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1947, Algérie, Guerre d'indépendance, 18 février Bruno Teissier 1947, Algérie, Guerre d'indépendance, 18 février Bruno Teissier

18 février : l'Algérie célèbre ses martyrs pour conforter son régime

La Guerre d’indépendance est au cœur de l’identité nationale algérienne. La Journée nationale du Chahid (combattant mort durant le conflit) en est l’une des principales manifestations. Mais aujourd’hui, la jeunesse qui aspire à un nouveau régime, n’y attache plus la même importance.

 

La guerre d’indépendance est au cœur de l’identité nationale algérienne. La Journée nationale du Chahid (يوم الشهيد), les combattants morts durant le conflit, en est l’une des principales manifestations. Mais aujourd’hui, la jeunesse qui aspire à un nouveau régime, n’y attache plus la même importance.

Cette Journée du Chahid n’a été instaurée qu’en 1992. La date du 18 février fait référence à la création le 18 février 1947 de l'Organisation spéciale (OS), une organisation militaire clandestine, bras armé du MPLA, le mouvement de Messali Hadj. Ce personnage a été longtemps occulté par l’histoire officielle mais l’OS appartient pleinement à la mythologie de la Guerre d’indépendance. En 1947, le FLN n’avait pas encore été fondé. La date de la création de l’OS est certainement approximative, mais le 18 février a l’avantage de rappeler une autre date celle du 18 février 1957, le jour où la « question algérienne » était présentée devant l’Assemblée générale des Nations unies. À partir de cet autre 18 février, le conflit algérien n’a plus été un seul problème intérieur français mais une affaire relevant du droit international. En effet, la Guerre d’Algérie n’a pas été qu’un conflit de terrain, elle a aussi été une guerre diplomatique, menée de main de maître par les nationalistes algériens.

Cela dit, le pays est indépendant depuis le 5 juillet 1962 et la Journée du Chahid n’a été inventée que trente ans plus tard, à usage interne. À l’époque, il s’agissait de légitimer un régime mis à mal par les assauts des islamistes qui ont fait régner la terreur pendant une décennie en Algérie. Aujourd’hui encore, cette commémoration a pour mission de conforter un gouvernement à bout de souffle qui a été vivement contesté par le Hirak (les manifestations populaires qui ont secoué le pays à partir 22 février 2019) et qui a pris un tour très répressif depuis quelques mois.

Faute d’appuyer sa légitimité sur la démocratie, le pouvoir algérien cultive le souvenir de la Guerre d’indépendance. C’est ce conflit qui a permis à un clan de s’imposer à la tête du pays et d’y demeurer jusqu’à aujourd’hui. Avec le temps, il est de plus en plus difficile de jouer sur la corde du combat anticolonialiste. Depuis la mort du général Ahmed Saïd, en décembre 2019, le chef d’État-Major de l’armée qui lui a succédé est trop jeune pour avoir participé à la guerre de libération. Il en est de même du président Tebboune en poste depuis novembre de la même année. Tous deux, néanmoins, ont la Guerre d’indépendance comme héritage politique, faute de pouvoir appuyer leur mandat sur la volonté du peuple.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

Sur l’Algérie lire aussi : Géopolitique de l’Algérie par Kader A. Abderrahim

 
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Une grande opération de nettoyage du littoral, un 18 février, peut aussi être un hommage aux chouhada

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1961, France, Algérie, guerres coloniales, massacre, 17 octobre Bruno Teissier 1961, France, Algérie, guerres coloniales, massacre, 17 octobre Bruno Teissier

17 octobre : il y a 60 ans, on noyait les Algériens dans la Seine

Le 17 octobre 1961, quelque 20 à 30 000 Algériens de Paris manifestaient pacifiquement pour protester contre le couvre-feu auquel ils étaient astreints. Sur ordre de Maurice Papon, préfet de police de Paris, les forces de l’ordre lancèrent un l’assaut qui sera sans pitié… plusieurs centaines de morts seront à déplorer.

 

Le 17 octobre 1961, quelque 20 à 30 000 Algériens de Paris manifestaient pacifiquement pour protester contre le couvre-feu auquel ils étaient astreints. Sur ordre de Maurice Papon, préfet de police de Paris, les forces de l’ordre lancèrent un l’assaut qui sera sans pitié : ceux qui cherchaient à rentrer chez eux furent arrêtés au pont de Neuilly et jetés dans la Seine par les policiers. Très peu savaient nager, la plupart se sont noyés. D’autres ont été retrouvés pendus près du Centre d’identification de Vincennes. La police, qui à l’époque n’avait admis que 3 morts, reconnaît aujourd’hui 140 victimes, les historiens évoquent 200 à 600 morts et disparus.

Le drame a longtemps été occulté, notamment par la tuerie policière du métro Charonne, l’année suivante, autre page noire des années De Gaulle qui couvrait la police de peur qu’elle ne le protège pas de l’OAS. Il a fallu la publication de l’ouvrage de l’historien Jean-Luc Einaudi et la manifestation anniversaire de 1991 pour que la mémoire des faits resurgisse et que les familles demandent réparation ; puis un procès (Papon contre Einaudi), en 1999, pour que l’État admette la réalité du « massacre ». Lionel Jospin s’opposera à une reconnaissance officielle. Le 17 octobre 2012, le président Hollande publie un communiqué : « Le 17 octobre 1961, des Algériens qui manifestaient pour le droit à l'indépendance ont été tués lors d'une sanglante répression. La République reconnaît avec lucidité ces faits. Cinquante et un ans après cette tragédie, je rends hommage à la mémoire des victimes ». Il oublie de préciser que la manifestation était pacifique, comme c’est indiqué sur la plaque apposée par le maire de Paris en 2001 sur le pont Saint-Michel où a lieu la commémoration annuelle, au cours de laquelle une gerbe est jetée dans la Seine. Cette plaque a été remplacée par une stèle le 17 octobre 2019. En 2021, le président Macron dénonce, pour la première fois, des « crimes inexcusables pour la République ».

Quant à l’Algérie, elle a fait du 17 octobre la Journée nationale de l’Émigration. Celle-ci est célébrée à Alger au musée national du Moudjahid, en présence de moudjahidine de la Fédération France du FLN, d’historiens, de représentants de la gendarmerie nationale et de la DGSN.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 16 octobre 2021

Mise à jour 2024 : L’Assemblée nationale a voté jeudi 28 mars 2024 un texte demandant au gouvernement l’instauration d’une journée de commémoration du massacre du 17 octobre 1961. Sans surprise, seuls les députés issus des rang du Rassemblement national ont voté contre.

 
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