 mars : la Journée européenne des Justes
La Journée européenne des Justes a été instituée par le Parlement européen pour rendre hommage à tous ceux qui ont sauvé des vies lors de la Shoah mais aussi lors de tous les génocides et crimes contre l'humanité (en Arménie, en Bosnie, au Cambodge, au Rwanda, en Tchétchénie, au Soudan, à Gaza… la liste n’est pas exhaustive), perpétrés au cours des XXe et XXIe siècles.
Le concept de Juste parmi les Nations a été introduit par Yad Vashem, le mémorial officiel d'Israël en mémoire des victimes de la Shoah. À l'origine, il faisait référence aux non-juifs qui sauvèrent des juifs de la Shoah, au péril de leur vie.
Moshe Bejski (1921-2007) un rescapé de la Shoah grâce à Oskar Schindler, qui fut juge de la Cour suprême d'Israël et président de la Commission des Justes, a élargi ce concept à tous les cas de génocide et à toutes les formes de totalitarisme. C’est aussi pour lui rendre hommage que la Journée européenne des Justes (European Day of the Righteous), instituée par le Parlement européen en 2012 a été placée le 6 mars, date anniversaire de sa mort en 2007.
Rappelant l'importance morale que revêt le Jardin des Justes du mémorial de Yad Vashem à Jérusalem, fondé par Moshe Beisky afin de rendre hommage aux personnes qui avaient apporté leur aide à des juifs pendant la Shoah, cette journée du 6 mars a été instituée à la mémoire de tous ceux qui ont sauvé des vies lors de tous les génocides et crimes contre l'humanité (en Arménie, en Bosnie, au Cambodge, au Rwanda, en Tchétchénie, au Soudan, à Gaza… la liste n’est pas exhaustive), perpétrés au cours des XXe et XXIe siècles.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 5 mars 2025
Comme élément graphique des initiatives du 6 mars, un arbre a été créé, formé des mots-clés (en anglais) de la journée européenne des Justes.
27 janvier : il y a 80 ans, on “découvrait” l'horreur d'Auschwitz
Il y a 80 ans le camp de concentration d’Auschwitz-Birkenau était libéré par l’Armée Rouge. Les soldats russes découvraient 7650 survivants à la limite de leurs forces. Des cérémonies ont lieu un peu partout dans le monde, ainsi que dans ce qui reste du camp. Cette année, elles se dérouleront avec des délégations de 151 pays mais sans les officiels russes.
Cette commémoration est récente : la date du 27 janvier a été choisie par le Conseil de l’Europe, en 2002, puis adoptée par la France, en 2003, comme Journée de la mémoire de la Shoah et de prévention des crimes contre l’humanité dans les établissements scolaires. Plus récemment encore, en 2006, l’ONU en a fait la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste.
Il y a 80 ans le camp de concentration d’Auschwitz-Birkenau était libéré par l’Armée Rouge. Les soldats russes découvraient 7650 survivants à la limite de leurs forces. Dix jours plus tôt les SS de l’armée allemande, reculant devant les Soviétiques, avaient emmené 58 000 personnes dans une marche de la mort qui fut fatale à la plupart de ces prisonniers faméliques. Le camp a été construit par les autorités nazies à Oświęcim (Auschwitz en allemand) à 60 km de Cracovie dans la Pologne occupée. Lors de son agrandissement, ce camp englobera celui de Birkenau. Le bilan de son activité ne sera établi qu’après la guerre : 1 100 000 personnes y sont mortes, exterminées par le gaz dans leur grande majorité, dont 960 000 juifs.
Pour ce 80e anniversaire, 51 délégations de 51 pays différents, soit environ 3 000 personnes, sont rassemblées sous une immense tente à l’entrée de Birkenau. Deux absents importants : Vladimir Poutine comme Benyamin Nétanyahou font l’objet d’un mandat d’arrêt émis par la Cour pénale internationale (CPI), justifié par des accusations reposant sur l’implication respective du premier dans des rapts d’enfants ukrainiens depuis l’invasion russe de l’Ukraine, et du second dans des “crimes de guerre et crimes contre l’humanité” commis dans la bande de Gaza. Signataire du traité de Rome, la Pologne est tenue d’appliquer les mandats d’arrêts de la CPI. Elle avait pourtant annoncé ne pas l’appliquer pour Netanyahou. Ce dernier a néanmoins préféré se faire représenter par son ministre de l’Éducation, Yoav Kisch.
Lors des cérémonies du 70e anniversaire, il y a 10 ans, les Polonais avaient «oublié» d’inviter les officiels russes. Le Kremlin ayant accusé, à plusieurs reprises, mais à tort, l’État polonais d’avoir collaboré avec Hitler… La mémoire, fut-elle aussi douloureuse, n’échappe pas à la géopolitique.
En France outre, la cérémonie annuelle du Mémorial de la Shoah (inauguré le 27 janvier 2005), une autre est organisée ce lundi à partir de 14 heures à Drancy (Seine-Saint-Denis) où se trouvent les vestiges du camp d'internement et de transit vers Auschwitz et d'autres camps d'extermination nazis.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 27 janvier 2025
17 janvier : il y a 80 ans Raoul Wallenberg disparaissait au Goulag
Cette Journée Raoul Wallenberg a été instituée par le gouvernement du Canada pour rendre hommage, chaque 17 janvier, au diplomate suédois qui a sauvé la vie de dizaines de milliers de Juifs hongrois. De son côté, le Conseil de l’Europe a créé un prix décerné autour du 17 janvier pour perpétuer sa mémoire.
Une Journée Raoul Wallenberg a été instituée par le gouvernement du Canada pour rendre hommage, chaque 17 janvier, au diplomate suédois qui a sauvé la vie de dizaines de milliers de Juifs hongrois. De son côté, le Conseil de l’Europe a créé un prix décerné autour du 17 janvier pour perpétuer sa mémoire.
Avant son arrivée à la légation suédoise de Budapest à la mi-juillet 1944, quelque 430 000 Hongrois juifs avaient été déjà déportés vers Auschwitz. Sans aucune aide de la communauté internationale, Raoul Wallenberg parviendra à en sauver environ 100 000 juifs en six mois par des astuces et des coups de bluff, profitant de son statut de diplomate d’un pays neutre. Il a fourni des « passeports de protection » (Schutzpasses) à plus de 4 000 personnes juives. Il a aménagé des hôpitaux et des garderies, il mettra en place des soupes populaires et plus de 30 maisons protégées par l’ambassade suédoise où les juifs hongrois pouvaient se cacher. Quand des milliers de personnes juives seront contraintes à entreprendre la marche de la mort en novembre 1944, R. Wallenberg interviendra personnellement et à plusieurs occasions afin de sauver autant de personnes qu’il le pourra. Alors que les nazis avançaient vers Budapest et menaçaient de faire exploser le ghetto de la ville et de liquider les Juifs restants, il avertit les généraux nazis qu'ils seraient tenus responsables et traduits en justice, voire exécutés, pour leurs crimes de guerre et leurs crimes contre l'humanité.
Quand les Soviétiques ont libéré Budapest, Raoul Wallemberg a été arrêté et envoyé au Goulag, on ignore la date de son décès. Mais on connaît la date de son arrestation par les Russes : le 17 janvier 1945, qui est aussi celle de la disparition du diplomate suédois. Ni l’URSS ni plus tard la Russie n’ont accepté de donner la moindre information sur le sort de ce héros de la Seconde Guerre mondiale.
En 1985, Raoul Wallenberg s'est vu accorder le titre de citoyen d'honneur du Canada. En 2000, une loi a été votée prévoyant que dans l'ensemble du Canada, le 17 janvier de chaque année est désigné comme la « Journée Raoul Wallenberg ». Chaque 17 janvier les autorités canadiennes invitent toute la population à réfléchir sur la bravoure, la bienveillance et la compassion dont a fait preuve Raoul Wallenberg ainsi qu’à réitérer l’engagement des Canadiens à bâtir un pays encore plus fort et plus inclusif.
À l'initiative du Gouvernement suédois et du Parlement hongrois, le Conseil de l'Europe a créé le Prix Raoul Wallenberg, afin de perpétuer la mémoire des accomplissements hors du commun de ce diplomate suédois. Il est décerné depuis 2014, autour du 17 janvier, et récompense tous les deux ans les accomplissements humanitaires exceptionnels d'une personne, d'un groupe de personnes ou d'une organisation. En 2024, il a été décerné à Neva Tölle, une militante croate œuvrant pour la protection des femmes contre la violence domestique. Antérieurement, le prix Raoul Wallenberg avait récompensé les réalisations d’Elmas Arus (2014), une jeune réalisatrice rom de Turquie ; l’association grecque Agalià (2016), œuvrant sur l’île de Lesbos ; le Centre européen pour les droits des Roms basé à Budapest (2018) ; une pédiatre syrienne, Amani Ballour (2020) ; et Vincent Raj Arokiasamy (2022), un défenseur de la population défavorisée des « intouchables » en Inde.
Raoul Wallenberg a aussi été fait citoyen honoraire des États-Unis (qui lui dédie une journée, le 5 octobre), de l’Australie, de la Hongrie et bien sûr d’Israël. En revanche, la Suède qui n’a jamais été très à l’aise avec la Shoah, a longtemps été très discrète sur le sort subi par son diplomate. Elle a attendu 2001 pour reconnaître ses manquements, le gouvernement suédois avait alors présenté des excuses publiques à la famille de Wallenberg. En 2012, l’année où il aurait dû célébrer son 100e anniversaire, la Suède a organisé une année de commémoration en sa mémoire. Désormais, elle se souvient de son héros chaque 27 août, journée nationale de l'égalité des droits et du courage civique.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 16 janvier 2025
timbre poste canadien de 1,85 dollar émis en janvier 2013
24 mars : la Journée nationale du souvenir des Polonais qui ont sauvé des Juifs
Il y a exactement 80 ans, le 24 mars 1944, les Allemands assassinaient une famille polonaise et des juifs qu’elle cachait. Derrière la célébration parfaitement légitime de l’action des héros polonais qui ont sauvé des compatriotes juifs pendant la Shoah, se cache le souci d’infléchir l’image de la Pologne, pays où la population n’a pas partout été aussi bienveillante.
Il y a exactement 80 ans, le 24 mars 1944, les Allemands assassinaient une famille polonaise et les juifs qu’elle cachait. L'exécution, qui a eu lieu à la suite d'une perquisition de la maison Józef et Wiktoria Ulma, était le résultat d'une dénonciation.
Cette célébration a lieu chaque année depuis 2018, à l’initiative d’Andrzej Duda, le président de la république polonaise et militant d’extrême droite. Derrière la célébration parfaitement légitime de l’action des héros polonais qui ont sauvé des compatriotes juifs pendant la Shoah, se cache le souci d’infléchir l’image de la Pologne, pays où la population n’a pas partout été aussi bienveillante. De très nombreux juifs ont été dénoncés, voire assassinés par leurs voisins, avec l’approbation des autorités polonaises sous occupation allemande. Une politique, moins meurtrière, mais toujours franchement antisémite a subsisté sous le régime communiste. Les gouvernements d’extrême droite des années 2010 ont fait voter des lois interdisant la publication de travaux explorant ce versant peu glorieux de l’histoire de la Pologne. Le pays a perdu 90% de sa communauté juive pendant l’occupation. En vertu d’une loi controversée sur l’Holocauste, il est maintenant interdit à quiconque d’accuser la « nation polonaise » de la moindre complicité dans les crimes commis par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale. Le texte “punit par des amendes ou des peines de prison allant jusqu’à trois ans de réclusion ceux qui attribuent ‘à la nation ou à l’État polonais’ des crimes commis par les nazis allemands en Pologne occupée”. Cette loi a été votée en 2018, l’année où a été instaurée la Journée nationale du souvenir des Polonais qui ont sauvé des Juifs (Narodowy Dzień Pamięci Polaków ratujących Żydów) qui est célébrée aujourd’hui.
La date choisie pour le jour du souvenir fait référence à l'histoire tragique de Józef et Wiktoria Ulma, de leurs enfants (Stanisława, 8 ans, Barbara, 6 ans, Władysław, 5 ans, Franciszek, 4 ans, Antoni, 3 ans, et Maria, un an et demi) et les juifs qui se sont cachés pendant deux ans dans le grenier de la maison Ulma. Il s'agissait de Saul Goldman, de ses quatre fils (Baruch, Mechem, Joachim et Moses), de la petite-fille de Chaim Goldman - Lea (Layca) Didner, de sa fille Resszla et de Genia (Gołda) Grünfeld née Goldman. Cette histoire tragique s’est déroulée dans le village de Markowa, dans la région de Rzeszów, dans les Basses-Carpates.
En 1995, Józef et Wiktoria Ulma ont reçu à titre posthume le titre de Justes parmi les Nations de la part de l'Institut Yad Vashem de Jérusalem. Mais l’Église catholique ne voulant pas être en reste, le couple Ulma a été béatifié par décret du pape Françoi, en septembre 2023, après près de vingt ans de processus de béatification enclenché par le pape Jean Paul II.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 23 mars 2024
Mémorial de Markowa, installé en 2018
28 janvier : Les Néerlandais commémorent la Shoah
Aux Pays-Bas, chaque année, c’est le dernier dimanche de janvier que l’on célèbre la Journée de libération d'Auschwitz. Le pays est concernés au premier chef par la Shoah : sur les 140 000 Juifs vivant aux Pays-Bas en 1940, 102 000 n’ont pas survécu à la guerre, soit 71% d’entre eux (contre 50% en Allemagne, 28% en France).
Auschwitz, le camp de la mort nazi, a été libéré le 27 avril (1945) et c’est la date retenue par la plupart des pays concernés par le devoir de mémoire de la Shoah. Mais, aux Pays-Bas, chaque année, c’est le dernier dimanche de janvier que l’on marque la Journée de libération d'Auschwitz (Auschwitzherdenking), soit cette année, le 28 janvier. La journée n’a toujours pas obtenu le statut de commémoration officielle, mais elle est célébrée de manière assidue depuis les années 1970. Les Pays-Bas sont en effet concernés au premier chef par la Shoah : sur les 140 000 Juifs vivant aux Pays-Bas en 1940, 102 000 n’ont pas survécu à la guerre, soit 71% d’entre eux (contre 50% en Allemagne, 28% en France).
Aujourd’hui, cela fait 79 ans que les Pays-Bas ont été libérés et que le camp d'extermination d'Auschwitz, symbole international de l'Holocauste, a été libéré. Ce 28 janvier 2024, c’est le Comité néerlandais pour Auschwitz qui organise la commémoration nationale de la Shoah au monument « Plus jamais d'Auschwitz » dans le parc Wertheim à Amsterdam. Rendez-vous à 10h à l'hôtel de ville d'Amsterdam. La procession silencieuse commence à 11h. Elle se termine dans le parc Wertheim où se trouve le mémorial conçu en 1977 par l'écrivain et plasticien Jan Wolkers.
La cérémonie débute à 11h30 avec la récitation de Yizkor et du Kaddish, suivi de dépôt de gerbes. La musique est assurée par des Roms et des Sintis, eux aussi victimes des nazis et déportés massivement à Auschwitz. Le site du Comité néerlandais d'Auschwitz.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 27 janvier 2024
La cérémonie de 1979 (Photo : Rob Bogaerts / Anéfo)
Le mémorial a été conçu en 1977 par l'écrivain et plasticien Jan Wolkers (1925-2007). Il est constitué de miroirs brisés et porte l'inscription « Plus jamais Auschwitz ».
23 septembre : la Lituanie commémore la Shoah
En Lituanie, l'instauration de la Journée commémorative de l'Holocauste est liée à la liquidation du ghetto de Vilnius, les 23 et 24 septembre 1943, il y a 80 ans aujourd’hui même, mais aussi à l’anniversaire de la liquidation de plus de 5000 juifs de la ville de Marijampolė, le 23 septembre 1941.
L'instauration de la Journée commémorative de l'Holocauste (Holokausto atminimo diena) est liée à la liquidation du ghetto de Vilnius, les 23 et 24 septembre 1943, il y a 80 ans aujourd’hui même, mais aussi à l’anniversaire de la liquidation de plus de 5000 juifs de la ville de Marijampolė par un Einsatzgruppen composé d’Allemands et de leurs collaborateurs lituaniens, le 23 septembre 1941.
La Shoah dans la Lituanie occupée par les nazis a commencé en 1939, à l’aube de la Seconde Guerre mondiale. Les nazis occupèrent la Lituanie et créèrent le ghetto de Vilnius en 1941. Des milliers de Juifs y furent amenés. Au cours d'environ deux années d'activité, environ 40000 Juifs y furent tués. Seules quelques centaines de personnes ont réussi à survivre, la plupart en se cachant dans les forêts environnantes, en rejoignant les partisans soviétiques ou en trouvant refuge parmi des habitants qui les ont cachés.
Le Ghetto de Vilnius était divisé en un Grand Ghetto et un Petit Ghetto. Le Petit Ghetto fut liquidé en octobre 1941. La liquidation du Grand Ghetto commença le 6 août 1943. Les habitants furent déportés en Estonie, tués dans la forêt autour de Vilnius ou envoyés dans un camp d'extermination en Pologne. Le Ghetto fut totalement liquidé les 23 et 24 septembre 1943, c’est ce terrible anniversaire qui est célébré aujourd’hui.
La Journée commémorative de l'Holocauste a été instaurée en 1994. Chaque année, plus de 150 écoles de toute la Lituanie marquent ces anniversaires en marchant le long de la « Route de la mémoire » (Il existe plus de 200 lieux de ce type en Lituanie). Les participants au « Sentier de la mémoire » sont invités à apporter des pierres sur lesquelles sont inscrits les noms des victimes de l'Holocauste. C'est à la fois un respect de la tradition juive et une personnification symbolique des victimes.
À Vilnius, à 11h, une célébration se déroule sur la place Rūdninkai (ancien emplacement du ghetto de Vilnius). À 11h45 une marche le long du chemin de la mémoire (de la place Rūdninkai à la gare de Vilnius, distance d'environ 1 km) permet de prendre le train jusqu'à la gare de Paneriai. À 12h45, poursuite de la procession du chemin de la mémoire jusqu'au mémorial de Paneriai où se déroule à 13h une cérémonie en l'honneur des victimes de l'Holocauste.
À l’échelle européenne, c’est le 27 janvier qu’a été instaurée la Journée internationale de commémoration de l'Holocauste.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde
Photo de Šarūnas Mazeika
16 avril : la Hongrie commémore la Shoah
Chaque année, le 16 avril, depuis 2001, la Hongrie commémore l’extermination de sa communauté juive. La date fait référence au 16 avril 1944 quand les juifs de Rhuténie (ou Subcarpathie) ont été raflés et enfermés dans des ghettos puis déportés dans les camps d'extermination.
Chaque année, le 16 avril, depuis 2001, la Hongrie commémore l’extermination de sa communauté juive. La date fait référence au 16 avril 1944 quand les juifs de Rhuténie (ou Subcarpathie) ont été raflés et enfermés dans des ghettos puis déportés dans les camps d'extermination.
Dans les années 1930, les dirigeants hongrois ont choisi de s'aligner sur les gouvernements fascistes d'Italie et d'Allemagne. Ainsi, à partir de 1938, le régent hongrois Miklós Horthy a adopté une série de mesures anti-juives inspirés des lois allemandes de Nuremberg. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les Hongrois juifs ont été utilisés comme travailleurs forcés pour nettoyer les champs de mines, construire des aéroports et réparer les chemins de fer bombardés. Horthy, cependant, a refusé la déportation des Hongrois juifs vers les camps d'extermination. La situation a changé à partir du 19 mars 1944, lorsque les troupes allemandes ont occupé la Hongrie en réponse aux contacts de Horthy avec les Alliés dans l'espoir de négocier une reddition.
Dès les premiers jours de l’occupation allemande, 437 000 juifs hongrois ont été enfermés dans quelque 70 ghettos. Le ministère de l'Intérieur du gouvernement hongrois contrôlé par les nazis a ensuite ordonné leur déportation vers des camps d'extermination. Le 16 avril 1944, la déportation des juifs de Ruthénie a commencé (aujourd'hui en Ukraine, la Ruthénie a été occupée par la Hongrie de 1939 à 1944). Ce n’est que quand des informations sur les horreurs d’Auschwitz sont arrivées que Horthy a arrêté les expulsions, début juillet 1944. Après la chute d’Horthy, en octobre, quelque 50 000 juifs de Budapest ont encore été déportés en novembre et décembre 1944. Le ghetto de la capitale ne sera libéré qu’en janvier 1945. On estime que 70 % des juifs hongrois n'ont pas survécu à la Shoah.
La Journée du souvenir de l'Holocauste (A holokauszt áldozatainak emléknapja ) a été instituée par le gouvernement hongrois en 2000 et a été célébrée pour la première fois le 16 avril 2001. Les commémorations se déroulent principalement dans les lycées.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde
Chaussures au bord du Danube (Cipők un Dunaparton) est un mémorial installé par le sculpteur Gyula Pauer et le réalisateur Can Togay, 60 paires de chaussures et souliers, en fonte, placé à l’endroit où des juifs hongrois ont été abattus et jetés dans le Danube par les membres du Parti des Croix fléchées (fasciste) en 1944.
11 décembre : mémoire de la Shoah en Crimée
L’occupation nazie de la Crimée de décembre 1941 à 1944 va aboutir à la presque disparition de la communauté juive. Les autorités locales commémorent aujourd’hui sa mémoire mais avec une arrière-pensée qui s’inscrit parfaitement dans la propagande poutinienne qui affirme vouloir dénazifier la région.
Le 11 décembre, plusieurs centaines de Juifs ashkénazes et de Krymchaks étaient exécutées, le même jour, par les troupes allemandes, qui commençaient à envahir la Crimée. La péninsule ne sera complètement occupée qu’en juillet 1942 (et jusqu’au printemps 1944), mais les massacres opérés par les nazis ont commencé dès le 11 décembre 1941 et se succéderont ensuite.
C’est la date de ce funeste anniversaire qui a servi au gouvernement de la République autonome de Crimée, en 2004, pour créer un Jour du Souvenir des Krymchaks et des Juifs de Crimée. Il est observé chaque année depuis lors. Après l'annexion de la Crimée par la Russie en 2014, le jour du souvenir a été inclus dans le calendrier officiel des jours fériés de la Fédération de Russie (День памяти крымчаков и крымских евреев). Les cérémonies mémorielles ont lieu sur le lieu d’exécution de plus de 18000 personnes : dans un fossé antichar situé au 10e kilomètre de l'autoroute Feodosia. Un mémorial y a été construit.
Les Krymchaks sont des juifs de langue turque présents depuis des siècles en Crimée. Pendant l’occupation nazie 6000 d’entre eux vont être assassinés, soit les trois quarts de la communauté. Certains ont eu la vie sauve en se faisant passer pour Tatars.
Les juifs ashkénazes sont arrivés après la première annexion de la Crimée par l’empire russe en 1783. En 1939, environ 65 000 Juifs vivent en Crimée, soit 6 % de la population totale. Au moment de la conquête allemande, 8 000 Juifs sont sous les drapeaux, 35 000 autres parviennent à s'échapper, et environ 22 000 se font piéger en Crimée occupée, presque tous se feront massacrer.
Cette commémoration associe aussi les Roms, victimes eux aussi d'une politique d'extermination systématique et dont le massacre a également commencé le 11 décembre 1941.
Si les autorités russes, qui dirigent aujourd’hui la Crimée, poursuivent avec tant de zèle une commémoration qui ne concerne plus, localement, qu’une poignée d’habitants de la Crimée, c’est que cette commémoration s’inscrit parfaitement dans la propagande russe : ce sont les troupes soviétiques (sous-entendu les Russes) qui ont chassé les Allemands (les nazis). Pourtant, on se souvient que, dès le conflit terminé, la propagande soviétique avait totalement occulté le massacre de plus d’un million de juifs dans la seule république d’Ukraine. À la barre du tribunal international de Nuremberg, les témoins convoqués par l’accusation soviétique auront même interdiction de mentionner leur judéité. L’antisémitisme d’État qui était l’une des caractéristiques de l’URSS a repris de plus belle après 1947 et culminera à la fin du règne de Staline avec des séries d’exécutions ou de déportations, ciblant en priorité les juifs, suite à des rumeurs de complots imaginaires (celui dit des blouses blanches en 1952 par exemple). Poutine a très largement remis à son compte l’héritage soviétique, aujourd’hui presque totalement réhabilité. Mais, en même temps la propagande poutinienne assène sans relâche que « l’opération spéciale » lancée le 24 février 2022 a pour but essentiel de dénazifier l’Ukraine. L’important est donc, aujourd’hui, de cultiver la mémoire des victimes des nazis, au moins sur les partie de l’Ukraine que la Russie occupe depuis 2014, c’est le cas de la Crimée.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 10 décembre 2022
Chaque 11 décembre, les autorités de Simferopol organisent une procession commémorative. Des volontaires participent à une « marche des vivants », répétant l'itinéraire emprunté par des dizaines de milliers de personnes lors de leur dernier voyage.
Krymchaks de Crimée au début du XXe siècle
24 avril : Yom Hashoah… pour ne pas oublier la Shoah
À 10 heures du matin. Un long bruit de sirène retentit dans le ciel d’Israël. Voitures, autobus, piétons tout le monde s’arrête et respecte deux minutes de silence, moment de recueillement pour les 6 millions de juifs exterminés par les nazis
À 10 heures du matin. Un long bruit de sirène retentit dans le ciel d’Israël. Voitures, autobus, piétons, tout le monde s’arrête et respecte deux minutes de silence, moment de recueillement pour les 6 millions de juifs exterminés par les nazis durant la Seconde Guerre mondiale. Pour Yom HaShoah, la plupart des établissements publics sont fermés, les chaines de radio et de télévision diffusent essentiellement des programmes documentaires consacrés à la Shoah et des reportages sur la commémoration tandis que tous les drapeaux du pays sont en berne. On est le 27 Nissan du calendrier hébraïque, c’est la Journée nationale du souvenir de la Shoah.
En Pologne, la Marche des Vivants reprend sa procession annuelle (après deux ans d’interruption à cause du covid) : 3,2 kilomètres d’Auschwitz à Birkenau et se termine par la cérémonie traditionnelle dans les vestiges du crématorium d’Auschwitz-Birkenau. Il est possible que ce soit la dernière fois que des survivants de la Shoah participe à l’événement. Ils étaient 70 en 2019, ils ne sont que 8 cette année (2022).
Plus de 2 000 participants, principalement d’Europe et d’Israël, devraient défiler cette année, bien qu’en raison de la guerre en cours dans l’Ukraine voisine, les organisateurs aient considérablement réduit l’ampleur de l’événement par rapport aux années précédentes, qui rassemblaient par le passé des dizaines de milliers de participants.
En 2022, afin de tenir compte de l’organisation du deuxième tour des élections présidentielles, le dimanche 24 avril, la date de la cérémonie parisienne du Jour mémorial pour les victimes de la Shoah et les combattants du ghetto de Varsovie avait été décalée au jeudi 21 avril, en concertation avec les associations et fondations.
À Paris, c’est au mémorial de la Shoah, dans le Marais, que se déroule habituellement une cérémonie poignante : une lecture publique ininterrompue de 24 heures, de jour comme de nuit. Sont prononcés un à un par d’anciens déportés, parents, bénévoles les noms de chaque homme, femme, enfant juifs déportés de France (de mars 1942 à août 1944), parmi les 76 000 gravés sur le Mur des noms, les noms de « ceux dont il ne reste que le nom » (Simone Veil).
Il est à noter que le grand rabbinat d’Israël lui préfère une autre date : le 10 Tevet.
Cette fête a lieu le 27 du mois de Nissan dans le calendrier hébreu, excepté lorsque le 27 Nissan tombe sur le shabbat, auquel cas on décale d'un jour avant ou après. Les prochaines dates sont le 14 avril 2026, le 4 mai 2027…
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 2025
10 mars : la Journée du sauvetage des juifs bulgares
Une commémoration qui n’est pas sans ombres : les autorités bulgares ont permis en 1943 aux 48 000 juifs bulgares d’échapper à la Shoah, mais elles ont aussi livré aux camps nazis 11 000 juifs des territoires occupés par la Bulgarie.
Cette Journée du souvenir de l’Holocauste (Ден на възпоменание на Холокоста) a été instaurée en 2003. La célébration est aussi appelée Jour du Salut des juifs bulgares (Деня на спасяването на българските евреи) car elle fait référence au sauvetage des juifs de Bulgarie par l’action des hauts dignitaires de l’Église orthodoxe. Il est un fait remarquable que les quelque 48 000 juifs de nationalité bulgare ont survécu à la Shoah. Si bien que le 12 mars 2002, lors d’une cérémonie officielle à Jérusalem, les métropolites bulgares Stéphane (1878-1957) et Cyrille (1901-1971) ont été déclarés Justes du monde par Yad Vashem – l’institution créée en 1953 par la Knesset d’Israël pour perpétuer la mémoire des martyrs et des héros de la Shoah en Europe.
La belle histoire est toutefois un peu à nuancer. En 1940, la Bulgarie vit sous la dictature du roi Boris III, mise en place en 1935. Dès 1940, le pays adopte une législation anti-juive prévoyant l'identification et la marginalisation sociale et économique des citoyens juifs.
Début 1941, la Bulgarie choisit le camp de l’Allemagne nazie dans l’espoir de récupérer les territoires de la Macédoine et la Thrace grecque ainsi que la Macédoine yougoslave dont elle s’estime injustement privée (non-application du traité de San Stefano). En avril 1941, avec ce choix diplomatique et stratégique la Bulgarie assouvit en partie ses ambitions territoriales. Les nouveaux territoires ainsi conquis permettent à la Bulgarie de s’ouvrir sur la mer Égée et de s’étendre jusqu’aux frontières de l’Albanie. Elle devra évidemment rendre ces territoires en 1945, mais Sofia les gère pendant quatre ans.
À l’automne 1942, l’Allemagne qui s’est lancée dans la Solution finale (l’extermination des juifs d’Europe) se fait pressante dans ses demandes adressées à la Bulgarie de livraison de juifs. Le 22 février 1943, un accord prévoyant la déportation de 20 000 juifs des « nouveaux territoires » est conclu. Mais, le nombre des juifs des régions de Yougoslavie et de Grèce occupées par les Bulgares n'excédant pas les 12 000, le gouvernement de Sofia prévoit alors la déportation de 8 000 juifs bulgares dits « indésirables ».
Ainsi, début mars 1943, les autorités bulgares organisent des rafles de juifs dans le nord de la Grèce et dans la Macédoine yougoslave occupée. Regroupés à Skopje, ils sont déportés par le train, puis par bateau sur le Danube. Livrés aux Allemands, quelque 11 343 juifs seront exterminés à Treblinka.
Mais, s’agissant du sort des juifs de la Bulgarie proprement dite, la population bulgare, apprenant ce qui se tramait, s’est mobilisée dans plusieurs villes pour protester contre le sort qui est promis à leur compatriotes juifs. Une telle réaction s’est rarement vue en Europe à cette époque. Pressées par leurs fidèles, les autorités orthodoxes bulgares se sont adressées au roi Boris III pour le convaincre de ne pas participer à des persécutions contre ses propres sujets fussent-ils juifs. Finalement, le souverain fait savoir aux Allemands qu’on avait besoin d’eux pour des travaux des champs. 25 000 juifs de Sofia ont ainsi été déplacés dans la campagne bulgare, ce qui leur a sauvé la vie.
On notera que contrairement aux l’Églises catholiques ou luthériennes, l’Église orthodoxe bulgare n’a jamais eu dans son histoire de discours anti juifs. Au XIXe siècle, la communauté juive a participé à la lutte nationale contre les ottomans. Si bien que les Bulgares ont toujours considérés les juifs comme des concitoyens comme les autres. Les rancœurs de l’époque ottomanes étaient oubliées.
Les autorités bulgares de l’époque sont responsables de la disparition de quelque 11000 juifs (un fait que le gouvernement bulgare actuel a encore du mal à admettre) mais, en même temps, elles ont contribué au sauvetage des 48 000 qui vivaient en Bulgarie en ne les livrant pas aux nazis. Ce pays refuge peut même affirmer être le seul dans l’Europe en guerre dont la population juive a augmenté pendant le conflit. La décision du roi Boris III d’assigner les juifs bulgares à des à des travaux agricoles ou de voirie dans tout le pays a été prise le 10 mars 1943. C’est cette date qui est commémorée aujourd’hui.
L’abrogation partielle de la législation anti-juive aura lieu le 31 août 1944, une mesure étendue par le gouvernement Muraviev (2-9 septembre 1944) avant la déclaration de guerre de l’Union soviétique à la Bulgarie (5 septembre), l’invasion de l’Armée rouge (8 septembre) et l’accession au pouvoir d’un Front de la patrie à dominante communiste (9 septembre). Il faudra toutefois attendre mars 1945 pour qu’un décret prévoie la restitution des biens juifs spoliés ou l’indemnisation des propriétaires dont les possessions nationalisées ne seront pas restituées, soit adopté.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 9 mars 2022
Chaque 10 mars, un hommage est rendu à Dimitar Pechev, vice-président du Parlement et ministre de la Justice de la Bulgarie pendant la Seconde Guerre mondiale. Il a grandement participé au sauvetage de ses concitoyens juifs. Il est aussi citoyen d'honneur de l'État d’Israël.