L’Almanach international
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21 mai : le jour de deuil circassien, en mémoire d’un génocide perpétré par les Russes
Ce Jour de deuil a été institué en souvenir du jour où la Russie a proclamé sa victoire définitive sur la Circassie détruite, le 21 mai 1864. Cette commémoration du génocide circasien, aujourd’hui interdite en Russie, se déroule principalement dans la diaspora.
La Circassie est une colonie russe située dans le nord du Caucase, une région que les Russes ont conquis après un siècle de guerre et de massacres. L’invasion russe a commencé en 1763 et ne s’est achevée qu’un siècle plus tard par un défilé de la victoire de l’armée du tsar le 21 mai 1864, à Krasnaya Polyana, non loin de Sotchi. Ce fut la guerre la plus longue que la Russie n’ait jamais menée.
La stratégie de l’Empire russe pour s’imposer dans le nord du Caucase était pleinement génocidaire. Elle consistait à massacrer systématiquement des civils afin de les terroriser ou de les pousser à l’exil. En un siècle, 1 500 000 Circassiens (soit 90% de la population totale !) ont été tués ou expulsés vers l'Empire ottoman, où vit aujourd’hui la majeure partie de la diaspora circasienne.
Les quelques Circadiens demeurés sur leurs terres, ont été séparés par les Russes en quatre sous-groupes : Kabardiens, Tcherkesses, Adyghéens et Chapsoughs, selon la logique du “diviser pour mieux régner”. C’était aussi une manière de gommer l’identité circasienne qui n’a plus droit de cité en Russie. Moscou a ensuite créé sur ce qui était jadis la Circassie, trois républiques “autonomes” : les républiques d'Adyguée, de Kabardino-Balkarie et de Karachay-Tcherkessie, où les Circassiens constituent la majeure partie de la population, descendant des quelques rescapés du génocide.
En 1990, quand l’emprise russe s’est provisoirement desserrée, un Jour de deuil circassien (Шъыгъо-шӏэжъ маф) a été institué en souvenir du jour où la Russie a proclamé sa victoire définitive sur la Circassie détruite et endeuillée. Chaque 21 mai, jour férié et chômé local, des rassemblements, des processions et dépôts de couronnes de fluets ont eu lieu dans les quatre républiques circadiennes jusqu’en 2021. Aujourd’hui, c’est surtout dans la diaspora, en Turquie, en Jordanie, en Syrie, aux États-Unis, en Allemagne…
Depuis le début de l'année 2022, les autorités russes s'emploient systématiquement à annuler les événements commémoratifs et festifs circassiens. Sous des prétextes farfelus, ils ont interdit la célébration du jour du drapeau circassien, puis ont prohibé la procession devenue traditionnelle en l'honneur du jour de deuil du 21 mai.
En Russie, ce génocide a été soumis à un révisionnisme historique ancien, ce qui explique qu’en Occident on connaisse si mal ce drame du Nord Caucase, par rapport à celui des Arméniens au début du siècle suivant. Aujourd’hui, les responsables de l'État russe vont jusqu'à affirmer que le conflit "n'a jamais eu lieu" et que la Circassie "a volontairement rejoint la Russie au XVIe siècle".
Il n’est pas encore question en Russie de discours décolonial. Au XXIe siècle, la question des colonies vue de Moscou se règle encore par des massacres, les Tchétchènes en ont fait les frais (300 000 morts sous Poutine, soit 30% de ce peuple), aujourd’hui, c’est au tour de l’Ukraine d’affronter la volonté russe de dominer et de détruire à la moindre résistance…
Le 21 mai est la date de la bataille de Qbaada (аибашьра) considérée comme la dernière bataille de la guerre du Caucase. Elle s’est terminée le 21 mai du calendrier julien (soit le 2 juin du grégorien) mais les Circadiens ont retenu cette date pour exprimer leur deuil dans le calendrier actuel. La bataille a opposé l'armée circassienne de 20 000 hommes et femmes, composée de villageois et de milices locales ainsi que de cavaliers tribaux, à une armée russe de 100 000 hommes, composée de cavaliers cosaques et russes, d'infanterie et d'artillerie. Les forces russes avancèrent de quatre côtés. Les forces circassiennes ont tenté de briser la ligne, mais beaucoup ont été touchées par l'artillerie et l'infanterie russes avant même de parvenir à atteindre le front. Les combattants restants furent bientôt vaincus. L'armée russe a commencé à célébrer la victoire sur les cadavres et un défilé militaro-religieux a eu lieu, au cours duquel 100 guerriers circassiens ont été publiquement exécutés. L'armée russe a ensuite continué à attaquer et à incendier les villages circassiens, détruisant les champs pour empêcher le retour, abattant les arbres et chassant les gens vers la côte de la mer Noire.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 21 mai 2024
21 mai : la journée des Afro-Colombiens
La Journée de l'Afro-Colombianité a été instaurée en 2001 pour célébrer les 150 ans de l'abolition de l'esclavage en Colombie en 1851. Elle permet aussi la mise en valeur d’une culture palenquo-antillaise qui marque profondément certaines régions de Colombie.
La Journée de l'Afro-Colombianité (Día de la Afrocolombianidad) a été instaurée en 2001 pour célébrer les 150 ans de l'abolition de l'esclavage en Colombie, décrété par la loi 21 du 21 mai 1851 par le président José Hilario López.
On l’oublie souvent, la Colombie est un pays multiculturel et l’une des composantes de sa population vient d’Afrique : au moins 10% de sa population aurait des racines héritées du continent noir, et même beaucoup plus selon certaines estimations. Elle est le produit de la traite massive d’esclave à partir de 1518, année de l’arrivée du premier galion chargé d’esclaves africain dans le port de Carthagène.
C'est aussi un hommage à tous ceux qui ont combattu pour la liberté, comme Benkos Biohó, un esclave qui s'est rebellé contre les Espagnols et qui est le fondateur de la première ville libre d'Amérique : San Basilio de Palenque. Un autre personnage historique est aussi mis à l’honneur : Juan José Nieto Gil, le premier romancier colombien qui est aussi l’unique président noir du pays. Élu en janvier 1851, il avait été renversé par un coup d’État militaire en juillet de la même année et son portrait ne figure pas dans la galerie des présidents de la Casa Nariño, la présidence de la république. Son roman, Yngermina, ou la fille de Calamar, passe pour être le premier de l’histoire littéraire du pays. L’avocate et ex-sénatrice Piedad Cordoba ou la championne olympique Maria Isabel Urruttia, ex-ministre des Sports, symbolise aujourd’hui la pleine intégration de Noirs dans la vie politique colombienne, même si une majorité d’entre eux souffrent toujours d’une certaine marginalité.
Il a fallu attendre la constitution de 1991 pour qu’une reconnaissance culturelle compensatrice soit accordée aux Afro-colombiens comme la propriété collective du sol pour les communautés vivant sur le littoral du Pacifique.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde
21 mai : le Monténégro fête ses 15 ans d'indépendance
Le 21 mai est l’une des deux fêtes nationales du Monténégro. C’est le Jour de l’indépendance (Dan nezavisnosti Crne Gore) obtenue en 2006 par référendum.
Le 21 mai est l’autre fête nationale du Monténégro, avec le 13 juillet, date de sa reconnaissance en 1878. Il y a 15 ans, le 21 mai 2006, 55,5% des Monténégrins votaient oui au référendum d’indépendance, soit une grosse moitié des électeurs. Une validation obtenue de justesse car le seuil exigé avait été fixé à 55%.
Les autres n’étaient pas partisans de faire disparaître la Yougoslavie, où ce qu’il en restait (la Serbie, le Monténégro, le Kosovo et la Voïvodine) car la fédération avait déjà perdu la moitié de ses membres. Les uns étaient nostalgiques de la grande Yougoslavie, ce pays qui comptait dans le monde ; les autres se considéraient comme serbe et donc ne voulaient être séparés de la mère patrie, en dépit des errements aux cours des années qui ont précédé. Dans la soirée du 3 juin 2006, le Parlement du Monténégro proclame donc officiellement l’indépendance du pays et la dissolution de la communauté de Serbie-et-Monténégro, le nom que portait au final le dernier avatar de la Yougoslavie. Le pays sera très vite reconnu par la communauté internationale et entrera à l’ONU, le 28 juin 2006. Dernier pied de nez, involontaire, à la Serbie dont le 28 juin est la date sacrée des nationalistes.
Milo Đukanović, le père de l’indépendance, qui dirigeait le pays depuis 30 ans, dont le gouvernement, très corrompu et peu démocrate, mais qui a œuvré à rapprocher le Monténégro de l’Occident a fini par être balayé par une coalition menée par Zdravko Krivokapić, pro russe, pro-serbe et surtout proche de l’église orthodoxe serbe alors que l’ancien gouvernement avait encouragé la création d’une église orthodoxe nationale, non reconnues par les autres branches de l’orthodoxie. Milo Đukanović reste président, mais pour la première fois depuis 1990 doit cohabiter avec un gouvernement d’opposition. Il n’est pas sûr que la date du 21 mai, le Jour de l’indépendance (Dan nezavisnosti Crne Gore) soit célébrée comme elle l’était jusque-là.
21 mai : les Anastenaria, un rituel de marche sur le feu dans les Balkans
Au nord de la Grèce et au sud de la Bulgarie, dans quelques villages, se pratique à l’occasion de la fête de la Saint-Constantin et de la Sainte-Hélène, des festivités dont l’aspect le plus marquant sont les marches pieds nus sur le feu.
C’est un rite particulier que l’on ne rencontre qu’au nord de la Grèce et au sud de la Bulgarie dans une poignée de villages et qui se pratique à l’occasion de la Saint-Constantin et de la Sainte-Hélène, deux saints que les orthodoxes fêtent le 21 mai.
Durant les trois jours des Anastenaria (ou Anastenarides), les fidèles des deux saints vont se livrer à un rituel qui a commencé hier soir par la présentation des deux icônes qui ont quitté l’église pour le konaki, un sanctuaire tout spécialement aménagé pour l’occasion et couvert d’ex-voto. Aujourd’hui, dans la matinée, un taureau, orné de fleurs, est sacrifié et la viande crue est distribuée aux familles de chaque village, vestige lointain d’un culte à Dionysos. Trois airs de musique, lancinants, au son de la lyre et du tambour, accompagnent chacune des cérémonies jusqu’au point fort de cette fête, au cours duquel les fidèles, en transe, marchent pieds nus sur des charbons ardents, qui se déroule après la tombée de la nuit.
Cette coutume, ancienne, était pratiquée autrefois en Thrace orientale et elle s’est transplantée en Macédoine avec les réfugiés grecs de 1923. Cette année-là, la Grèce et la Turquie procédèrent à des échanges massifs de population. Près d’un million de Grecs durent quitter le territoire de ce qui allait devenir la Turquie. Certains furent implantés en Macédoine grecque dans des villages libérés des Turcs qui, eux, ont été par expulsés vers la Turquie. Si les Anastenaria témoignent d’une ferveur toute chrétienne (orthodoxe), il semble évident de retrouver dans ce rituel les vestiges d’un ancien culte païen, une cérémonie orgiaque christianisée.
Les Anastenaria (Αναστενάρια, Нестинарство ou Nestinarstvo ) ont été inscrites en 2009 sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO. Chaque année, ce rituel se déroule du 21 au 23 mai.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 20 mai 2020