L’Almanach international

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Judaisme, juifs, Shoah Bruno Teissier Judaisme, juifs, Shoah Bruno Teissier

22 décembre :  faut-il commémorer la Shoah en même temps que la destruction du temple de Jérusalem ?

Le 10 Tevet est un jour de jeûne mineur dans le calendrier hébraïque. Il commémore le début du siège de Jérusalem, par les Babyloniens, qui a finalement conduit à la destruction du Temple de Salomon mais les autorités religieuses israéliennes en ont aussi fait le jour du souvenir des victimes de la Shoah, une décision contestée.

 

Le dixième jour du mois hébreu de Tevet, qui tombe ce 22 décembre 2023, est un jour de jeûne mineur dans le calendrier hébraïque. Il commence à l'aube et se termine à la tombée de la nuit et commémore le début du siège babylonien de Jérusalem qui a finalement conduit à la destruction du Temple de Salomon le 9 du mois de Av.

Au VIe siècle avant J.-C., Jérusalem était la capitale de Juda, un petit royaume israélite, qui s’étendait jusqu’à Beersheba, et qui était situé au sud d’un autre royaume juif, celui d’Israël . Refusant de payer son tribut au puissant royaume de Babylone, Jérusalem a été assiégée en 597 av. J.-C. et une partie de ses élites ont été emmenées en Mésopotamie (actuel Irak). Mais voilà que le gouverneur mis en place par Nabuchodonosor II de Babylonie, se révolte. Ce dernier envoie alors l’un de ces généraux, Nebouzarradan, qui reprend la ville en 586 av. J.-C., la pille et détruit complètement le temple construit quatre siècles plus tôt par Salomon. En outre, la majeure partie de la population de Jérusalem est déportée à Babylone.

Par tradition, le jeûne du 10 Tevet (Assarah beTévet) ( עשרה בטבת ) commémore également d'autres calamités survenues tout au long de l'histoire du peuple juif les 8, 9 et 10 Tevet. C’est un 8 Tevet que Ptolémée a ordonné de traduire la Torah en grec, ce qui, selon les juifs, a ouvert la porte à toutes sortes d’interprétations jugées erronées. Enfin, deux personnages historiques importants, Esdras le Scribe et Néhémie, sont morts un 9 Tevet.

Le problème aux yeux de certains, c’est que le grand rabbinat d’Israël a proclamé, peu après l’indépendance d’Israël, le 10 Tevet « jour général du kaddish », c'est-à-dire le jour du souvenir des victimes de la Shoah dont le lieu et la date du décès sont pour la plupart inconnus. Les autorités religieuses préfèrent cette date plutôt que Yom HaShoah (le 27 Nissan), la Journée nationale du souvenir de la Shoah, instituée en 1951 par la Knesset (le parlement israélien). Elles estiment que commémorer la destruction des Juifs d’Europe à la date où les malheurs des Judéens commencent est un symbole d’espoir que ces malheurs s’achèvent.

Cette position ne fait pas du tout l’unanimité en Israël et dans la diaspora où on est très attaché à la journée de mémoire du 27 Nissan qui est aussi un hommage aux combattants du ghetto de Varsovie. Les détracteurs font remarquer que ce jeûne du 10 Tevet est un acte de repentance pour les péchés qui ont entraîné la destruction de Jérusalem. Peut-on vraiment appliquer ce raisonnement à la Shoah ? Ce serait donner raison aux rares voix qui estiment que la Shoah est une punition de Dieu, notamment pour avoir lancé le mouvement sioniste avant le retour d’un messie comme l’ont affirmé certains religieux… Yom HaShoah est une commémoration nationale particulièrement suivie, beaucoup regrettent qu’elle n’ait pas aussi une dimension religieuse.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 21 décembre 2023

 

La destruction du premier temps de Jérusalem (détail d’une gravure extraite de la Chronique de Nuremberg, 1483)

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1988, Palestine, Israël, 15 novembre Bruno Teissier 1988, Palestine, Israël, 15 novembre Bruno Teissier

15 novembre : l’anniversaire d’un État palestinien qui n’existe pas encore

Un jour férié, en Palestine, commémore la proclamation d’un État de Palestine avec pour capitale Jérusalem. C’était le 15 novembre 1988, à l’initiative du Conseil national palestinien. Cette année, la Journée de l’indépendance palestinienne est un événement totalement surréaliste, plus encore que les années précédentes, en raison du terrible conflit opposant Israéliens et Palestiniens depuis l’attaque terroriste du Hamas, le 7 octobre dernier qui a fait prendre conscience du caractère intenable de la configuration régionale.

 

Un jour férié, en Palestine, commémore la proclamation d’un État de Palestine avec pour capitale Jérusalem. C’était le 15 novembre 1988, à l’initiative du Conseil national palestinien. Cette année, la Journée de l’indépendance palestinienne (عيد الاستقلال الفلسطيني) est un événement totalement surréaliste, plus encore que les années précédentes, en raison du terrible conflit opposant Israéliens et Palestiniens depuis l’attaque terroriste du Hamas, le 7 octobre dernier qui a fait prendre conscience du caractère intenable de la configuration régionale.

Écrite par le poète palestinien Mahmoud Darwich, la proclamation d’indépendance de la Palestine a été prononcée par Yasser Arafat, président de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), à Alger, le 15 novembre 1988. L’événement était considérable pour tous ceux qui avaient lutté pendant 40 ans pour qu’une Palestine soit reconnue et indépendante. Implicitement, Arafat et l’OLP reconnaissaient l’État d’Israël et se résignaient à un partage de la Palestine historique.  En outre, l’OLP condamnait désormais le terrorisme. Cela aurait pu être un tournant majeur du conflit israélo-Palestinien. Le gouvernement israélien de Yitzhak Shamir (droite) rejette pourtant cette déclaration. Néanmoins, c’était l’époque où régnait encore un certain optimisme en Israël. En 1992, l’arrivée au pouvoir d’Yitzhak Rabin (travailliste) permit de nouer des contacts discrets avec l’OLP qui déboucheront sur accords d’Oslo, le 9 septembre 1993, lesquels reconnaissent le « droit d’Israël à une existence en paix et sécurité » en échange de la reconnaissance de l’OLP comme représentant légitime du peuple palestinien. Ces accords n’auront qu’un seul effet concret : la création de l’Autorité palestinienne, c’est-à-dire d’une esquisse de gouvernement palestinien, mais un gouvernement sans État et sans pouvoir réel.

Yitzhak Rabin sera assassiné par un militant juif d’extrême droite. La droite israélienne va arriver au pouvoir, remplacée, aujourd’hui, par l’extrême droite… Quant à l’État Palestine il est resté dans les limbes. Israël n’ayant jamais permis son existence. L’Autorité palestinienne, n’ayant autorité sur quasiment rien, est devenue une institution impopulaire et corrompue que les autorités israéliennes n’ont eu de cesse de rabaisser, notamment en favorisant un adversaire mortel, le Hamas. L’attaque terroriste du Hamas du 7 octobre 2023 et la guerre de destruction punitive lancée par le gouvernement Netanyahou ont anéanti tout espoir d’une émergence progressive d’un État palestinien.

D’un projet de partage à un autre, la Palestine auto administrée a diminué comme peau de chagrin. Elle se limite à quelques confettis de territoires, encerclés par des colonies juives et l’armée israélienne. L’Afrique du Sud au plus fort de l’apartheid, avait tenté d’accorder ce genre d’« indépendance » à une série de bantoustans qui sont restés des États fantoches jusqu’à l’explosion du système. C’est à cette construction, aujourd’hui disparue, que fait penser la Palestine, 35 ans après sa proclamation comme État. À présent, seul un fait politique majeur, comme l’évacuation complète des colons installés en Cisjordanie (occupée illégalement) et le retrait des forces armées qui les épaulent, ne permettra de faire enfin émerger un État Palestinien tel que le prône l’ONU et la presque totalité des pays qui y sont représentés.

Cette situation n’a pas empêché la reconnaissance de l’État de Palestine par 138 pays dans le monde. Les États qui n’ont, pour le moment, pas procédé à ce geste sont ceux de l’Europe occidentale (sauf Suède, Islande et Vatican), de l’Amérique du Nord, le Japon, la Corée du Sud, l’Australie… et Israël. La Palestine ne dispose que d’un siège d’observateur à l’ONU (seuls quatre pays ont voté contre : États-Unis, Canada, Hongrie et Israël). La Palestine a néanmoins été accueillie comme membre à part entière par l’UNESCO en 2011.

Le Parlement européen a voté en 2014 en faveur d’une reconnaissance d’un État palestinien en insistant sur le « principe la reconnaissance de l’État palestinien et la solution des deux États ». La Chambre des communes britannique avait avalisé une résolution similaire quelques jours plus tôt. L’Assemblée nationale française a voté en décembre 2014, une résolution qui « affirme l’urgente nécessité d’aboutir à un règlement définitif du conflit permettant l’établissement d’un État démocratique et souverain de Palestine », mais les gouvernements français et britanniques n’ont pas donné suite. Il en est de même pour l’exécutif européen.

L’État palestinien participe toutefois à des organisations internationales non gouvernementales, tels que le Comité international olympique (CIO) et le Comité international paralympique (CIP). Il est également membre de la Fifa, la Fédération internationale de football. 

Son pays n’existe pas encore, Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne, va néanmoins ce 15 novembre recevoir une multitude de messages de félicitations, notamment ceux de nombreux chefs d’État d’Afrique, du monde arabe, d’Amérique latine, d’Asie. Le « Sud global », bien au-delà du monde arabe, a fait de la défense cause palestienne un véritable marqueur politique pour opposer sa vision du monde à celle de l’Occident dont il dénonce la cécité et la mauvaise foi. Le monde se fracture dangereusement sur les ruines et les cadavres de la guerre de Gaza.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 14 novembre 2023

Mise à jour 2024 : L’Espagne, l’Irlande, la Norvège et la Slovénie ont annoncé en 2024, leur reconnaissance de l’État de Palestine. Celui-ci est désormais reconnu par 12 pays membres de l’Union européenne sur 27.

En 2024, 147 pays, soit plus de 75 % des 193 États membres de l’Organisation des Nations unies (ONU) ont pris cette décision. Cette année, la Palestine est en outre devenue un État membre de l'UNESCO, avec le soutien notamment de la France.

 
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Israël, Palestine, Iran Bruno Teissier Israël, Palestine, Iran Bruno Teissier

29 avril : la Journée de Jérusalem pour les défenseurs de la cause palestinienne

C’est l’imam Khomeiny, en 1979, qui a institué cette Journée d’al-Qods en réaction à la Journée de Jérusalem instituée célébrée par Israël, mais les mouvements de protestation anti israéliens partout dans le monde débouchent régulièrement sur des dérapages antisémites.

 

C’est l’imam Khomeiny, en 1979, qui a institué cette Journée al-Qods (du nom arabe de la ville) en réaction à la Journée de Jérusalem instituée en 1968 par Israël (fête nationale depuis 1998) pour célébrer la « réunification » de la ville (ou son « occupation totale » aux yeux des Palestiniens dont c’est aussi la capitale). 

Cette Journée de Jérusalem, placée le dernier vendredi du ramadan, est donc une journée de manifestation, non seulement en Iran, mais aussi dans les grandes villes du monde où vit une communauté arabe importante.C’est le cas notamment d’une vingtaine de villes américaine et des principales capitales européennes et de certaines capitales arabes, pas toute car une partie des pays arabes a aujourd’hui conclue une alliance avec Israël, contre l’Iran, et ne risquerait pas d’autoriser des manifestations qui pourrait déplaire à Tel Aviv. Dans les quartiers sud de Beyrouth, pro iranien, un grand festival est organisé ce jour-là.

Ces rassemblements lors de la Journée mondiale d’Al-Quds (روز جهانی قدس) sont toujours très mal vus en Israël et dans le monde juif, car les mouvements de protestation anti israéliens débouchent régulièrement sur des dérapages antisémites.

 

Journée Al-Qods à Téhéran

En Australie

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