L’Almanach international
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2 janvier : en Afrique du Sud, le second Nouvel An du Cap
Au Cap, on célèbre le 2 janvier, un second Jour de l’An lié à l’histoire de l’esclavage. Avec la fin de l’apartheid et des restrictions aux festivités organisées par les Noirs et les Métis, la fête a pris l’allure d’un véritable carnaval emblématique de la culture de la ville.
Les festivités liées au changement d’année, qui ont lieu au cœur de l’été austral, durent plusieurs jours au Cap, en Afrique du Sud. Depuis plus de deux siècles un Second Nouvel An (Tweede Nuwe Jaar) est célébré le 2 janvier. Avec la fin de l’apartheid et des restrictions aux festivités organisées par les Noirs et les Métis, la fête a pris l’allure d’un véritable carnaval emblématique de la culture de la ville, le Cape Town Minstrel Carnival qui cette année se terminera par la grande parade du 4 janvier 2025. De nombreuses rues du centre-ville seront fermées jusqu’au 5 janvier 2025 à minuit.
Ce second Nouvel An est un héritage de l’époque de l’esclavage (aboli en 1834) et d’une société ségrégationniste qui a persisté jusqu’en 1994. Les populations d’origine européenne célébraient la nouvelle année le 1er janvier avec une grande fête. Le lendemain, il était d’usage de laisser leur journée libre aux esclaves. Ces derniers avaient pris l’habitude de fêter leur propre Jour de l’An en organisant chaque 2 janvier, une fête très colorée, toute en musique. Les Blancs désignaient l’évènement comme le Coon Carnival (« Carnaval noir »), une appellation méprisante qui n’a plus court aujourd’hui pour le Cape Town Minstrel Carnival (« Carnaval des ménestrels du Cap »). À l’origine, la fête débutait dans le quartier malais de Signal Hill (Boo-Kaap) avec les chants des chœurs malais et des tambours ghoema. Peu à peu la fête s’est institutionnalisée, des troupes de chanteurs et musiciens (les klopses) de sont formées. Si bien que la fête est aussi connue familièrement sous le nom de Kaapse Klopse ou simplement de Klopse.
À l’époque de l’apartheid, les lois sur la circulation et sur les « rassemblements illégaux » étaient utilisées pour imposer des obstacles aux organisateurs du festival des ménestrels qui était cantonné à certains quartiers et finalement confiné au stade Athlone, celui qui était utilisé pour les spectateurs « non blancs ». Pas question à l’époque de traverser le District Six, celui d’où ont été expulsés 60 000 Coloureds en vue d’en faire un quartier réservé aux Blancs.
La fête a repris de son importance avec la chute de la dictature et l’abolition de l’apartheid en 1994. Elle débute l’après-midi du 1er janvier, les chorales malaises du Cap (nagtroepe) commencent leur parade qui se poursuit le 2 janvier et le samedi qui suit. Ensuite, la compétition entre troupes de ménestrels a lieu les cinq samedis de suite (cette année jusqu’au 1er février).
Des milliers de personnes en uniformes scintillants, le visage peint, des chapeaux et des ombrelles défilent dans les rues de la ville, jouant leur musique ghoema caractéristique sur des banjos, des trompettes et des tambours. Les troupes sont espacées de manière que chaque représentation se déroule séparément, ce qui permet aux spectateurs d'entendre chaque troupe. Chaque troupe a également sa propre structure, avec des membres non-instrumentistes appelés voorlopertjies qui ouvrent la voie avec des mouvements de danse extravagants tandis que le groupe fournit la bande sonore de fond.
La parade attire chaque année une foule de 80 000 à 100 000 spectateurs, désireux de découvrir plus de 18 troupes de ménestrels et 20 000 artistes. Elle commencera sur Hanover Street au cœur du District Six, les équipes étant déposées près de Russell Street. Le cortège officiel débutera à Sir Lowry Road et Hanover Street. Après la prière du jeudi (midi), la première troupe lancera les festivités à 13h15. Ce 4 janvier 2025, les 20 troupes défileront sur l'ensemble du parcours, en commençant par Darling Street, en passant par le Hollywoodbets Purple Mile et en continuant sur Adderley Street. Le défilé remontera ensuite Wale Street, passera devant les jardins de la Compagnie et traversera Buitengracht Street avant d'entrer dans le quartier historique de Bo-Kaap (Schotsche Kloof). Le parcours se terminera sur Rose Street.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 1er janvier 2025
Kaapse Klopse défilant à Cape Town, le 2 janvier 2017 (photo Olga Ernst)
2 janvier : la caravane de la liberté, pèlerinage castriste à Cuba
À Cuba, on fête le Jour de la Victoire, anniversaire du jour de 1959 où les forces de Fidel Castro ont pris Santiago de Cuba En hommage à cette génération qui a triomphé, des jeunes de tout le pays empruntent la même route chaque mois de janvier, jusqu’à Pinar del Río.
Hier, 1er janvier, le régime cubain a célébré le Triomphe de la Révolution (ou Jour de Libération), qui rappelle le jour où le dictateur Fulgensio Batista a fui le pays. Aujourd’hui, 2 janvier, on fête le Jour de la Victoire (Día de la Victoria), anniversaire du jour de 1959 où les forces de Fidel Castro ont pris Santiago de Cuba et les forces de Camilo Cienfuegos ainsi que de Che Guevara sont entrées dans La Havane. Ces deux jours sont fériés et chômés à Cuba. Ils sont marqués par des défilés militaires, des feux d'artifice.
Chaque 2 janvier, des jeunes cubains empruntent le même itinéraire. Les véhicules qui transportaient les hommes barbus ont commencé leur voyage à Santiago de Cuba le 2 janvier 1959, parcourant toutes les provinces du pays jusqu'à leur arrivée à Pinar del Río le 17 janvier. En hommage à cette génération qui a triomphé, des jeunes de tout le pays empruntent la même route chaque mois de janvier, la Route de la liberté (la Ruta de la liberta). L’itinéraire par l'ancienne caserne Moncada, aujourd'hui aujourd’hui transformée en école, Ciudad Escolar 26 de Julio. Elle fut la première forteresse militaire transformée en école par le gouvernement révolutionnaire.
L'itinéraire de plus de mille kilomètres suivi par l'Armée rebelle et dirigé par Fidel est réédité chaque mois de janvier, traverse Granma, Holguín, Camagüey, Ciego de Ávila, Villa Clara, Cienfuegos, Matanzas, pour atteindre La Havane le 8 janvier, où des festivités sont prévues. La Caravane de la Liberté poursuivra ensuite sa route jusqu’à Pinar del Río, la province la plus occidentale de l’île. Le régime cubain n’en finit pas de cultiver la mémoire de ses fondateurs.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 1er janvier 2024
2 janvier : la Toma de Granada, la fête locale qui divise l’Espagne
Ce 2 janvier, pour la 530e fois, la municipalité de Grenade (Espagne) commémore la conquête de la cité andalouse par les souverains d’Aragon et de Castille. Chaque année, la gauche locale dénonce cette cérémonie aux relents racistes et appelle à manifester contre ce qui est devenu une célébration rassemblant toute l’extrême droite espagnole.
Ce jour est férié à Grenade, en Espagne, pour la 530e Fête de la prise de la ville (Festividad de la Toma de Granada). Chaque année, la municipalité de Grenade commémore la conquête de la cité andalouse par les souverains d’Aragon et de Castille. La reddition de la ville a abouti à l’expulsion d’une partie de ses habitants et à l’éradication de leur culture. Comme tous les ans, la gauche locale a appelé à manifester Plaza del Carmen où se déroule la cérémonie.
Cette cérémonie controversée commence, chaque année, par un dépôt de gerbes sur les tombes de Ferdinand d’Aragon et d’Isabelle de Castille qui reposent dans la Chapelle royale. La ville de Grenade, assiégée depuis le 9 juin 1491, n’a pas été prise par les armes, mais livrée aux Espagnols par le dernier émir de Grenade, Boabdil. Celui-ci, après négociations, a quitté la ville le 2 janvier 1492 contre l’engagement des futurs Rois catholiques de respecter les différents cultes. Cette promesse ne fut jamais tenue, puisque dans les semaines qui ont suivi les musulmans et les juifs n’ont eu d’autres choix que la conversion ou l’exil. S’en était fini de l’Espagne des trois religions évoquée jusque-là par Ferdinand II lui-même, l’Inquisition allait désormais avoir le champ libre. Le souvenir de cette trahison plane sur cette fête traditionnelle que l’extrême droite est en train de transformer en célébration identitaire. Vox, le parti néo-franquiste, a fait son entrée au parlement andalou en 2019, une première depuis le retour à la démocratie en 1976. Il milite aujourd’hui pour que le 2 janvier devienne la fête nationale de l’Andalousie en remplacement du 28 février, peu évocateur ; voire la fête nationale de l’Espagne tout entière. Déjà, la date du 2 janvier se substitue progressivement au 18 juillet, la journée où les nostalgiques du dictateur Franco célèbrent sa conquête du pouvoir, par les armes, en 1936. Les slogans n’évoquent plus Franco, mais une « nueva reconquista».
La cérémonie commence Plaza del Carmen, vers 10h30. Les autorités municipale se rendent ensuite à La Chapelle royale à 11h30, puis assiste à une messe dans la cathédrale à 12h. Après la messe est prévu un défilé militaire de la Légion espagnole. La ville est quadrillée par 500 policiers anti-émeutes pour séparer les militants de l’extrême droite espagnole qui ont fait de cette date l’un de leurs rendez-vous annuels, du reste de la foule qui écoute le plus jeune conseiller municipal crier trois fois « Grenade ! », au son de l’hymne national, après avoir rendu hommage aux Rois très catholiques. En 2009, la municipalité (socialiste) avait invité des musulmans, habillés en costume d’époque, à se joindre au cortège, mais ce symbole n’a pas convaincu les associations espagnoles qui militent pour le rapprochement des trois cultures. Le nouveau maire centriste droit (cuidadanos), élu avec les voix des conservateurs (PP) et de l’extrême droite (Vox) se montre beaucoup moins audacieux. De fait, une manifestation alternative est organisée par la gauche (un défilé de Maures et de chrétiens en costume d’époque) à l’initiative des municipalités voisines de Zujan, Cullar et Benamaurel. La procession abouti à l’ermitage Saint-Sébastien, lieu de la dernière rencontre entre Baobdil et les Rois très catholiques.
Les détracteurs de cette fête régionale sont chaque année plus nombreux. Ils parlent d’un hommage rendu aux bourreaux et de l’oubli des victimes. Cette « Journée de la ville de Grenade » se termine néanmoins par un Festival des cultures où l’accent est mis sur la tolérance. À la suite du rétablissement de la liberté de culte, en… 1978, Grenade avait été, cette année-là, la première ville d’Espagne à inaugurer officiellement une mosquée.
S’il s’agit de trouver une autre date pour la Journée de l’Andalousie, la gauche et les libéraux proposent le 26 mai, en hommage à Mariana Pineda, native de Grenade, exécutée le 26 mai 1831 pour son militantisme en faveur des libertés. Cette célébration du 26 mai a été toutefois ravivée en 2022 après 86 ans d’interruption.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 1er janvier 2023
mise à jour 2024 : le PSOE (gauche) qui dirige la mairie a voté contre la célébration en tant que telle, mais est il est tout de même présent à la cérémonie prise en charge par le PP (droite) et Vox (extrême droite) qui dirigent le gouvernement andalou.
Pour faire contre-point à la commémoration de la conquête de Grenade, la plateforme Granada Abierta réunit des intellectuels et des artistes à la Fondation euro-arabe, à partir de 11 heures du matin, sous la devise « Pour la coexistence, pas pour la prise de pouvoir » afin de souligner une fois de plus leur rejet de cet événement. Cette réunion rend aussi un hommage au peintre Juan Antonio Díaz, promoteur de l’association Artistes pour la tolérance.
Le drapeau du royaume d’Espagne (rouge et jaune) associé à celui de Vox (vert) et à celui de la Phalange espagnole (en noir) brandi par les nostalgiques du franquisme.
Le drapeau de l’Andalousie (vert et blanc) et celui de la république d’Espagne (rouge-jaune-mauve), symbole de la gauche
2 janvier : Berchtoldstag, un carnaval païen de la Suisse alémanique
Berchtoldstag, ce jour férié de la Suisse alémanique, est célébré avec des défilés de masques qui prennent des allures de carnaval.
Le 2 janvier est férié dans 14 des 26 cantons suisses, il est chômé dans 7 d’entre eux, des cantons alémaniques principalement (Zurich, Soleure, Schaffhouse, Obwald, Lucerne, Glaris, Fribourg), où Berchtoldstag est particulièrement fêté. Le jour de Berchtold est célébré avec des défilés de masques qui prennent des allures de carnaval, des repas de fêtes dans des brasseries, des danses et des chants folkloriques. Les noix sont associées au Berchtoldstag, elles sont utilisées pour les jeux et consommées lors d'un « festin de noix ».
Officiellement, on fait remonter cette fête à un hommage à Berchtold V, duc de Zähringen. Selon la légende, en 1191, celui-ci fonda la ville de Berne et lui donna ce nom d'ours car c’était le premier animal qu'il venait de tuer à la chasse.
En réalité, c’est une fête totalement païenne germanique, antérieure au christianisme, qui est célébré par le Berchtoldstag. Les festivité font, en fait, référence à Berchta, la déesse celte de la végétation et de la fertilité. Celle-ci possède des noms différents selon les régions : Berchta, Perchta, Berta, Holda, Frau Holle. C’est la déesse de l’hiver. Dans le folklore bavarois, autrichien et suisse, on raconte que Perchta erre dans les campagnes durant l’hiver. Lorsqu’arrive la douzième nuit de la fête de Yule (21 décembre), elle entre dans les chaumières. Là, elle sait d’emblée si les enfants et les jeunes se sont bien conduits pendant l’année écoulée et s’ils ont bien travaillé. Si c’est le cas, elle leur offre une pièce d’argent. Cette sorte de sorcière rappelle la Befana des Italiens qui distribuera des cadeaux aux enfants dans la nuit du 5 janvier.
Selon les cantons et les dialectes, le « jour de Bertha » porte un nom différent : Berchtoldstag, Bechtelstag, Bechtle, Bechtelistag, Berchtelistag, Berchtelistag, Bärzelistag… Ce jour est également férié et chômé au Liechtenstein. Mais d’autres régions préfère fête Berchta le 6 janvier, comme la Befana, son homologue italienne qui surgit dans la nuit du 5 au 6.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, le 1er janvier 2022
Dans une rue de Bâle, un 2 janvier
2 janvier : le président haïtien invité à s'occuper de ses concitoyens plutôt que des héros de la nation
Haïti débute l’année avec deux jours fériés : le Jour de l’indépendance, le 1er janvier et la Journée des ancêtres et héros de l'Indépendance, ce 2 janvier, appelé aussi le Jour des Aïeux.
Haïti débute l’année avec deux jours fériés : le Jour de l’indépendance, le 1er janvier et la Journée des ancêtres et héros de l'Indépendance, ce 2 janvier, appelé aussi le Jour des Aïeux.
Le 1er janvier 1804, l’est de l'île de Saint-Domingue accédait à l’indépendance au terme d'une longue et meurtrière guerre de libération. L'ancienne colonie française devenait ainsi le premier État noir des temps modernes. Jean-Jacques Dessalines, Alexandre Pétion, Henri christophe, Capois la mort, Lamatinière, Charles B… et, bien sûr, Toussaint Louverture, sont autant de héros qui sont célébrés chaque 2 janvier.
Chaque année, le président de la république se rend au Musée du Panthéon National Haïtien (le Mupanah), inauguré en avril 1983 avec une cérémonie pour le retour en terre natale des « cendres » de Toussaint Louverture, précurseur de l’indépendance haïtienne. Le Mupanah dispose de deux salles d’exposition et conserve précieusement les restes de « pères de la Patrie » comme Jean-Jacques Dessalines, Henry Christophe et Alexandre Pétion. Ils sont morts et ont été enterrés, à l’époque, dans l’indifférence totale de la population. Ce musée-panthéon mis à l’honneur chaque 2 janvier est là pour réparer ces oublis.
Mais, ces héros reconnaîtraient-ils en l’actuel Haïti, le pays dont ils ont rêvé et pour lequel ils ont combattu ? Si le pays a été largement épargné par la covid-19, il demeurent gangréné par les gangs, les assassinats, les enlèvements, la corruption de ses élites. Jovenel Moïse, le président (mal) élu en 2016, n’a d’autre réponse au pays que ses réactions autoritaires.
Plutôt que de célébrer l’indépendance, puis les Aïeux, la population en colère a prévu de débuter l’année 2021 par une marche de protestation. Épisode d’un mouvement social puissant qui s’est déclenché en août 2018 et vise à provoque la démission du président.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 1er janvier 2021
Le président Jovenel Moïse au Mupanah, 2 janvier 2020