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1919, Chine, Taïwan, manifestation politique Bruno Teissier 1919, Chine, Taïwan, manifestation politique Bruno Teissier

4 mai : place Tien an Men, la jeunesse manifeste contre les pouvoirs

Le 4 mai 1919, 3 000 étudiants manifestent à devant la porte Tien an Men à Pékin. Ils protestent conte les conditions imposées à la Chine par le traité de Versailles… une date mythique en Chine. Les étudiants qui se sont fait massacrer le 4 juin 1989, étaient inspiré par l’esprit du 4 mai.

 

Bien sûr, il ne s’agit pas de la manifestation à laquelle on pense qui est commémorée aujourd’hui, mais celle du 4 mai 1919. Ce jour-là, quelque 3 000 étudiants manifestaient à Pékin, devant la porte Tien an Men. Ils protestaient contre les conditions imposées à la Chine par le traité de Versailles qui avantageaient le Japon. Ce mouvement traduit l'émergence en Chine d'une conscience patriotique opposée aux Occidentaux comme aux Japonais. C’est pour cela que cette manifestation a toujours été commémorée par le pouvoir chinois. Mais, c’est aussi le premier mouvement de la jeunesse chinoise moderne. Ils protestaient aussi, et surtout, contre le pouvoir des mandarins et l’oppression des femmes. Ils considéraient que le commandement de l'armée qui dirigeait la Chine comme des dictateurs corrompus, n'avaient pas réussi à protéger la patrie chinoise.  Les manifestations qui s’étaient prolongées par des grèves massives, en juin 1919, avaient fini par faire céder le pouvoir. Le gouvernement Beiyang avait ordonné à ses représentants en France de refuser de signer le traité de Versailles, de licencier les fonctionnaires que les manifestants jugeaient particulièrement corrompus et de libérer tous les étudiants emprisonnés. Le mouvement du 4-Mai (五四运动) est resté ancré dans la mémoire chinoise.

Il est commémoré chaque année en république populaire de Chine, où depuis 1949, le 4 mai est la Fête de la Jeunesse (青年节). À cette occasion, les jeunes de 14 à 28 ans ont une demi-journée de congé. Évidemment, c’est une jeunesse docile qui est célébrée, pas celle qui se soulève. Pour le 70e anniversaire, en 1989, se souvenant du Mouvement du 4-Mai, des milliers d’étudiants ont manifesté sur la même place Tien an Men qu’ils ont occupé pendant un mois dans le but de faire bouger les choses en direction de la démocratie. En réponse, le gouvernement chinois instaura la loi martiale et fit intervenir l'armée. La révolte finira en bain de sang, un 4 juin (une date qu’il est, bien sûr, absolument interdit de commémorer).

Le 4 mai est aussi célébré à Taïwan, où c'est la Fête de la Littérature (文藝節).

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 4 mai 2023

 

Œuvre de Liang Yulong (1976) pour célébrer le mouvement du 4 mai

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4 mai 1989, un mois avant le massacre du 4 juin

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1953, Iran, 7 décembre, étudiants Bruno Teissier 1953, Iran, 7 décembre, étudiants Bruno Teissier

7 décembre : la journée de tous les dangers en Iran

En principe, c’est une commémoration officielle de la République islamique aux accents nationalistes, très anti américains et, en même temps, une journée de contestation étudiante contre le régime. Ce 7 décembre sera-t-il celui du renversement de la dictature des mollahs ?

 

En principe, cette journée est une commémoration officielle de la République islamique aux accents nationalistes, très anti américains, mais cette année où le régime est au bord du gouffre, rien n’est vraiment prévu. D’autant qu’en même temps, le 7 décembre est aussi, traditionnellement, une journée de contestation étudiante contre le régime des mollahs, dans les universités comme dans la rue.

Cette année, la situation a vraiment dérapé, le point de non-retour est peut-être atteint pour le régime. Une grève générale a été lancée lundi. Non seulement les étudiants ne vont plus en cours mais même les bazars ont baissé les rideaux, à Téhéran et jusque dans les villes les plus reculées. Comme annoncé, les 5 et 6 décembre sont des journées de grève générale et la journée du 7 est celle des manifestations dans tout le pays… La jeunesse est aujourd’hui soutenu pas toutes les générations.

La Journée des étudiants (روز دانشجو ) était à l’époque du Shah, une journée de manifestation contre la dictature et son soutien américain. Depuis quelques années, elle a repris des accents protestataires contre le régime de la part des étudiants. Le 7 décembre 2019, trois semaines après la répression sanglante de novembre, les étudiants iraniens s’étaient rassemblés dans plusieurs universités pour montrer que la lutte se poursuivait. Un rassemblement devant converger la place Azadi (Liberté) de Téhéran est annoncé.

Le 7 décembre 1953, les étudiants de l’université de Téhéran manifestaient contre la visite du président américain Richard Nixon venu recevoir un titre de docteur honoris causa, mais surtout contre l’allégeance à son égard du jeune shah tout juste rétabli sur son trône (près le renversement par les Américains du gouvernement du Dr Mossadegh). La police a fait feu sur les étudiants en grève, tuant trois d’entre eux. Depuis la commémoration de la mort de ces trois activistes n’a jamais cessé, tout en prenant des colorations différentes selon les époques : inspirées par l’exhalation de la prise d’otages du personnel de l’ambassade américaine, dans les années 1980 ;  puis par mouvement vert à la fin des années 2000 ou par les révoltes arabes en 2011… sans jamais se départir d’une profonde animosité à l’égard des États-Unis, vieille de plus d’un demi-siècle, mais cette année, 2022, le combat est tout entier dirigé contre le régime des mollahs. En dépit de la répression et du nombre de morts parmi les manifestants, la peur a véritablement changé de camp.

Mise à jour 8 décembre 2022 : La sœur de l’ayatollah Ali Khamenei, Badri Hosseini Khamenei a offert son soutien aux manifestants. « Le peuple iranien mérite la liberté et la prospérité, et son soulèvement est légitime et nécessaire pour faire valoir ses droits », a-t-elle affirmé. Les étudiants ont également reçu le soutien de l’ancien président iranien, Mohammad Khatami a exprimé son soutient particulièrement au slogan « Femmes, vie, liberté ». « Un beau message » selon lui « qui montre un mouvement vers un avenir meilleur ».

Le régime n’est pas tombé ce 7 décembre, mais la révolte qui a débutée le 14 septembre avec la mort de Jina Mahsa Amini, de poursuit. Ces trois jours de grève lui ont donné un second souffle…

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 6 décembre 2022

 

manifestation de rue novembre 2022

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contestation étudiante en 2019

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