12 janvier : Yennayer, le Nouvel an des Kabyles

 

Yennayer est fêté chaque année comme le nouvel an berbère. En Algérie, les Kabyles ont fini par obtenir un jour férié et chômé pour cette fête fixée le 12 janvier, même si certains mouvements chaoui, dans les Aurès préfèrent le fêter le 14 janvier. De leur côté, les Berbères marocains ont réclamé eux aussi un jour férié pour cette célébration, mais c’est la date du 13 janvier qui a été choisie, comme en Libye ou dans le Sud tunisien.

Là où il y a consensus, c’est que ce 12, 13 ou 14 janvier 2025, nous entrons dans l’année 2975 du calendrier amazing (berbère). Celui-ci est bien plus ancien que ceux des musulmans ou des chrétiens et il est également bien antérieur à l’arabisation du Maghreb. Ce calendrier débute en 950 av. J.-C., date de la victoire du roi berbère Chachnaq sur le pharaon Ramsès III. Chachnaq (sous le nom de Sheshonk 1er) est le fondateur de la 22e dynastie pharaonique d’Égypte.

Ce nouvel an berbère est appelé Yennayer (ⵢⴻⵏⴰⵢⴻⵔ), un mot dérivé de İanuarius (janvier en latin). Mais comme, en amazing,  ⵢⴰⵏ (yen) est l’une des formes possibles du chiffre un, le terme s’est imposé comme appellation du Jour de l’an berbère.

Comme beaucoup de fêtes de fin ou de début d’année, Yennayer était en lien avec le solstice d’hiver et les phénomènes naturels qui marquent le renouveau. La date du Yennayer est basée sur le calendrier julien qui avait cours dans l’Antiquité. Avec le temps, un décalage s’est produit avec le calendrier grégorien qui a été adopté à l’international, sauf par quelques Églises, comme celle de Russie qui célèbre le nouvel an le 14 janvier.

La date du 12 janvier, retenue par les associations culturelles kabyles repose, en fait, sur une erreur de conversion qui n’a jamais été corrigée. Au XIXe siècle, le décalage des deux calendrier n’était que de 12 jours. Qu’importe, cette date fait aujourd’hui partie du patrimoine et de l’identité algérienne. En 2017, Yennayer a fini par être  officiellement reconnu en Algérie comme « jour de fête nationale », chômée et payée. Un progrès, même s’il est encore interdit de manifester avec le drapeau berbère ! En Algérie, les autorités attachées à l’identité exclusivement arabo-musulmane du pays, ont longtemps ignoré et même rejeté, ces festivités. Cette fête du nouvel an, qui connaît aujourd’hui un net regain, est l’occasion pour une population qui se sent oubliée d’affirmer son amazighité, en Algérie, en France ou ailleurs. Chaque année, les islamistes lancent une campagne contre la célébration de Yennayer, déclarant cette fête illicite (haram)  ce qui  n’empêche pas cette fête de nouvel an d’être de plus en plus populaire.

« Qui célèbre yennayer éloigne le mauvais œil et les infortunes » dit un adage populaire. Aussi, ne manque-t-on pas de commencer les festivités en égorgeant un animal, généralement un coq fermier, histoire d’éloigner le malheur de la maison. Ce coq sera consommé la veille de Yennayer dans un plat unique lors d’un dîner (Imensi n’Yennayer) où la famille se retrouve au grand complet. On a pour habitude de laisser une ration et une cuillère pour l’absent quel qu’il soit, parent éloigné ou pauvre de passage. Le lendemain, on continuera à faire ripaille avec des plats traditionnels mais sans viande cette fois. S’ajoutent d’autres rites plus ou moins liés, eux aussi, à la fécondité ou à la prospérité, tel le fait de célébrer un mariage ce jour-là, de changer le mobilier de la maison pour accueillir d’heureuses nouvelles ou encore de planter des tiges de laurier-rose dans les champs de culture qui vont éloigner les parasites et garantir de bonnes récoltes.

Aseggas amimun, ameggaz, yeh’lan, ighudan, ifulkin…, Bonne année !

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 12 janvier 2025

 
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