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1987, Burkina Faso, 15 octobre, assassinat, héros national Bruno Teissier 1987, Burkina Faso, 15 octobre, assassinat, héros national Bruno Teissier

15 octobre : hommage au Che africain, l'homme intègre du Burkina

Il y a 35 ans Thomas Sankara était assassiné. Fidèles et parents se recueillent sur la tombe du « père de la nation burkinabé ». À ses côtés, reposent les « martyrs du 15 octobre » assassinés par un commando armé en même temps que lui en 1987, lors du coup d’État qui a mené Blaise Compaoré au pouvoir…

 

Il y a 35 ans, Thomas Sankara était assassiné. Fidèles et parents se recueillent sur la tombe du « père de la nation burkinabé » au cimetière de Dag-noën, près de Ouagadougou. À ses côtés reposent les « martyrs du 15 octobre » assassinés par un commando armé en même temps que lui en 1987, lors du coup d’État qui a mené Blaise Compaoré au pouvoir pour... 5 mandats successifs. L'ancien compagnon de Sankara a été renversé il y a 8 ans. Depuis, la dépouille de Sankara a été exhumée, les résultats de l'autopsie viennent d'être rendus public : il a été criblé de balle.

À 16 heures, un cortège défilera avenue Sankara, à Ouagadougou. La soirée se terminera en musique. Plusieurs soldats de l’ex-Régiment de sécurité présidentielle (RSP), corps d’élite de l’armée burkinabé dont faisait partie Blaise Compaoré au moment du putsch de 1987, ont été inculpés . La justice va-t-elle rattraper l'ancien président ? Après des décennies de bataille judiciaire, le procès de l’assassinat de l’ancien président Thomas Sankara et de ses douze compagnons s’est ouvert le 11 octobre 2021. Mais, en l’absence de Blaise Compaoré, réfugié en Côte d’Ivoire, et de Hyacinthe Kafando, le chef présumé du commando qui a tué Sankara. En revanche, Mariam Sankara, la veuve de Thomas Sankara, est venue Montpellier où elle réside. Le procès s’est refermé le 10 mai 2022 avec le délibéré sur les intérêts civils. Un mois plut tôt, le 6 avril, trois des quatorze accusés avaient été condamnés à la prison à perpétuité dont l’ancien président Blaise Compaoré et Hyacinthe Kafando.

« Pour certains, le retournement de Compaoré contre son frère d’armes est à chercher du côté du voisin ivoirien. En 1985, Blaise se marie avec Chantal Terrasson de Fougères, une Ivoirienne proche de Félix Houphouët-Boigny, alors président de la Côte d’Ivoire, réputé pour sa proximité avec la France et pour son anti-communisme. Les agitations révolutionnaires du petit capitaine voisin agacent le chef de l’État, qui s’est lui-même décrit comme un "crocodile qui se nourrit de capitaines" ». (Morgane Le Cam, Le Monde, 14 octobre 2017)

En 2018, le 15 octobre, la première pierre d'un monument lui étant dédié, sur les lieux mêmes de son assassinat, était posée. Il a été inauguré en mars 2019. Cette même année, l’enquête est enfin relancée notamment grâce à la déclassification des archives françaises. Autre soupçon : y a-t-il eu une main libyenne dans l'assassinat du jeune capitaine ? Quid de l’action de la France ? La justice suit son cours : une première reconstitution des faits a été réalisée en février 2020.

Pour ce 35e anniversaire de l’assassinat du père de la révolution, Thomas Sankara, la commémoration se tient ce samedi 15 octobre 2022 au mémorial Thomas Sankara. Elle est présidée par le capitaine Ibrahim Traoré, nouveau chef de l’Etat, issu du putsch du 30 septembre dernier. Le thème de cette commémoration 2022 est "Passer le flambeau de la révolution à la jeunesse ".

Mise à jour 2022 : le 26 juillet 2022, Blaise Compaoré, condamné par contumace à perpétuité pour l’assassinat de son prédécesseur, Thomas Sankara, en 1987, a demandé « pardon » à la famille de ce dernier, mais aussi à l’ensemble du « peuple burkinabé » pour « les souffrances » endurées pendant ses vingt-sept années au pouvoir.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 
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1983, 1984, Burkina Faso Bruno Teissier 1983, 1984, Burkina Faso Bruno Teissier

4 août : le Burkina Faso fête son nom

C'est l'anniversaire de la révolution du 4 août 1983 et du changement de nom, un an plus tard. Il y a 38 ans, la Haute Volta devenait le Burkina Faso, « le pays des hommes intègres » en foulfouldé, la langue parlée par les Peuls.

 

C'est l'anniversaire de la révolution du 4 août 1983 et du changement de nom, un an plus tard. Il y a 38 ans, la Haute Volta devenait le Burkina Faso, « le pays des hommes intègres » en foulfouldé, la langue parlée par les Peuls.

En vertu d’une ordonnance du 2 août 1984, le capitaine Thomas Sankara, désireux de faire table rase du « passé réactionnaire et néocolonial », rebaptise la Haute-Volta en République démocratique et populaire du Bourkina Fâso (orthographe originelle). Ce changement de nom de l’ancienne colonie française est célébré deux jours plus tard, le 4 août, jour du premier anniversaire de la révolution de Thomas Sankara. Ce jour-là, le Conseil national révolutionnaire (CNR) organisait des festivités dans tout le pays en l’honneur du nouveau Bourkina Fâso. Outre les cérémonies officielles, des matchs de football et de boxe, ainsi qu’une course cycliste, sont organisés.

Un an plus tôt, le 4 août 1983, Thomas Sankara prenait le pouvoir avec l’aide de son ami Blaise Compaoré. Il installe alors un régime révolutionnaire ; il veut redonner sa dignité à l'homme africain, moderniser le pays, émanciper les femmes... Il deviendra vite l'icône révolutionnaire d'une jeunesse qui se voulait panafricaine. Mais, il sera assassiné quatre ans plus tard dans des conditions assez troubles.

Ce célébration du 4-Août, qui a été fête nationale de 1984 à 1987, n’est plus officielle aujourd’hui.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 
Le drapeau adopté en 1984 dans le stade du 4-Août à Ouagadougou (la photo est de 2018)

Le drapeau adopté en 1984 dans le stade du 4-Août à Ouagadougou (la photo est de 2018)

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1966, Burkina Faso, révolte populaire, 3 janvier Bruno Teissier 1966, Burkina Faso, révolte populaire, 3 janvier Bruno Teissier

3 janvier : les Burkinabés célèbrent le soulèvement de 1966

À cette époque le pays s’appelait encore la Haute-Volta. Pour la première fois en Afrique, une révolte populaire renversait le président du pays.

 

Au Burkina Faso, le 3 janvier, on célèbre la Fête de la Révolution de 1966, appelée aussi Fête de l’anniversaire du coup de 1966 ou simplement Fête de la révolution. Si le pays a connu depuis, d’autres révolution, celle de 1966 est restée dans les mémoires comme la première en Afrique à avoir chassé un président africain, qui plus est, père de l’indépendance du pays.

À cette époque le pays s’appelait encore la Haute-Volta. Ce soulèvement populaire était une réaction à la corruption d’une bourgeoisie au pouvoir sous le régime du président Maurice Yaméogo. C’est lui qui a proclamé l’indépendance le 5 août 1960. Mais au cours des cinq années suivantes, la politique répressive de Yaméogo (notamment l'interdiction des partis politiques sauf le sien, des réunions syndicales et le droit de grève) a provoqué la désapprobation de la population voltaïque. Cela a conduit à une grève nationale menée par les syndicats qui a poussé le président à la démission le 3 janvier 1966. 

Cette révolution abouti à la prise de pouvoir du chef d'état-major général des forces armées, Aboubakar Sangoulé Lamizana qui renverse la Première République, instaure un régime militaire autoritaire et supprime les partis politiques… Il sera à son tour renversé par un soulèvement populaire en 1980.

Cette célébration ne doit pas être confondue avec celle du 4 août, une autre Fête de la Révolution qui célèbre l’arrivée au pouvoir en 1983 de Thomas Sankara et le changement du nom du pays de Haute-Volta à Burkina Faso.

Le 3 janvier 2020, l’Unité d’action syndicale (UAS) a rendu hommage à Zakaria Touré, le dernier des héros du soulèvement populaire du 3 janvier 1966 décédé le 6 septembre 2019. En 2022, le 3-Janvier est toujours célébré, mais n’est plus un jour férié. Il l’a été jusqu’en 2021.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 

L’Unité d’action syndicale (UAS), le 3 janvier 2020

L’ancienne place du 3-Janvier en souvenir de ces événements, rebaptisée en 1983, Place de la Révolution, appelée aujourd’hui place de la Nation, un lieu emblématique de Ouagadougou, la place de toutes les manifestations de protestation (notamment celles de 1966 ou de 2014), mais aussi des fêtes populaires.

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2014, 2015, Burkina Faso, martyrs, 31 octobre Bruno Teissier 2014, 2015, Burkina Faso, martyrs, 31 octobre Bruno Teissier

31 octobre : la Journée des martyrs au Burkina Faso

Hommage aux centaines de victimes des l'insurrections populaires qui ont provoqué la chute de Blaise Compaoré en 2014 et fait échec au coup d’État de 2015. Cette journée, toutefois, ne concerne pas les 3700 morts des violences djihadistes ou intercommunautaires de ces dernières années.

 

Cette journée fériée et chômée a été instaurée en 2015, en hommage aux victimes de l'insurrection populaire, suite au coup d’État (manqué) du 16 septembre de la même année, mais la date qui a été choisie est celle de la chute de Blaise Compaoré, le 31 octobre 2014. Celui-ci a laissé le pouvoir après une présidence longue de 27 ans, appuyée sur un régime autoritaire, instauré après l’assassinat de Thomas Sankara. La démission de Compaoré avait été obtenue par deux jours de soulèvement populaire, les 30 et 31 octobre.

En 2014, Blaise Compaoré envisageait de modifier l’article 37 de la Constitution, lui interdisant de se représenter pour un cinquième mandat, les partis politiques d’opposition et les organisations de la société civile coordonnèrent des manifestations pour tenter de contrer ce projet qui devait être voté par des députés aux ordres, le 30 octobre. Les manifestations atteignirent leur apogée le 30 octobre 2014, causant une trentaine de morts et plus de six cents blessés. 

À la mi-novembre 2014, un gouvernement de transition fut donc instauré, avec à sa tête le diplomate Michel Kafando comme président de la transition. Mais, le 16 septembre 2015, le général Gilbert Diendéré, ancien chef d’état-major particulier de Compaoré durant vingt-sept ans, tente de prendre le pouvoir avec quelques fidèles. Les affrontements entre les putschistes et les manifestants, sortis massivement dans les rues pour demander la libération et la réinstallation du gouvernement de transition, causèrent quatorze morts et plus de deux cent cinquante blessés.

Ce sont toutes ces victimes des deux soulèvements qui sont honorées lors de la Journée des martyrs. Le cérémonial débute avec le retentissement de la sirène à 10 heures, symbolisant l'heure à laquelle est tombée la première victime lors de l'insurrection populaire de 2014, l'observation d'une minute de silence et le dépôt de gerbe de fleurs par le Président du Faso ce 31 octobre 2021 au Monuments des héros nationaux à Ouaga 2000, en mémoire de ces martyrs.

À 11h une messe est dite en l’église la Rotonde, pour les catholiques. À 9 h a eu lieu un office en l’église baptiste du Bon-Berger, à l’est de l’Université Joseph Ki-Zerbo, pour la communauté évangélique.  Quant aux musulmans, leur cérémonie religieuse de commémoration a eu lieu vendredi 29 octobre à 12 h à la Mosquée du Cheik Doukouré à Hamdalaye. Ce 31 octobre tombant un dimanche, suivi du jour de la Toussaint, c’est le mardi 2 novembre qui sera accordé un jour chômé aux travailleurs. Ce qui fait, cette année, un long week-end.

La stèle, conçue par l’architecte Sibiri Simon Kafando, a été inaugurée à Ouagadougou en 2015, elle est formée de deux poings qui s’élancent vers le ciel, symbolisant « l’union, la force et la révolte » ; une étoile au milieu des deux bras fait référence au drapeau national. 

Les cérémonies s'achèvent ce dimanche par un concert géant avec des artistes locaux sur la place de la Révolution, lieu emblématique des manifestations anti-Compaoré durant l'année 2014.

Ces cérémonies font suite au mois de la justice à l’égard de Thomas Sankara et de ses compagnons qui s’est déroulé du 2 au 23 octobre.

Cette Journée des martyrs ne fait pas allusion aux victimes des violences djihadistes. Par de-là les soubresauts politiques à Ouagadougou, c’est cette réalité qui est la plus préoccupante au Burkina Faso aujourd’hui. Les attaques djihadistes, les représailles intercommunautaires et les exactions imputées aux forces de sécurité ont fait plus de 3 700 morts depuis 2015. Aucun mémorial ne leur est consacré. Chaque nouvelle attaque sur le territoire burkinabé est censée entraîner l’ouverture d’une information judiciaire, mais les tribunaux sont totalement débordés.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 30 octobre 2021

 

La stèle ajoutée au Monument des héros nationaux

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1958, 1960, Burkina Faso, indépendance Bruno Teissier 1958, 1960, Burkina Faso, indépendance Bruno Teissier

11 décembre : le Burkina Faso célèbre 60 ans d'indépendance

En vérité, la date du 11 décembre n’est pas l’anniversaire de l’indépendance mais, celle de la République de Haute-Volta, instaurée le 11 décembre 1958 sous protectorat français. L’indépendance n’a été obtenue qu’en 1960, le 5 août, il y a donc bien 60 ans, à quelques mois près.

 

En vérité, la date du 11 décembre n’est pas l’anniversaire de l’indépendance mais, celle de la république de Haute-Volta, instaurée le 11 décembre 1958, mais toujours sous protectorat français. L’indépendance n’a été obtenue qu’en 1960, le 5 août. Il y a donc bien 60 ans, à quelques mois près.  Le 5 août demeure férié mais les festivités ont toujours lieu le 11 décembre pour éviter que la fête ne soit gâchée par la pluie, août étant le mois le plus pluvieux de l’année dans le pays. De plus, les élèves dont on a besoin pour le défilé sont en vacances en août et beaucoup aident leurs parents dans les champs.

Pour compliquer le tout, après le coup d’État du 4 août 1983 qui a instauré un régime révolutionnaire, le 11 décembre et le 5 août ont été considérés comme des fêtes de réactionnaires.  Sous la présidence de Thomas Sankara,  la fête nationale était le 4 août et la Haute Volta est devenue le Burkina Faso.

Après l’assassinat de Sankara, le 15 octobre 1987, c’est finalement le 11 décembre qui a été retenu comme date de la fête nationale du Burkina Faso, même si le 5 août, le 4 août et le 15 octobre font aussi l’objet de célébrations. La journée est fériée.

Chaque année, une ville est chargée des festivités. En 2020, c’est la ville de Banfora, chef-lieu de la région des Cascades, dans l’oust du pays, qui en a été chargée. Comme il faut bien innover, les autorités locales ont décidé l’organiser une compétition de montée du rônier, l’arbre local connu pour sa précieuse sève. Ses feuilles servent à confectionner des paniers, des chapeaux, des parapluies, etc. Son bois est utilisé comme charpente dans la construction. L’extraction d’une boisson naturelle du rônier demeure l’une des ressources principales de nombreuse famille familles. Un arbre symbolique de la région qui sera honoré lors de ce 11-Décembre.

Le président Roch Marc Christian Kaboré qui vient juste d’être réélu pour un second mandat, sera présent pour le défilé. Ce même jour, 1200 Burkinabés seront décorés pour leurs mérites. Le temps d’une journée, on oubliera que le pays vit en permanence sous la menace djiadiste et que l’insécurité a provoqué le déplacement de plus d’un million de personnes qui d’ailleurs n’ont pas pu voter. Sans compter l’épidémie de coronavirus, le pays a de sérieux défis à relever.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 10 décembre 2020

Mise à jour 2022 : Le pays a subi deux coups d’État successifs, le président Kaboré a été reversé par le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba le 23 janvier 2022 , lui même a été remplacé par le capitaine Traoré arrivé au pouvoir le 30 septembre de la même année, à la suite d’un putsch. Voilà comment ce dernier s’est adressé à la nation le 11 décembre 2022 : « Je n’irai pas vous faire un discours cette année, parce que l’heure n’est pas à la fête. Notre indépendance n’est pas acquise, parce que nos terres sont occupées. Notre économie est balbutiante et nos mains sont liées. » (…) « Le combat pour l’indépendance totale a commencé, il y a quelques semaines de cela. Et ce combat passe nécessairement par les armes, mais aussi par nos valeurs, nos comportements, le redressement de notre économie. La bataille contre l’ennemi qui occupe nos terres est en train de commencer. Cette bataille est à son préambule », a-t-il lancé.

Les festivités de 2022 auront été d’une grande sobriété. Le pays vit toujours dans une grande insécurité qui a été à l’origine de l’annulation de la fête en 2021. Les violences, attribuées à des mouvements armés djihadistes affiliés à Al-Qaïda et au groupe État islamique, ont fait des milliers de morts et près de 2 millions de déplacés depuis 2015.

 
Le président Roch Marc Christian Kaboré

Le président Roch Marc Christian Kaboré en 2019

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