L’Almanach international
Parce que chaque jour est important quelque part dans le monde
26 janvier : le jour où la république de Lettonie a été reconnue de jure
Il y a cent ans jour pour jour, la république de Lettonie obtenait une reconnaissance internationale. Pour ce pays qui n’avait jamais existé auparavant, rien n’était gagné d’avance.
C’est un événement important pour un pays qui n’avait jamais existé auparavant : le 26 janvier 1921, la Lettonie était reconnue de jure par les principaux pays de l'époque : Grande-Bretagne, France, Italie, Belgique, etc. Chaque année, le ministère letton des Affaires étrangères organise des événements festifs pour commémorer cette Journée de la reconnaissance de jure de la république de Lettonie (Latvijas Republikas starptautiskās de jure atzīšanas diena).
Profitant de la déconfiture de l’Empire russe, tombé aux mains des bolcheviques et de la défaite allemande, actée le 11 novembre 1918, un Conseil national letton, constitué des principaux partis politiques, à l’exception des bolcheviques, s’est mis en place à Riga. Le 18 novembre 1918, il proclamait l’indépendance de la république de Lettonie alors que le pays était encore occupé par une armée allemande refusant la défaite. Bientôt, les bolcheviques allaient tenter de réintégrer le pays à une entité dominée par les Russes. Puis des mercenaires allemands et troupes russes blancs restées fidèles à la monarchie, allait déferler sur le pays… À un moment donné, privé toute assise territoriale, le gouvernement provisoire letton avait même trouvé refuge sur un navire allié mouillant au large de Liepāja. Pendant au moins une année, l’existence d’une Lettonie est restée hypothétique bien que l’Allemagne ait finalement abandonné son projet d’annexion des pays baltes. Le 25 novembre 1918, le gouvernement de Kārlis Ulmanis reçut un document d'Augusta Winnig, ministre plénipotentiaire allemande dans les pays baltes, confirmant la reconnaissance provisoire de l'État de la Lettonie.
Finalement, c’est le 11 novembre 1919, qu’une victoire militaire a permis à la république de Lettonie de s’établir selon les vœux du comité du 18 novembre 1918. Un appui militaire des Anglais, des Britanniques et des Estoniens, a été décisif contre les forces russo-allemandes. En janvier 1920, l’État letton commence à fonctionner et s’attend à une reconnaissance rapide des Alliés qui l’ont aidé à exister. D’autant que l’Armée rouge ayant été expulsée du pays, la Russie soviétique signe un traité de paix avec la Lettonie le 11 août 1920. En Europe occidentale, surtout en France, pourtant, on hésite encore car on n’a pas renoncé à l’idée de voir la monarchie rétablie en Russie et qu’une Russie forte et redevenue raisonnable pourrait faire un contrepoids à la menace allemande toujours latente. L’indépendance des États baltes affaiblissait inévitablement la Russie et ces petites républiques pouvaient à nouveau être un jour convoitée par les Allemands. L’hésitation durera plusieurs mois.
Rien n’était gagné d’avance, même si Lord Balfour pour le gouvernement britannique, avait dès l’automne 1918 promis une reconnaissance. À la conférence de paix de Versailles, les Lettons n’ont rien obtenu. On se souvient que des promesses faites, à l’époque, aux Arméniens, aux Kurdes, aux Arabes… n’avaient pas été tenues, pour des calculs d’équilibres des forces.
Finalement, sans l’avoir annoncé préalablement, le 26 janvier 1921, le Conseil suprême des alliés composé de la Grande-Bretagne, la France, l’Italie, le Japon et la Belgique, décide à l’unanimité de reconnaître de jure la Lettonie et l’Estonie. Cela a marqué le début, dans les semaines qui ont suivit, d’une large reconnaissance internationale de la Lettonie, la Pologne, la Finlande, l'Allemagne, la Norvège, la Suède, le Danemark, la Perse, l'Autriche, le Portugal, la Roumanie et d'autres pays reconnurent pleinement la République de Lettonie. Même la Russie, le 18 mars 1921. En septembre, elle fait son entrée à la SDN. Seuls manquaient les États-Unis où le président Woodrow Wilson continuait à s’en tenir à la fiction d’une Russie unie et indivisible. C’est son successeur, Warren Harding qui reconnaîtra la Lettonie, le 28 juillet 1922.
La république de Lituanie attendra plus longtemps encore sa reconnaissance qui n’interviendra que le 20 décembre 1922.
Même après la perte de facto de l'indépendance en 1940 (la Lettonie ayant été annexée à l’URSS en même temps que ses voisines baltes), l'État letton a existé en tant que sujet de droit international jusqu'au rétablissement complet de l'indépendance de la République de Lettonie en août 1991. Après l'occupation de 1940, le service des affaires étrangères était la seule autorité publique de la République de Lettonie qui continuait à exercer ses fonctions de représentation du pays sur la scène internationale. Des missions diplomatiques et consulaires de Lettonie ont poursuivi leur travail aux États-Unis, au Royaume-uni, en Argentine et en Suisse, ce qui constitue un cas sans précédent dans l'histoire de la diplomatie mondiale. Le statut de jure, toujours valable, a permis à la République de Lettonie, restaurée en 1991, d'être considérée comme l'héritière des droits de la République de Lettonie d'avant-guerre et de mettre rapidement en œuvre pleinement sa politique étrangère conformément à la pratique acceptée sur le plan international. Voilà pourquoi, le 26-Janvier est si important pour les Lettons. Cette journée commémorative n’est toutefois pas un jour férié.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 25 janvier 2024
26 janvier : Australia Day ou Invasion Day ? La fête nationale controversée des Australiens
Ce 26 janvier est la fête nationale de l’Australie, la journée est toujours très festive en plein cœur de l’été austral. Mais pour les Aborigènes cet anniversaire de la fondation du pays par les Européens est avant tout un jour de deuil et de colère. Faut-il alors en changer la date ?
L’Australie célèbre aujourd’hui sa fête nationale, ce 26 janvier, dans des conditions presque normales. Comme chaque année, sont prévues des barbecues communautaires sur fond de musique live, des expositions de voitures anciennes, des étals de marché, des grésillements de saucisses, des courses de kayak... C’est l’été austral.
Ce soir, à la nuit tombée, l’Australie va retentir de feux d’artifices, cette journée d’été, où il peut faire très chaud, est à la fois festive et patriotique. On commémore l’installation le 26 janvier 1788 des premiers Européens sur les côtes de l’Australie : la fondation d’un bagne dans la baie de Sydney. Ce jour-là, le capitaine Arthur Phillip proclamait la souveraineté britannique sur cette nouvelle terre aussitôt déclarée Terra Nullis (terre inhabitée).
Australia day est aussi l’occasion de remettre des prix et des décorations en tous genres, aux citoyens qui se sont distingués. La journée est fériée depuis 1994, mais tout le monde n’est pas à la fête. Pour certains, c’est même un jour de deuil : la date a été baptisée « Invasion Day » en 1972, par les Aborigènes. Depuis la fête nationale de cette année-là, ils occupent chaque année la pelouse de l’ancien parlement par un village de tentes. Cette « ambassade aborigène » est là pour revendiquer leurs droits. Les Aborigènes étaient un million à l’arrivée des Européens. Plus de deux siècles plus tard, ils sont moins d’un demi-million, dans un pays qui compte 25 millions d’habitants. 80% sont illettrés, la plupart vivent d’un revenu minimum social… En 2008, le Premier ministre a formulé des excuses mais n’a pas changé la date de la fête nationale.
#changethedate («Abolissez la date !») est le mot-dièse de cette revendication qui chaque année se fait de plus en plus pressante. Comment peut-on faire débuter l’histoire de l’Australie il y a 236 ans, alors que des hommes et des femmes y vivent depuis 65 000 ans ? Politiquement, ces Aborigènes n’existaient pas. Jusqu’en 1967, ils n’étaient même pas comptabilisés lors des recensements. Et bien sûr, n’avaient pas le droit de vote. Une partie des Australiens admet aujourd’hui la pertinence de leurs revendications. Mais en même temps, se disent attachés à la date du 26 janvier et ne veulent pas en changer. L’Australie commence à peine à prendre la mesure des horreurs commises durant la colonisation envers les populations aborigènes. Certains voient aussi dans cette date l’occasion, au moins une fois dans l’année, de se rappeler quel a été le prix de la colonisation. Une journée pour que s'exprime ce qui reste de la culture aborigène : le 26 janvier, ce n’est pas très cher payé. Loin de ce genre de débat, en réalité, une majorité d’Australiens profite avant tout de cette journée de congés pour aller à la plage ou partir en week-end prolongé.
Les Aborigènes du continent australien et les insulaires de l’archipel du détroit de Torres demandent à être spécifiquement mentionnés dans la constitution australienne. Ils demandent aussi à avoir une voix (The Voice) garantie au Parlement australien. Le Premier ministre s’est engagé à organiser un référendum sur le sujet d’ici la fin de l’année 2023. Le résultat n’est pas acquis.
Le site officiel de l'Australia Day
Le Facebook du WAR Warriors of the Aboriginal Resistance, un mouvement d’activistes qui manifeste chaque 26 janvier pour commémorer la mémoire des résistants aborigènes
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 25 janvier 2021
26 janvier : la République dominicaine célèbre Juan Pablo Duarte
C’est le 209e anniversaire de l’un des trois Padres de la Patria, les fondateurs et héros nationaux de la République dominicaine.
C’est un des trois Padres de la Patria, fondateurs et héros nationaux de la République dominicaine, avec Francisco del Rosario Sánchez et Ramón Matías Mella. Son anniversaire (Día del natalicio del Padre de la Patria Juan Pablo Duarte), chaque 26 janvier, est un jour férié.
Juan Pablo Duarte y Diez est né le 26 janvier 1813 à Saint-Domingue. À l'époque, la Capitainerie Générale de Saint-Domingue appartenait à l'Espagne. En 1821, l'élite créole a vaincu les colonialistes espagnols et a établi la République espagnole d'Haïti. Ainsi commença l'occupation haïtienne de Saint-Domingue.
En 1838, Duarte et un groupe de jeunes ont fondé La Trinitaria, une société patriotique secrète, pour obtenir l'indépendance à l’égard d'Haïti et établir la République dominicaine en tant qu'État souverain. Dans les années suivantes, Duarte et d'autres membres de La Trinitaria se sont alliés à d'autres révolutionnaires qui les ont aidés à diffuser les idées de libération.
Enfin, en 1844, la République dominicaine est devenue un État indépendant. Duarte s'est vu offrir la présidence, mais il a refusé et a insisté sur des élections démocratiques.
L'anniversaire de Duarte est observé comme un jour officiel du souvenir et un jour férié en République dominicaine. Ce jour-là, diverses cérémonies sont organisées pour honorer la mémoire du héros national. La plus importante a lieu dans le parc de l'Indépendance à Saint-Domingue, la capitale du pays. Duarte est aussi célébré par la levée du drapeau national, devant des représentant du gouvernement, puis par un Te Deum à la cathédrale et un dépôt de couronne à sa statue. Cette année, 2022, le Jour de Duarte tombant un mercredi, la journée chômée a été déplacée au lundi 24 janvier. En revanche les hommages des autorités ont bien lieu ce 26 janvier.
26 janvier : l'Inde célèbre son modèle démocratique
Jour de la République, en Inde, célèbre l’entrée en vigueur de la Constitution qui fait de l’Union indienne « une république souveraine, socialiste, laïque, démocratique » et un État où la démocratie est toujours bien vivante. Combien de pays d’Asie peuvent en dire autant ?
Les pays où les résultats des élections ne sont pas connus d’avance ne sont pas aussi nombreux qu’on ne le pense. Voilà au moins une différence majeure entre l’Inde et la Chine : l’alternance démocratique. L’année dernière, celle-ci n’a pourtant pas eu lieu, le BJP au pouvoir a au contraire renforcé ses positions. Le pourrait-il aujourd’hui alors que les différentes oppositions sont très remontées contre sa politique d’exclusion des minorités.
Un défilé militaire très coloré et teinté de ferveur patriotique parcours chaque 26 janvier la majestueuse avenue Rajpath à New Delhi pour ce Jour de la République. La date célèbre l’entrée en vigueur de la Constitution qui fait de l’Union indienne « une république souveraine, socialiste, laïque, démocratique », le 26 janvier 1950. Est-ce encore le cas aujourd’hui que la BJP a fait voter une loi excluant les non hindous de toute possibilité de naturalisation ? La nouvelle loi sur la citoyenneté (le Citizenship Amendment Act, CAA) qui définit implicitement ceux qui, parmi les « réfugiés », peuvent être considérés comme « légaux ». La définition se fait sur une base religieuse visant à conforter la majorité du pays décrite comme « hindoue ».
73 ans après l’indépendance de 1947, la « plus grande démocratie du monde » jouit d’un système politique stable, où les élections permettent de changer le gouvernement et où la presse et la justice veillent au respect des droits des citoyens. L’envers du décor : une bureaucratie imposante, une corruption endémique (lien de nombreux politiciens avec la pègre), un clientélisme politique généralisé, l’émergence de partis populistes et une dérive du pays vers un système de discrimination raciale clairement affirmé. Le fait que le brésilien Jair Bolsonaro soit, aujourd’hui, l’invité d’honneur du défilé militaire de Delhi, n’est pas un très bon signe.
Aujourd’hui, des défilés ont lieu dans différentes villes, c’est aussi l’occasion pour l’Inde mettre en scène sa puissance militaire. Le Jour de la République est également l’occasion au Cachemire de manifester contre la politique de New Delhi à son égard.
De 1930 à 1947, chaque 26 janvier, le Parti du Congrès (le mouvement indépendantiste indien) appelait à manifester contre l’occupation britannique du pays. Cette date était désignée comme le « Jour de l’indépendance » depuis qu’en 1930, le 26 janvier, ce parti avait proclamé (sans effet) l’indépendance du pays en réponse à l’octroi d’un simple statut de « dominion » à l’Inde par les Britanniques qui occupaient le pays.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 26 janvier 2020