L’Almanach international
Parce que chaque jour est important quelque part dans le monde
23 février : une date qui fait toujours frémir en Espagne
C’est l’anniversaire de la tentative de coup d’État du 23 février 1981, marquée par une intrusion armée en pleine chambre des députés. Dans un contexte de résurgence des idées franquistes, incarnées par le parti politique Vox, son souvenir est toujours bien vivant.
Chaque année la date du 23 février est toujours évoquée avec un certain frisson en Espagne où elle est connue sous l’appellation de 23-F. Chaque décennie, elle fait l’objet d’une commémoration plus importante. Dans un contexte de résurgence des idées franquistes, incarnées par le parti politique Vox (12% des voix en 2023 et 33 députés sur 350), son souvenir est toujours bien vivant.
C’est l’anniversaire de la tentative de coup d’État du 23 février 1981, marquée par une intrusion armée en pleine chambre des députés (Congreso de los Diputados) sous les caméras de la télévision espagnole. C’est le jour de l’investiture de Leopoldo Calvo-Sotelo qui succédait alors à Adolfo Suarez au poste de premier ministre. L’idée des putschistes était de profiter de l’intervalle politique pour mettre en place un autre régime, à tendance militariste et franquiste.
Ce n’est pas un hasard, si c’est un 23 février que la toute dernière statue du dictateur Francisco Franco encore présente dans l’espace public espagnol a été retirée de la ville de Melilla, une enclave située au nord du Maroc. C’était à l’occasion du 40e anniversaire du putsch manqué. Localement, Vox avait voté contre et le Parti populaire (conservateur) s’était abstenu. La statue avait été érigée en 1978, trois ans seulement avant la mort du dictateur en hommage au rôle du général Franco dans la guerre du Rif (les rebelles berbères à la colonisation espagnole avaient été matés à l’aide de gaz de combat !).
Une loi votée en 2007 sous le gouvernement du socialiste José Luis Rodríguez Zapatero oblige les mairies à retirer de l’espace public les symboles faisant l’apologie de la dictature ou du camp franquiste pendant la guerre civile. De nombreuses administrations locales de droite ont mis des années avant de l’appliquer.
Le 23-F avait rendu très populaire le jeune roi Juan Carlos, présenté en sauveur de la démocratie espagnole. On raconte qu’il avait appelé l’un après l’autre, les généraux de l’armée espagnole pour les convaincre de rester fidèles au régime. Les convaincre ou tester leur position face à l’événement ? Le doute persiste quant à l’implication du jeune monarque choisi par Franco pour lui succéder. Était-il au courant de ce qui se tramait et comptait-il en profiter, comme l’affirme le lieutenant-colonel Antonio Tejero, l’homme à la moustache et au tricorne qui est monté à la tribune de l’Assemblée nationale pour menacer les députés ? L’homme est toujours en vie et, après quelques années de prison, évolue dans les milieux franquistes. Il était là pour protester quand, en 2018, la dépouille de Franco a été déterrée de sa sépulture officielle pour être transférée dans le caveau privé de sa famille.
L’Espagne tourne laborieusement la page de la dictature. La monarchie n’est plus que le dernier héritage. La dernière commémoration d’envergure du F-23 a eu lieu en 2021, l’ancien roi Juan Carlos brillait par son absence.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 23 février 2025
Commémoration sur les marches du Congrès des députés (Congreso de los Diputados) du 30e anniversaire du coup d'État manqué. Au premier rang, au centre, le président des Cortes de l'époque, José Bono . À sa gauche, le président du gouvernement, également socialiste José Luis Rodríguez Zapatero. À sa droite, le leader du PP, Mariano Rajoy . À l'extrême gauche de la première rangée se trouvent Felipe González , Santiago Carrillo et Miquel Roca, députés de la législature pendant laquelle a eu lieu l'agression de Tejero. (photo du gouvernement espagnol, 23 février 2011)
25 juillet : la Galice en fête pour la Saint-Jacques
C’est la fête régionale de la Galice, région la plus occidentale de l’Espagne. La région commémore son autonome acquise en 1981. L’essentiel des festivité a bien sûr lieu à Santiago (Saint-Jacques) Compostela…
C’est la fête nationale de la Galice (O Día Nacional de Galicia), province la plus occidentale de l’Espagne. La région commémore son autonome acquise en 1981. L’essentiel des festivités a bien sûr lieu à Santiago (Saint-Jacques) Compostela (de Compostelle) comme dans la région entière pour son célèbre pèlerinage. Le troisième de la Chrétienté, dit-on, après Rome et Jérusalem.
Les origines de cette célébration remontent en fait à novembre 1919, il y a près d’un siècle, lorsque la IIe Assemblée nationale d’Irmanade da Falla qui s’est déroulée à Saint-Jacques de Compostelle a décidé de célébrer la fête nationale de la Galice le 25 juillet dès l’année suivante.
À la fin de l’époque franquiste, la fête se terminait toujours par des heurts avec la police. Si bien que le gouvernement de La Corogne a interdit les manifestations nationalistes jusqu'en 1983, année où des centaines de manifestants ont décidé de se rassembler à Praza de Galicia, Saint-Jacques-de-Compostelle.
Quand le 25 juillet coïncide avec le dimanche, on célèbre l’Année sainte de Compostelle ou Année sainte jacobéenne (Ano Santo Xacobeo, en galicien). Dans ce cas, la concentration de pèlerins venus du monde entier, est encore plus grande.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 24 juillet 2024
17 janvier : la fête nationale minorquine
L’effigie de saint Antoine est promenée dans les rues Mahon, la capitale de la deuxième île des Baléares. C’est la fête de Minorque (Diada de Menorque). L’île célèbre sa conquête par le roi Alphonse III d'Aragon le 17 janvier 1287, une étape de la Reconquista.
L’effigie de saint Antoine est promenée dans les rues Mahon, la capitale de la deuxième île des Baléares. C’est la fête de Minorque (Diada de Menorque). L’île célèbre sa conquête par le roi Alphonse III d'Aragon le 17 janvier 1287. La date est devenue la fête locale et Antoine le Grand (dit l’Ermite), le saint patron de l’île.
Alors que Palma de Majorque avait été conquise au début du XIIIe siècle, Minorque était restée un émirat musulman gouverné par Abû 'Uthman Sa'îd ibn Hakam al Qurashi de 1234 jusqu'à sa mort en 1282 puis par son fils Abû 'Umar ibn Sa'îd de 1282 à 1287. La prise de l’île est une étape de la Reconquista.
La Diada del Poble de Menorca est une fête institutionnelle célébrée en commémoration de la fin de la Minorque musulmane, marquant ainsi le début de l'incorporation de l'île à la couronne d'Aragon.
Traditionnellement, la journée commence par la célébration de l'Eucharistie dans la Cathédrale à 11 heures du matin. Puis c’est le défilé d’Els Tres Tocs (les trois touches) qui rejoue l'arrivée d'Alphonse III à Ciudatella en janvier 1287. La procession traverse le centre historique de la ville et arrive sur la Place de Ses Palmeres, où le plus jeune conseiller reçoit le drapeau de l'ancienne Université de l'Île. L’'évêque chante le Te Deum, puis le Salve Regina et prononce la prière finale. Le soir, sur la Place de Sant Andoni, on peut assister à un concert de l'Orchestre Musical Municipal.
La fête a été instituée du temps du royaume d’Aragon, puis interdite en raison de l’intégration des Baléares au royaume d’Espagne. La diada réapparaît en 1887, pour le 600e anniversaire de la conquête de l’île, et a survécu jusqu’au début du XXe siècle. Elle réapparaît après la chute de la dictature de Franco, puis est officialisée en 1992,. La fête nationale de Minorque est largement célébrée dans toute l'île , mais ce n'est pas un jour férié dans la communauté autonome des îles Baléares.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 16 janvier 2024
30 décembre : le nouvel An avec un jour d’avance pour les Madrilènes
La veille du jour de l’An, les horlogers de la ville de Madrid viennent vérifier le fonctionnement des carillons de la Puerta del Sol. L’habitude a été prise de venir assister à la répétition avec des amis et et de trinquer (avec des verres en carton), sans toutefois gober les 12 grains de raisin, mais prévoir des confettis !
Ce soir, à Madrid, la place de la Puerta del Sol sera noire de monde et il convient de venir avant 18h, avant que la police ne ferme l’accès à la place, car par prudence, il convient de ne pas dépasser 15 000 personnes. Ce qui est tout de même le double de l’an dernier, puisque la place est en rénovation. La veille du jour de l’An, les horlogers de la ville viennent vérifier le fonctionnement des carillons. Le mécanisme de l'horloge est activé 28 secondes avant minuit. À ce moment-là, une grosse boule de cuivre descend pour avertir que l'année est sur le point de se terminer. Si le test fonctionne bien, les douze carillons retentissent avec un intervalle de trois secondes, puisque l'horloge de la Puerta del Sol, située sur la façade de l'ancienne Poste et aujourd'hui siège de la Présidence du Gouvernement de la Communauté de Madrid, est synchronisé avec l'Observatoire Astronomique National. Cette horloge a été construite à Londres à la fin du XIXe siècle, mais par un horloger espagnol, José Rodríguez de Losada, qui en a fait don à la ville de Madrid.
L’habitude a été prise de venir assister à la répétition avec des amis et de trinquer (avec des verres en carton) mais sans gober les 12 grains de raisin comme il est d’usage en Espagne, au moment du changement d’année. Cela porterait malheur ! Un substitut comme des bonbons feront l’affaire. Prévoir aussi des confettis ! Chaque 30 décembre, une première répétition a eu lieu à midi, mais c’est celle du soir qui attire le plus de monde. Une autre répétition a aussi lieu à midi le 31 décembre. Ces répétitions sont appelées las preuvas de Nochevieja. Elles ont de plus en plus de succès. voir une vidéo.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 29 décembre 2023
photo : Jacinta Lluch Valero
2 janvier : la Toma de Granada, la fête locale qui divise l’Espagne
Ce 2 janvier, pour la 530e fois, la municipalité de Grenade (Espagne) commémore la conquête de la cité andalouse par les souverains d’Aragon et de Castille. Chaque année, la gauche locale dénonce cette cérémonie aux relents racistes et appelle à manifester contre ce qui est devenu une célébration rassemblant toute l’extrême droite espagnole.
Ce jour est férié à Grenade, en Espagne, pour la 530e Fête de la prise de la ville (Festividad de la Toma de Granada). Chaque année, la municipalité de Grenade commémore la conquête de la cité andalouse par les souverains d’Aragon et de Castille. La reddition de la ville a abouti à l’expulsion d’une partie de ses habitants et à l’éradication de leur culture. Comme tous les ans, la gauche locale a appelé à manifester Plaza del Carmen où se déroule la cérémonie.
Cette cérémonie controversée commence, chaque année, par un dépôt de gerbes sur les tombes de Ferdinand d’Aragon et d’Isabelle de Castille qui reposent dans la Chapelle royale. La ville de Grenade, assiégée depuis le 9 juin 1491, n’a pas été prise par les armes, mais livrée aux Espagnols par le dernier émir de Grenade, Boabdil. Celui-ci, après négociations, a quitté la ville le 2 janvier 1492 contre l’engagement des futurs Rois catholiques de respecter les différents cultes. Cette promesse ne fut jamais tenue, puisque dans les semaines qui ont suivi les musulmans et les juifs n’ont eu d’autres choix que la conversion ou l’exil. S’en était fini de l’Espagne des trois religions évoquée jusque-là par Ferdinand II lui-même, l’Inquisition allait désormais avoir le champ libre. Le souvenir de cette trahison plane sur cette fête traditionnelle que l’extrême droite est en train de transformer en célébration identitaire. Vox, le parti néo-franquiste, a fait son entrée au parlement andalou en 2019, une première depuis le retour à la démocratie en 1976. Il milite aujourd’hui pour que le 2 janvier devienne la fête nationale de l’Andalousie en remplacement du 28 février, peu évocateur ; voire la fête nationale de l’Espagne tout entière. Déjà, la date du 2 janvier se substitue progressivement au 18 juillet, la journée où les nostalgiques du dictateur Franco célèbrent sa conquête du pouvoir, par les armes, en 1936. Les slogans n’évoquent plus Franco, mais une « nueva reconquista».
La cérémonie commence Plaza del Carmen, vers 10h30. Les autorités municipale se rendent ensuite à La Chapelle royale à 11h30, puis assiste à une messe dans la cathédrale à 12h. Après la messe est prévu un défilé militaire de la Légion espagnole. La ville est quadrillée par 500 policiers anti-émeutes pour séparer les militants de l’extrême droite espagnole qui ont fait de cette date l’un de leurs rendez-vous annuels, du reste de la foule qui écoute le plus jeune conseiller municipal crier trois fois « Grenade ! », au son de l’hymne national, après avoir rendu hommage aux Rois très catholiques. En 2009, la municipalité (socialiste) avait invité des musulmans, habillés en costume d’époque, à se joindre au cortège, mais ce symbole n’a pas convaincu les associations espagnoles qui militent pour le rapprochement des trois cultures. Le nouveau maire centriste droit (cuidadanos), élu avec les voix des conservateurs (PP) et de l’extrême droite (Vox) se montre beaucoup moins audacieux. De fait, une manifestation alternative est organisée par la gauche (un défilé de Maures et de chrétiens en costume d’époque) à l’initiative des municipalités voisines de Zujan, Cullar et Benamaurel. La procession abouti à l’ermitage Saint-Sébastien, lieu de la dernière rencontre entre Baobdil et les Rois très catholiques.
Les détracteurs de cette fête régionale sont chaque année plus nombreux. Ils parlent d’un hommage rendu aux bourreaux et de l’oubli des victimes. Cette « Journée de la ville de Grenade » se termine néanmoins par un Festival des cultures où l’accent est mis sur la tolérance. À la suite du rétablissement de la liberté de culte, en… 1978, Grenade avait été, cette année-là, la première ville d’Espagne à inaugurer officiellement une mosquée.
S’il s’agit de trouver une autre date pour la Journée de l’Andalousie, la gauche et les libéraux proposent le 26 mai, en hommage à Mariana Pineda, native de Grenade, exécutée le 26 mai 1831 pour son militantisme en faveur des libertés. Cette célébration du 26 mai a été toutefois ravivée en 2022 après 86 ans d’interruption.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 1er janvier 2023
mise à jour 2024 : le PSOE (gauche) qui dirige la mairie a voté contre la célébration en tant que telle, mais est il est tout de même présent à la cérémonie prise en charge par le PP (droite) et Vox (extrême droite) qui dirigent le gouvernement andalou.
Pour faire contre-point à la commémoration de la conquête de Grenade, la plateforme Granada Abierta réunit des intellectuels et des artistes à la Fondation euro-arabe, à partir de 11 heures du matin, sous la devise « Pour la coexistence, pas pour la prise de pouvoir » afin de souligner une fois de plus leur rejet de cet événement. Cette réunion rend aussi un hommage au peintre Juan Antonio Díaz, promoteur de l’association Artistes pour la tolérance.
Le drapeau du royaume d’Espagne (rouge et jaune) associé à celui de Vox (vert) et à celui de la Phalange espagnole (en noir) brandi par les nostalgiques du franquisme.
Le drapeau de l’Andalousie (vert et blanc) et celui de la république d’Espagne (rouge-jaune-mauve), symbole de la gauche
28 décembre : le 1er avril des Espagnols et autres traditions
En Espagne, dans le monde hispanique et jusqu’aux Philippines, c’est le jour des farces, à l’instar du 1er avril dans d’autres pays. Derrière cette journée un peu folle se cache une référence biblique et une fête dédiée aux Saints Innocents.
En Espagne, dans le monde hispanique et jusqu’aux Philippines, c’est le jour des farces, à l’instar du 1er avril dans d’autres pays. De la plaisanterie anodine au véritable canular, cette journée de la malice est aujourd’hui incontournable. En Espagne, une grande soirée télévisée très populaire met en scène des farces faites à des personnalités du showbiz. C’est l’occasion d’un gala de charité destiné à collecter des fonds pour différentes organisations qui se consacrent au traitement des problèmes des enfants. Au Mexique, les journaux participent à la fête en publiant de fausses nouvelles sur un ton ironique ou humoristique.
Cette fête est connue sous le nom de Jour des Saints Innocents (Día de los Santos Inocentes), référence biblique à la mise à mort de tous les enfants de moins de deux ans nés à Bethléem sur ordre du roi Hérode le Grand. Cette légende a profondément marqué le discours religieux catholique et inspiré de nombreux peintres. On raconte que des mages se sont présentés à Hérode en lui demandant où était le futur roi des Juifs qui venait de naître. Celui-ci craignant pour son trône envoya des soldats passer par l’épée tous les nouveau-nés. L’Église catholique se souvient de ce massacre chaque 28 décembre. Au Mexique, c’est même considéré comme l'une des fêtes religieuses les plus importantes. Chaque paroisse la célèbre à sa manière, des cadeaux (vêtements) et de la nourriture (souvent des bonbons) sont offerts ce jour-là à l’enfant Jésus. Dans certaines villes espagnoles, la célébration prend l’allure d’un carnaval.
En France, la tradition de la « fête des fous » a disparu, mais on en trouve des traces dans des récits comme celui de Victor Hugo dans Notre-Dame de Paris. Les origines de cette fête sont bien antérieures puisqu’on les fait remonter aux Saturnales de l’époque romaine (rythmées par le calendrier julien).
Le matin du 28 décembre, en Carinthie et en Styrie (Autriche), les enfants (de moins de 12 ans) vont traditionnellement de maison en maison en souhaitant santé et bonheur pour le Nouvel An en chantant « Schapp, schapp, frisch und g'sund, s'ganze Jahr gsund bleibn, nit klunzn nit klagn, bis i wieder kumm schlagn. » ["Snap, snap, frais et en bonne santé, restez en bonne santé toute l'année sans vous plaindre jusqu'à ce que je revienne frapper à la porte."] En échange, ils reçoivent des bonbons ou quelques sous. Ils doivent toutefois être de retour chez eux avant midi, sous peine d’être tués nous dit cette très ancienne coutume qui s’est perdue dans le reste du monde germanique. En Carinthie, elle est connue sous le nom de Schappen et en Styrie de Frisch & Gsund. Autrefois, la tradition voulait que les enfants frappent symboliquement avec une petite branche les adultes des maisons visitées. L’Église a fait de cette tradition une punition symbolique des adultes pour le massacre ordonné par Hérode. La tradition païenne, les enfants participaient, sans le savoir, à une magie favorisant la fertilité.
La fête des Saints Innocents est également connue sous le nom de Childermas ou Messe des Enfants. Certains considèrent le 28 décembre comme l’un des jours les plus malchanceux de l’année, c’est pourquoi on évite ce jour-là de lancer de nouveaux projets.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 27 décembre 2022
22 décembre : la fameuse loterie de Noël des Espagnols
Le tirage de Noël (El Gordo de Navidad) du 22 décembre en Espagne est la plus grande loterie du monde et l’une des plus anciennes.
S’il est une institution immuable en Espagne, c’est la loterie de Noël dont le tirage est organisé chaque année le 22 décembre. Le nombre de billets vendus est en hausse par rapport à l’an dernier et on totalise 3,5 milliards d’euros à répartir. Comme le Trésor public en prélève 30%, la somme mise en jeu est de 2,4 milliards d’euros. Les premiers prix sont de 4 millions d’euros, mais les chances de gagner sont limitées car vous serez sans doute plus de 20 millions à avoir acheté un billet. Ce serait aujourd'hui la plus grande loterie du monde. Presque toutes les familles espagnoles participent à cet événement national. Le billet coûte 200 euros, mais on peut acheter un dixième de billet, à 20 euros.
Depuis plusieurs semaines, la presse élabore des pronostics. Le chiffre apparaissant le plus souvent serait le 5, qui l’a emporté 32 fois en 127 ans d’existence de la loterie de Noël. La finale 85 serait sortie 7 fois gagnante… Certains numéros de séries sont très convoités lors des ventes sur internet. Cette année c’est le 14320 qui a été le plus demandé, il a été épuisé en 48h lors des ventes de billets en ligne. Pourquoi ce numéro ? Parce qu’il correspond à la date de 14 mars 2020, jour où le gouvernement a décrété l’état d’urgence sanitaire ! Comme quoi, une mauvaise nouvelle peut aussi porter chance. Du moins, on l’espère ! L’an dernier, c’était la date de l’exhumation, tant attendue, du dictateur Franco… En 2020, le 31120 a aussi été très demandé, c’est le jour où le premier cas positif de la covid a été confirmé en Espagne ; comme le 21520 (le premier jour, le masque est devenu obligatoire sur la voie publique) ou le 03820 (le jour où le Juan Carlos a annoncé qu’il quittait le pays)… Si on ne fait pas figurer l’année, on a aussi le 02511 (le jour de la mort de Diego Armando Maradona) qui s’est arraché ou encore, le 01711 (le jour où l'Espagne a battu l'Allemagne 6-0)… toutes les nouvelles, bonnes comme mauvaises, sont un moyen de tenter sa chance. Bien sûr, comme dans toutes les loteries, certains se contentent de tenter leur chance avec leur date de naissance ou de celle de leurs enfants. Cette bourse aux bons numéros, est un résumé de toutes les passions du moment dans le pays.
À l’inverse, les superstitieux devraient éviter certaines fins de série, car il n'est jamais tombé de numéros qui se terminent par 09, 10, 21, 25, 31, 34, 41, 42, 43, 51, 54, 59, 67 , 78 et 82. De plus, le 1 est la fin la moins chanceuse, puisqu'il n'est sorti que 8 fois. On notera également qu’aucun jackpot n'a jamais commencé par 27, 37, 39, 41, 44, 51, 64, 67 à 75, 77 ou même des nombres entre 80 et 99…
On raconte que cette tradition remonterait au règne de Carlos III, lorsqu’un premier tirage a été organisé, en 1763, pour récolter des fonds pour les hôpitaux et les œuvres caritatives. La Lotería est une institution depuis 1812, elle a été créée pour renflouer les caisses de l’État. Ce qui fonctionne très bien puisque qu’en 2020, l’État espagnol empochera plus d’un milliard d’euros, soit vingt fois plus que ce plus que rapporte le téléthon en France ! Le tirage de Noël (El Gordo de Navidad), tel qu’il existe aujourd’hui, existe que depuis 1892. Et il n’a jamais cessé, même pendant la guerre civile. Toutefois, en 1938, deux tombolas avaient eu eu lieu : une républicaine, à Barcelone; et une autre, pour camp fasciste, à Burgos.
Depuis 2011, le tirage se déroule au Teatro Real de Madrid, il est effectué par des élèves du Colegio de San Ildefonso (une école fondée en 1543 qui accueille des orphelins). Il aura lieu mercredi : débutera dès 9 heures et durera environ 4 heures. Il est bien sûr diffusé en direct à la télévision (sur la première chaîne de la RTVE). Le résultat est publié sur internet 45 minutes plus tard.
Le site pour savoir si vous avez gagné : www.laloterianavidad.com/buscar-numeros/
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 21 décembre 2022
5 janvier : les Espagnols accueillent les Rois mages
Ce soir en cette veille d'Épiphanie, il convient de bien recevoir les Rois mages, car dans la nuit, ce sont eux qui vont distribuer les cadeaux aux enfants, du moins c’est ce qu’on leur raconte en Espagne.
Ce soir, en cette veille d'Épiphanie, il convient de bien recevoir les Rois mages, car dans la nuit, ce sont eux qui vont distribuer les cadeaux aux enfants, du moins c’est ce qu’on leur raconte en Espagne. Depuis la fin du XIXe siècle, les municipalités organisent chaque année une « cavalcade des Rois mages » (cabalgata de los Reyes Mágos) particulièrement populaire à Barcelone où le défilé est suivi par des milliers de personnes.
Les figurants arrivent par bateau vers 15h30 heures, à ce moment, 21 coups de canons sont tirés du fort de Monjuic. Les Rois mages et leur suite composée de musiciens en costumes, de saltimbanques en tout genre, remontent les Ramblas jusqu’à la place de Catalogne, tout en distribuant des friandises.
Voici l’itinéraire pour ce 5 janvier 2022 : Le public ne pourra pas assister à cette arrivée, ceci étant l'une des restrictions du défilé 2022. Pour le public, le défilé débute à 18.15, avenue Marqués de l'Argentera - Pla de Palau- Paseo de Isabelle II - Via Laietana - Place Urquinaona - Fontanelle - Place de Catalogne - Pelai - Place de l'Université - Ronda de Sant Antoni - Sépulvéda - Avenida del Paral - Place d'Espagne - arrivée : Avenida de la Reina Maria Cristina (Avenida de Rius i Taulet), vers 21h.
En France, Perpignan organise aussi sa cavalcade qui va du Castillet au parvis de la cathédrale où l'on distribue des chocolats chauds.
À Madrid, chaque quartier a son défilé auquel participent aussi les maires d'arrondissement et le personnel politique. La télévision publique (TVE) en diffuse les images en direct.
Ce soir, les enfants sont invités à se coucher tôt, en laissant leurs chaussures près de la fenêtre, sans oublier de prévoir un bol d’eau pour les chameaux et quelques friandises pour les Rois mages. Demain, au réveil, ils trouveront des cadeaux, en complément de ceux qu’ils ont déjà reçus à Noël, et mangeront du Roscon de Reyes, une brioche aux fruits confits.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 4 janvier 2022
20 janvier : hommage à un militaire devenu une icône gay
Les villes de San Sebastian (Pays basque espagnol) et de Rio de Janeiro fêtent leur saint patron, saint Sébastien, un militaire romain, canonisé, puis devenu sous le pinceau des artistes une référence plus ou moins cachée à l’homosexualité. Saint Sébastien est aujourd’hui une icône gay.
La ville de San Sebastian (Pays basque espagnol) résonne du bruit des tambours et vit au rythme des défilés en costume d’époque napoléonienne depuis hier au soir. C’est la Tamborrada, en ce jour de fête de son saint patron, elle commémore les années d’occupation par les armées françaises, de 1808 à 1812. Une partie des défilés se fait au son des tambours (d’où le nom de la fête) et en costume militaire napoléonien. Depuis 1836, la Saint-Sébastien est l’occasion d’un véritable carnaval bien ordonné qui débute à minuit le 19 janvier sur la place de la Constitución de Saint-Sébastien avec lever du drapeau de la ville. Durant toute la journée du 20 janvier, et principalement jusqu’à midi, toutes les Tamborradas vont défiler à travers les innombrables rues et ruelles de la ville, pour y interpréter les airs officiels. Le soir, à minuit précise, la clôture de ces 24 heures de Tamborrada est officiellement déclarée avec l’interprétation, toujours sur cette même place, de la sociedad La Unión Artesana. Évidement la journée du 20 janvier est férié localement. Elle l’est aussi à Rio de Janeiro (appelée à l’origine São Sebastião de Rio de Janeiro) dont Sébastien est le saint patron.
Soldat romain, né à Narbonne, Sébastien était commandant de la garde prétorienne l’empereur Dioclétien, secrètement chrétien et exécuté pour cela. Généralement représenté attaché à un arbre et transpercé de flèches puisque tel fut son martyr, son corps fut enseveli dans les catacombes romaines qui portent aujourd’hui son nom puis transféré dans l’église Saint-Médard de Soissons où l’Ordre de Saint-Sébastien veille sur ses reliques. Il serait mort à Rome le 20 janvier 288.
Souvent utilisé par les peintres comme une référence cachée ou ouverte à l’homosexualité, saint Sébastien est aujourd’hui une icône gay. Dès le XIIIe siècle, on commence à le peindre sous la forme d’un jeune homme d’une grande beauté à la pose langoureuse. Le beau soldat dans la force de l’âge devient au fil des siècles un bel éphèbe alangui. Il le restera jusqu’à nos jours dans toute l’histoire de la peinture et de la photographie.
De nombreux écrivains comme Oscar Wilde, Gabriele D’Annunzio, Marcel Proust ou Yukio Mishima se sont emparé de la thématique. C’est ce dernier qui est le plus explicite, l’écrivain japonais raconte sa découverte à l’âge de douze ans d’une reproduction du Saint Sébastien de de Guido Reni : « Mes mains, tout à fait inconsciemment, commencèrent un geste qu’on ne leur avait jamais enseigné. Je sentis un je ne sais quoi secret et radieux bondir rapidement à l’attaque, venu d’au-dedans de moi. Soudain la chose jaillit, apportant un enivrement aveuglant. (…) Ce fut ma première éjaculation. Ce fut aussi le début, maladroit et nullement prémédité, de mes « mauvaises habitudes ». Confession d’un Masque, Yukio Mishima, 1949
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 19 janvier 2020
Saint Sébastien par Guido Reni (1615)
Le défilé des enfants (vers midi), le jour de la Tamborrada de Saint-Sébastien
6 décembre : l'Espagne célèbre et interroge sa démocratie
Aujourd'hui, c'est journée portes ouvertes aux Cortès, le Parlement espagnol, ainsi que dans les parlements régionaux. Ce Jour de la Constitution (Día de la constitución) est férié, il permet aussi un week-end de trois jours pour une escapade loin de chez soi.
Aujourd'hui, c'est journée portes ouvertes aux Cortès, le Parlement espagnol, ainsi que dans les parlements régionaux. Ce Jour de la Constitution (Día de la constitución) est férié, il permet aussi un week-end de trois jours pour une escapade loin de chez soi.
Le pays fête sa démocratie restaurée le 6 décembre 1978, quand le peuple a très largement approuvé la constitution actuelle de l’Espagne. C’était les premières élections libres depuis 1936. En effet le coup d’État du général Franco, le 18 juillet 1936 provoquera une guerre entre « républicains » (gauche) et « nationalistes » (extrême droite), remportée par ces derniers. La dictature de Franco durera près de 40 ans. Le 6 décembre, on fête la liberté, la justice, l’égalité et le pluralisme politique retrouvés.
Chaque année, toutefois, des voix discordantes se font entendre : celles des Basques notamment dont le Parti nationaliste basque avait demandé le boycott du scrutin de 1978 ; mais aussi des nationalistes catalans qui critiquent une constitution ne les autorisant pas à organiser un référendum d’indépendance. Cette date laisse aussi un goût amer aux républicains regrettant que la démocratie restaurée ait été assortie d’une constitution monarchiste imposée par les tenants du franquisme alors que le gouvernement légitime, qui aurait dû reprendre son cours après la parenthèse dictatoriale, était une république.
Depuis quelques années, les tabous sont peu à peu levés sur la période de la dictature et la Transition démocratique. On s’interroge aujourd’hui sur les non-dits du vote du 6 décembre, en particulier sur l’autocensure de la gauche qui s’est imposée à l’époque, comme celle des franquistes. Les socialistes ont remporté une majorité (relative) lors des dernières législatives tente de liquider les derniers restent du franquisme en s’attaquant aux symboles ; mais on peut aussi noter, et déplorer, la résurgence d’une extrême droite, demeurée latente depuis la fin de la dictature.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 5 décembre 2019