L’Almanach international
Parce que chaque jour est important quelque part dans le monde
18 octobre : il y a 95 ans les Canadiennes devenaient des « personnes »
Le 18 octobre 1929, la plus haute cour d'appel du Canada reconnaissait que les femmes était bien des personnes au sens de la loi et leur accordait le droit d'être nommées au Sénat… L’anniversaire de cette décision est célébré chaque année.
Le 18 octobre, au Canada, c’est la Journée de l’affaire « personne ».
On remet aujourd’hui à Ottawa, le Prix du Gouverneur général à cinq femmes de nationalité canadienne, âgées de plus de 30 ans (il existe aussi un Prix jeunesse pour les 15 à 30 ans), ayant, par leur détermination et leur courage fait faire des progrès importants en matière d’égalité des sexes dans leur lieu de vie, de travail. Ce prix a été institué en 1979 à l’occasion du cinquantenaire de l’affaire « Personne », un combat qui a véritablement changé le cours de l’histoire des femmes au Canada.
C’est le refus, par trois premiers ministres successifs, de voir une femme accéder au Sénat sous prétexte que les femmes ne sont pas des « personnes ayant les qualités requises » au sens de la constitution du Canada qui est à l’origine de cette révolution. Il faudra la détermination de la principale intéressée, Emily Murphy, et de quatre soutiens influents : Henrietta Muir Edwards, louise McKinney, Nellie McLung et Irene Parlby pour obtenir gain de cause devant le plus haut tribunal de l’Empire britannique, en 1929, après huit années de lutte acharnée.
Tout a commencé en Alberta, où la décision d’une juge était contestée par un avocat. Les autorités de l’Alberta ont confirmé la juge dans ses fonctions. Les cinq femmes citées plus haut ont alors exhorté la Cour suprême du Canada à donner suite au précédent établi en Alberta. Le 24 avril 1928, la Cour rend une décision contraire à celle de la province, établissant que les femmes ne sont pas des personnes au sens juridique. Tenaces, les cinq femmes portent leur cas directement devant le Conseil privé britannique, outrepassant ainsi les pouvoirs juridiques canadiens. La Grande Bretagne infirmera la décision du Canada le 18 octobre 1929, affirmant, une fois pour toutes, que les femmes sont bien des personnes au sens de la loi.
Ce jour-là, en effet, le plus haut tribunal d’appel du Canada a rendu une décision historique : les femmes seraient incluses dans la définition du mot « personne » au sens de la loi. C’est ainsi que les femmes ont obtenu le droit de siéger au Sénat, ce qui a mené à une participation féminine grandissante à la vie publique et politique.
L’action de ces cinq pionnières ( les “Célèbres cinq”, Famous Five) ouvrira la voie à la participation des femmes à tous les aspects de la vie publique au Canada, sur un pied d’égalité avec les hommes. Cela dit, si Emily Murphy fut une pionnière des droits politiques des citoyennes anglaises du Canada, elle a toujours milité pour que les femmes autochtones (celles des premières nations) et les immigrantes en soit excluent. Ce qui lui vaut aujourd’hui, à juste titre, d’être traitée de raciste et de voir ses statues vandalisées. Elle avait, entre autres, appuyé publiquement des politiques eugénistes, dont celles menant à l’adoption, en 1928, de la loi sur la stérilisation sexuelle, qui permettait à des médecins de stériliser sans leur consentement des personnes considérées comme déficientes mentales. En vigueur jusqu’en 1972, cette loi a été dirigée de manière disproportionnée contre les femmes autochtones et celles de classes pauvres.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 18 octobre 2024
8 mars : la Journée internationale des droits des femmes
L’idée de célébrer une Journée internationale de la femme est à la fois féministe et socialiste. Reconnue par l’ONU en 1977, c’est une journée internationale qui permet d'évoquer les acquis des femmes mais également de prendre la mesure des défis qui restent à affronter et de rappeler que l'amélioration des droits des femmes, leur participation à la vie politique et économique et l'égalité entre les sexes est un enjeu de société global qui nécessite la mobilisation et la contribution de toutes et tous.
L’idée de cette Journée internationale des femmes est à la fois féministe et socialiste. Elle aurait été proposée en 1910 par la journaliste féministe allemande Clara Zelkin lors de 2e conférence de l’internationnale des femmes à Copenhague. Mais déjà en 1909, le Parti socialiste américain avait pris l’initiative d’un Woman’s Day qui s’est déroulé le 28 février dans les seuls États-Unis. C’est le 19 mars 1911, que cette journée est devenue vraiment internationale : plus d’un million de femmes manifestaient dans divers pays. Dans les années qui suivent une Journée internationale des femmes est donc organisée un dimanche de la fin février ou de début mars.
La date du 8 mars a été choisie en 1921 par Lénine en souvenir des femmes de Saint-Pétersbourg qui avaient profité, en 1917, de la Journée internationale des femmes (le 8 mars du calendrier grégorien) pour manifester contre la vie chère et leurs conditions de travail. Ce mouvement de protestation allait aboutir à la chute du tsar une semaine plus tard. Cette journée fut donc la première de la Révolution russe. À l’époque, la Russie vivait encore au rythme du calendrier julien si bien que localement, on était le 23 février. Par un curieux cheminement de l’histoire, cette date de l’ancien calendrier russe est devenue en Russie la Journée de... l’homme, en particulier celle des militaires (voir le 23 février).
Cette fête du 8 mars est donc très liée à l’ancien monde communiste. Elle est devenue une commémoration obligatoire à partir de 1946 dans tous les pays qui deviennent des satellites de l’URSS. Si bien que la Tchéquie l’abolira en 2008 comme un mauvais souvenir d’une époque révolue.
La dimension féministe de la Journée de la femme a resurgi en Occident dans les années 1970 et son caractère international a été renforcé par son adoption par l’ONU comme une commémoration officielle en 1977. La France a fait de même après l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981, sans pour autant en faire un jour férié comme c’était le cas dans les très conservatrices républiques soviétiques, qui l’avait transformé en fête des mères, ou dans certains pays d’Afrique... En Chine ou au Népal, on accorde qu’une demi-journée chômée aux salariées, seulement aux femmes.
À l’heure où la célébration est devenue mondiale et où la dimension partisane a disparu (en même temps que le monde communiste), certaines voix s’élèvent pour se demander si cette journée a bien lieu d’être, si elle ne produit pas l’effet inverse du but recherché tant le 8 mars est l’occasion de débiter des discours truffés de stéréotypes qui desservent la cause des femmes. Pour d’autres, cette journée est loin d’être un gadget politique, c’est l’occasion de rappeler à l’opinion publique qu’un siècle de combat politique n’a pas effacé les inégalités (tant dans le monde du travail que dans la politique), ni les violences faites aux femmes.
La Journée internationale des femmes (selon l'appellation officielle de l'ONU), est également appelée Journée internationale des droits des femmes dans certains pays comme la France (depuis 1982).
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 7 mars 2024
14 novembre : la Journée des femmes colombiennes
Les Colombiens célèbrent Policarpa Salavarrieta, héroïne de la lutte contre les Espagnols, fusillée à Bogota en 1817. Ce jour est commémoré comme la Journée des femmes colombiennes.
Les Colombiens célèbrent Policarpa Salavarrieta, héroïne de la lutte contre les Espagnols, fusillée à Bogota en 1817. Ce jour est chaque année commémoré comme la Journée des femmes colombiennes (Día de la Mujer Colombiana).
Policarpa Salavarrieta était une femme intelligente et courageuse qui s'est battue, au début du XIXe siècle, contre la couronne espagnole soutenant la cause de l'indépendance du peuple. La Pola, comme on l'appelait, a été exécuté par le Conseil de guerre lors de la reconquête espagnole, le 14 novembre 1817 à Bogotá, aux côtés de Alejo Sabaraín et d'autres patriotes.
L’exécution a été fixée à 9 heures du matin sur la plaza mayor (l’actuelle plaza de Bolivar) de Santa Fe de Bogotá.
Tout au long du trajet la menant à son exécution, elle refuse de réciter les prières proposées par les religieux et maudit les Espagnols dont elle prédit la défaite à l’issue de la révolution.
Sur l’échafaud, elle demande de mourir à genoux, une position plus digne pour une femme et elle prononce une phrase qui est restée à jamais dans la mémoire du peuple colombien :
« ¡ Pueblo indolente ! ¡ Cuán distinta sería hoy vuestra suerte si conocierais el precio de la libertad ! Pero no es tarde. Ved que, mujer y joven, me sobra valor para sufrir la muerte y mil muertes más. ¡ No olvidéis este ejemplo ! »
(« Peuple indolent ! Quelle serait votre chance aujourd’hui si vous connaissiez le prix de la liberté ! Mais il n’est pas trop tard. Voyez que, femme et jeune, je peux endurer la mort et mille morts de plus. N’oubliez pas cet exemple ! »).
La date du 14 novembre, comme Journée nationale des femmes a été choisie en 1967, lors du bicentenaire de l’exécution de la patriote.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 13 novembre 2019