L’Almanach international
Parce que chaque jour est important quelque part dans le monde
24 mars : la Journée de la vie, journée militante anti-avortement en Pologne
La Journée nationale de la vie a été instaurée à une époque où le Parlement était dominé par les partis conservateurs et l’extrême droite catholique qui ont fait de la Pologne le pays le plus restrictif d’Europe en matière d’IVG. Depuis, le pays a changé et le nouveau gouvernement a promis de faire évoluer la législation en dépit du puissant lobby traditionaliste.
La Journée nationale de la vie (Narodowy Dzień Życia) a été instaurée en 2004 par le Sjem (Parlement) à une époque où il était dominé par les conservateurs et l’extrême droite catholique. Cette journée du 24 mars, qui n’est toutefois pas un jour férié, a été placée la veille de la fête chrétienne de la Nativité (25 mars) qui est aussi une journée militante. En effet, une Journée mondiale de la sainteté de la vie est célébrée chaque année le 25 mars a l’initiative du pape Jean Paul II.
Le parti Droit et justice (Prawo i Sprawiedliwość, PiS), nationaliste et ultra-conservateur, qui a dominé le paysage politique polonais de 2004 à 2007 et de 2015 à 2023, est aussi celui du président Andrzej Duda dont le mandat court jusqu’en juillet 2025. Celui-ci dispose d’un droit de veto sur les lois votées. L’interdiction de l’avortement a été l’un des chevaux de bataille du PIS au pouvoir pendant toutes ces années. La législation en la matière a même été nettement durcie en 2017 et à nouveau en 2020.
De fait, la Pologne reste le pays d’Europe où le droit à l'IVG est de loin le plus restrictif d'Europe (si on excepte les très hypocrites principautés du Liechtenstein et de Monaco dont les frontières sont vite franchies en cas de besoin). Cette quasi interdiction ne correspond plus aux attentes d’une population polonaise qui a pris nettement ses distances avec l’Église. En juin 2023, encore, des milliers de manifestants descendaient dans les rues de Varsovie, pour dénoncer le décès d’une femme enceinte, Dorota Lalik, le 24 mai 2023. Alors que sa vie était menacée, les médecins ont refusé d’intervenir tant que la mort du bébé n’était pas confirmée. Le bébé est mort, la mère aussi. Depuis 2020, six autres femmes enceintes ont ainsi péri, faute d’aide médicale.
L'IVG avait été autorisée par les communistes dès 1956, bien avant les pays occidentaux. C'est la chute du mur et le retour de l'Église au pouvoir, sous la présidence de Lech Wałęsa, qui avait entrainé son abrogation en 1993.
Mais depuis les élections d'octobre 2023, un nouveau gouvernement polonais, plus libéral, a déjà approuvé un projet de loi ouvrant l'accès libre à l'IVG médicamenteuse (jusque-là interdit en Pologne) et le nouveau Premier ministre Donald Tusk a annoncé que, conformément à ses promesses électorales, son parti centriste, la Coalition civique (KO), annonce un texte autorisant l'avortement légal et sécurisé jusqu'à la 12e semaine de la grossesse et et supprimant la clause de conscience pour les médecins travaillant dans les établissements publics. Arrachée au camp libéral par les mobilisations féministes, cette promesse continue à faire débat au sein de la nouvelle coalition. Le texte n’a pas encore été voté par le Sjem.
Rien n’est gagné en effet, un membre de la coalition gouvernementale, la Troisième voie (chrétien-démocrate), est opposé à l'idée d'une libéralisation aussi poussée du droit à l'avortement. Ce groupement, composé du parti Pologne 2050 du président de la chambre basse du parlement, Szymon Holownia, et du parti paysan PSL, propose seulement le retour de l'ancienne loi de 1993 qui prévoyait un droit très limité à l'avortement.
Le 24 mars est traditionnellement l’occasion de Marches pour la vie et pour la famille. Mais cette année, cependant, en raison du dimanche des Rameaux, qui tombe le 24 mars, l'événement a été reporté au 14 avril, jour du baptême de la Pologne.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 23 mars 2024
24 mars : en Pologne, la journée nationale de la vie, une journée militante et controversée
La thématique de cette journée officielle en Pologne a été imposée au pays par les milieux catholiques ultra-conservateurs, actuellement au pouvoir à Varsovie. La législation anti-avortement qui en a découlé est à l’origine de nombreux drames dans le pays.
Cette journée nationale de la vie (Narodowy Dzień Życia ) est un jour férié récent. Il a été créé par une résolution du Sejm (parlement) du 27 août 2004. Il est férié mais non chômé. La date choisie pour cette journée par la mouvance la plus conservatrice du Parlement, est la veille de la fête catholique de l’Annonciation, le 25 mars.
Depuis la création de cette fête, les célébrations ont chaque année leurs slogans directeurs. Jusqu'à présent, ceux-ci ont inclus: "La famille comme recette de crise", "Je parie sur la famille", "Ensemble pour toujours", "Je suis mère, c'est mon métier". Le slogan attribué à une célébration de la Journée de la vie donnée mettait toujours l'accent sur la valeur qui était particulièrement promue au cours d'une année donnée. Le thème de cette année est "Nos familles, nos enfants, notre avenir".
La coalition ultra-conservatrice au pouvoir en Pologne est dominé par le PIS, (Prawo i Sprawiedliwość) est un parti politique d’extrême droite réactionnaire et eurosceptique. Il devient majoritaire au parlement en 2005 et prôné un durcissement de la loi anti-avortement, le refus du mariage homosexuel comme de l’euthanasie, et lance la promesse d’un référendum sur la peine de mort…
En Pologne, l’IGV est quasiment interdite. Seules deux exceptions existent : si la vie de la mère est en danger ou bien si la grossesse est le résultat d’un viol ou d’un inceste. Cette seconde exception est même régulièrement menacée par les militants pro-vie qui, par ailleurs, ont obtenu l’interdiction de l’IVG en cas de malformation du fœtus. Telle est la thématique d’une journée officielle à laquelle n’adhère qu’une partie de Polonais. Cette législation, l’une des plus restrictive d’Europe a déjà tué plusieurs femmes, morte à l’hôpital public, pendant que les médecins évaluaient les chances de survie du fœtus et refusait d’intervenir tant qu’il existait un souffle de vie de sa part quitte à sacrifier la santé, voire la vie de la mère.
La thématique de cette journée officielle en Pologne est partagée par les milieux catholiques ultraconservateurs, notamment aujourd’hui en Italie, et les courants d’extrême droite du protestantisme américain.
24 mars : 46 ans après le coup d'État militaire, l'Argentine se souvient de la dictature
L’Argentine commémore le coup d’État de 1976 et les 30 000 victimes de l’État policier. Cette Journée nationale de la mémoire et pour la vérité est fériée, mais la fête n’est pas du goût de tout le monde, car elle rappelle le premier jour de la période la plus sombre de l’histoire de l’Argentine.
L’Argentine commémore le coup d’État de 1976 et les 30 000 victimes de l’État policier. Cette Journée nationale de la mémoire et pour la vérité (Día Nacional de la Verdad y la Justicia), instituée en 2002, est fériée depuis 2006, mais la célébration du 24 de marzo n’est pas du goût de tout le monde, car elle rappelle le premier jour de la période la plus sombre de l’histoire de l’Argentine marqué par des violations quotidiennes des droits humains, des assassinats politiques, des enlèvements d’enfants… Avec celle de Pinochet, au Chili à la même époque, la dictature instaurée par Jorge Rafael Videla à la suite du coup d’État militaire du 24 mars 1976, a été l’une des plus sanglante du continent.
Dès le retour de la démocratie, la première marche avait été organisée le 24 mars 1986 pour commémorer le coup d'État organisé par les Mères de la place de Mai, mais il a fallu attendre les années 2000 pour en faire un jour férié, d’abord non chômé, puis le président Kirchner en a fait une journée non travaillé (2006). Le président Macri a tenté en 2017 d’en faire une fête mobile, mais a dû y renoncer devant le tollé provoqué par l’abandon de la date symbole du 24 mars.
Après la chute du régime militaire (le 10 décembre 1983), une loi dite “point final” (1986) pardonnait aux responsables de crimes contre l'humanité, aucune poursuite ne pouvait être entreprise.Le 14 juin 2005, grâce au président Néstor Kirchner, la Cour suprême de justice de la nation a finalement déclaré l'inconstitutionnalité de cette loi, ce qui avait permis l'organisation de nombreux procès publics contre les auteurs des crimes de la dictature. À l'heure actuelle, on continue d'enquêter sur les événements survenus entre 1976 et 1983 dans les différents centres de détention clandestins.
Des Français ont été victimes de la répression. Une cérémonie a eu lieu à l'ambassade d'Argentine en France à Buenos Aires, devant la plaque "Plus jamais" en souvenir des victimes du terrorisme d'État. On ne peut célébrer cette journée sans faire référence à la Marche des mères de la Plaza de Mayo, aux grand-mères de la Plaza de Mayo , à Héctor Germán Oesterheld, à Adolfo Pérez Esquivel… sans oublier l’écrivain Rodolfo Walsh, le fondateur du journalisme d'investigation en Argentine, assassiné par la junte militaire le 25 mars 1977, le lendemain de l’anniversaire du coup d’État.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 23 mars 2022
Mise à jour 2024 : le nouveau président argentin, d’extrême droite, Javier Milei, s’applique à nier ou relativiser les crimes de la dictature : « il n’y a pas eu 30 000 disparus » s’obstine-t-il à affirmer. Ce 24 mars 2024, au moment même où avait lieu la traditionnelle marche mémorielle, le gouvernement mettait en ligne une vidéo de 12 mn remettant, pour la première fois depuis 1983, au goût du jour, la « théorie des deux démons » (Teoría de los dos demonios) qui consiste à justifier les crimes contre l’humanité commis pendant la dictature en les présentant comme une réponse à des attentats perpétrés, à l’époque, par des groupes d’extrême gauche. Milei a assorti la vidéo d’un mot-dièse : #nofueron3000 (ils n’ont pas été 30 000). Quant à la ministre de la sécurité, Patricia Bullrich, elle s’est apitoyée sur le sort des militaires et policier « injustement emprisonnés ». Le projet économique de Javier Miliei est totalement en phase avec celui de la dictature ; ses idées sur la société argentine également. Va-t-il faire basculer le pays à nouveau dans l’horreur ?
24 mars : la Serbie se souvient des bombardements de l'OTAN
L’OTAN avait bombardé la Serbie pendant plusieurs semaines en 1999 pour prévenir un nouveau génocide de la part des Serbes. Après les horreurs de Srebrenica, le même processus avait commencé au Kosovo. L’intervention, illégale au regard du droit, avait permis de stopper les massacres, mais au prix de centaines de victimes des bombardements.
La Serbie célèbre chaque 24 mars Journée à la mémoire des bombardements de l’OTAN (Дана сећања на жртве НАТО бомбардовања). Ce soir les sirènes d'alerte de défense antiaérienne vont retentir à 19H45 (18H45 GMT), l'heure des premières frappes du 24 mars 1999. Cette journée de commémoration officielle n’est pas fériée.
La campagne avait impliqué l’ensemble des membres de l’OTAN à l’exception de la Grèce. Elle a duré 11 semaines. L'Otan a visé des dizaines de cibles militaires, puis des infrastructures (ponts, intersections ferroviaires, réseau électrique). Mais les bombardements ont parfois manqué leur cible, en faisant des victimes civiles, dont le bilan ne fait pas consensus. Les chiffres vont de 500 morts, selon l'ONG Human Rights Watch (dont les deux tiers sont des Albanais réfugiés en Serbie), à 2 500 selon le chiffre officiel des autorités serbes.
Cette intervention de l’OTAN contre la Serbie est citée régulièrement en exemple par les extrêmes droites et extrêmes gauches européennes qui soutiennent l’insoutenable : la destruction de l’Ukraine par Vladimir Poutine. Pourtant les contextes sont très différents. Les forces serbes étaient en guerre contre les mouvements indépendantistes kosovars. La province autonome du Kosovo (peuplée à plus de 80% d’Albanais), à laquelle Belgrade a supprimé toute autonomie, était en lutte contre la tutelle serbe. Ce conflit avait déjà fait 13 000 morts pour l’essentiel des Albanais tués par les forces serbes. Le massacre qui a déclenché l’intervention de l’OTAN est le massacre de Račak, un massacre délibéré de 45 civils par la police serbe, le 15 janvier 1999.
Les opinions publiques occidentales avaient découvert l’ampleur des massacres opérés par l’armée serbe en Bosnie. Le plus terrible fut le massacre de Srebrenica ou plus de 8 000 hommes et adolescents bosniaques ont été méthodiquement sélectionnés et exécuté un à un par les Serbes quasiment sous les yeux des casques bleus de l’ONU. Ces derniers incapables d’intervenir, ont refusé l’intervention de l’OTAN qui déjà à l’époque s’était proposée. Ce massacre, et ce ne fut pas le seul en Bosnie, a été qualifié de génocide par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) et la Cour internationale de justice à plusieurs reprises. C’est pour ne pas être les témoins impuissants de tels massacres que les opinions publiques européennes et américaines ont soutenu massivement cette intervention de l’OTAN pourtant illégale au regard du droit international puisque le Kosovo n’est pas membre de l’OTAN et ne pouvait donc pas bénéficier de l’article 5, ni non plus la Bosnie-Herzégovine.
Les bombardements sur la Serbie avaient finalement contraint Slobodan Milosevic, le leader serbe, à retirer ses troupes du Kosovo. Cette province (anciennement autonome) majoritairement peuplée d'Albanais, avait été mise sous l'administration de l'ONU, puis a proclamé en 2008 son indépendance que la Serbie refuse toujours de reconnaître.
Aucune comparaison peut être faite entre l’entreprise génocidaire serbe en Bosnie et au Kosovo et les affrontements armés entre forces ukrainiennes et forces russes au Donbass qui en huit ans de guerre ont causé la mort de quelque 3500 civils.
En Serbie, le 24 mars est marqué par des cérémonies du souvenir organisées dans les villes et villages de toute la Serbie. Une cérémonie de dépôt de la colère à laquelle assistent de hauts responsables du gouvernement a lieu à la Flamme éternelle à Belgrade qui a été érigée en souvenir des victimes militaires et civiles du bombardement.
Au Kosovo, on se félicite de ce sauvetage inespéré qui a permis au pays d’exister et à un peuple de ne pas être dispersé ou massacré.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde