L’Almanach international
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20 novembre : le rendez-vous des nostalgiques du fascisme en Espagne
La journée du 20-N, pour 20 novembre, est l’anniversaires du décès de deux personnages controversés de l'histoire espagnole, José Antonio Primo de Rivera et Francisco Franco. C’est l’occasion pour tous les nostalgiques que compte le pays de manifester au mépris de la loi de 2022 qui interdit toute promotion du fascisme.
Commémorée par l’extrême droite espagnole, la journée du 20-N, pour 20 novembre, est l’anniversaires du décès de deux personnages controversés de l'histoire du pays, José Antonio Primo de Rivera et Francisco Franco. Le premier, fils de l’ex-dictateur Miguel Primo de Rivera, est le fondateur du parti fasciste la Phalange espagnole. Il a été fusillé le 20 novembre 1936 à Alicante après avoir été jugé par un tribunal de la deuxième république espagnole pour complot et rébellion. La guerre civile espagnole avait déjà commencé, suite au coup de force du général Franco, figure de l’extrême droite. Celui-là même qui imposera son pouvoir autoritaire à l’issue de la guerre d’Espagne, avec l’aide de la phalange et des nazis. Sa dictature ne se terminera que le 20 novembre 1975, jour de son décès. La date était déjà célébrée sous le régime franciste, comme le “Jour de la douleur”. D’ailleurs, on se demande si l’annonce du décès de Franco dont l’agonie a duré des semaines, n’a pas été repoussée de quelques heures pour coïncider avec cette date déjà mythique pour le monde fasciste.
Chaque 20 novembre, parfois la veille ou le lendemain, tout ce qui reste de nostalgiques du régime du général Franco ou de la phalange espagnole manifeste dans diverses villes du pays, en particulier à Alicante et à Madrid. À Madrid, comme le 20 novembre tombe en milieu de semaine, c’est dimanche 24 novembre à 12h, place d’Orient que les franquistes se rassembleront. C’est sur cette place que Franco avait fait sa dernière apparition publique, le 1er octobre 1975, avant d’entamer une longue agonie. Chaque année, des militants de gauche se mobilisent pour protester contre ces manifestations hors la loi. Longtemps ces manifestations ont été tolérées par les autorités, aujourd’hui, elles tombent sous le coup des lois mémorielles, en particulier celle de 2022 qui interdit toute promotion du fascisme et du franquisme, sa variante locale. Ce qui n’a pas dissuadé un certain nombre d’églises partout en Espagne, et même en France, d’annoncer des messes à la mémoire de ces deux héros de l’extrême droite espagnole. La Conférence des évêques espagnols est totalement muette sur le sujet, car divisée. On se souvient que l’Église catholique, avec l’armée, a été un des principaux soutiens du régime franquiste et une partie du clergé n’a toujours pas renié cet engagement en dépit d’une levée des tabous sur les crimes du franquisme et l’ouverture des fosses communes où reposent plus de 100 000 victimes.
Chaque année, le Mouvement catholique espagnol (MCE) appelle à un pèlerinage à la Vallée des morts (la Valle de los Caídos) d’où la dépouille de Franco a été retirée en 2019 mais où repose toujours José Antonio Primo de Rivera. Chaque année autour du 20 novembre, la Phalange organise sa traditionnelle Marche bleue en l’honneur de son héros, cette année elle aura lieu vendredi soir. Le bleu en référence à la division des volontaires espagnols, mieux connue sous le nom de Division bleue, qui a été la contribution de l'Espagne de Franco à l'armée allemande d' Hitler pendant la Seconde Guerre mondiale .
La date du 20 novembre demeure une date symbole pour l’extrême droite espagnole. Est-ce un hasard si le nationaliste basque Santiago Brouard a été assassiné le 20 novembre 1984, puis cinq ans plus tard, Jusu Muguruza, à nouveau un 20 novembre. En 1992, c’est une fusillade contre un groupe d’immigrés qui cause la mort de la dominicaine Lucrecia Pérez, encore un 20 novembre… L’an dernier, en 2023, le nouveau gouvernement d’Aragon, une coalition du Parti populaire (conservateur) et de Vox (extrême droite) qui a succédé aux socialistes, a choisi le 20 novembre pour engager une procédure d’abolition de la loi mémorielle d’Aragon, bannissant toute promotion du fascisme.
Chaque année se rejoue ce jour-là les affrontements politiques qui ont ensanglantés l’Espagne, il y a plus de 80 ans. Longtemps, les nostalgiques du fascisme sont restés discrets et très minoritaires. Depuis peu tout a changé, les tabous sont tombés aussi bien du côté des républicains qui osent évoquer les victimes et demander réparation, que du côté de l’extrême droite, aujourd’hui représenté par Vox, un parti qui en quelques années s’est imposé comme la quatrième force politique du pays.
#N20
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 19 novembre 2021