19 juillet : Aung San Suu Kyi sera-t-elle autorisée par la junte birmane à rendre hommage à son père assassiné il y a 74 ans ?
Le 19 juillet est chaque année une commémoration majeure en Birmanie. Les sirènes retentissent à travers tout le pays, celui-ci se fige à 10h37 précise. La tradition, interrompue sous le régime militaire avait été reprise depuis 2016.
Ce jour férié commémore l’assassinat de huit dirigeants du gouvernement intérimaire birman d'avant l'indépendance le 19 juillet 1947. Le processus d’indépendance était bien engagé (celle-ci sera obtenue le 3 janvier 1948). En avril 1947, des élections générales avaient eu lieu pour former l'assemblée constituante. Le 19 juillet 1947, plusieurs membres du gouvernement intérimaires tenaient une réunion du cabinet dans le bâtiment du Secrétariat à Rangoon. Au milieu de la réunion, un groupe de paramilitaires armés a fait irruption dans le Secrétariat et abattu huit ministres, dont le Premier ministre Aung Sun. Le seul à avoir survécu était le ministre des Finances Tin Tun. Dès 1948, le 19 juillet a été décrété férié sous le nom de Journée des martyrs (အာဇာနည်နေ့). Une journée fondatrice de la nation.
Aung Sun, est le père de Aung San Suu Kyi qui pendant des décennies a été l’égérie des opposants au régime militaire. La cérémonie du 19 juillet était la seule sortie publique de Aung San Suu Kyi pendant les années où elle était assignée à résidence et l’occasion pour l’opposition de se faire entendre. L’année 2016 avait marqué un tournant : le 19 juillet, le chef militaire, le général en chef Min Aung Hlaing, et son épouse étaient présents lorsque Daw Aung Suu Kyi avait offert des repas aux moines en souvenir de son père et de ses collègues, à son domicile de Rangoon. Il s'agissait de la première visite d'un chef militaire chez elle depuis que le général Saw Maung avait assisté à la veillée de sa mère, Daw Khin Kyi, en 1988.
Suite au coup d'État militaire du 1er février 2021, U Win Myint (le président) et Daw Aung San Suu Kyi ont été à nouveau arrêtés. Depuis, ils sont détenus dans un lieu inconnu à Naypyitaw (la nouvelle capitale). Aung San Suu Kyi qui est âgée de 77 ans, risque jusqu'à 75 ans de prison pour plusieurs chefs d'accusation. Les militaires vont-ils l’autoriser à participer aux cérémonies d’hommage à son père et à ses compagnons de lutte anti-coloniale ?
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde