L’Almanach international

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1923, Turquie, république, 29 octobre Bruno Teissier 1923, Turquie, république, 29 octobre Bruno Teissier

29 octobre : la république de Turquie fête son centenaire

Cela fait plusieurs années que Recep Tayyip Erdoğan prépare cet événement. La célébration de ce centenaire de la république turque a été un des enjeux de la dernière présidentielle, en mai dernier. Son ambition était d’être celui qui présiderait l’événement : annoncer « le siècle de la Turquie » (le slogan de ce 29-Octobre). Au début du XXe siècle, la Turquie a failli disparaître. Aujourd’hui, c’est un pays qui compte, même si c’est souvent pour le pire (dernièrement son soutien au Hamas). Erdogan à vendu à ses électeurs une Turquie puissance mondiale, c’est ce que les Turcs célèbrent chaque 29 octobre.

 

Cela fait plusieurs années que Recep Tayyip Erdoğan prépare cet événement. La célébration de ce centenaire de la république turque a été l’un des enjeux de la dernière présidentielle, en mai dernier. Son ambition était d’être celui qui présiderait l’événement : annoncer « le siècle de la Turquie » (le slogan de ce 29-Octobre), celui qui débute demain et fera de la Turquie une grande puissance.

Compte tenu de la situation internationale,  la célébration ne sera pas beaucoup plus spectaculaire que les autres 29-Octobre, car la date est célébrée chaque année comme Fête de la République (Cumhuriyet Bayrami). La plupart des festivités ont été annulées. Seuls subsistent les feux d’artifice à Istanbul, Ankara et Izmir, ainsi qu’un spectacle de drones Bayraktar sur le Bosphore, vitrine des succès technologiques de la Turquie. Ainsi que, ce soir à 19h, une marche aux flambeaux en l’honneur du centenaire de la République dans les rues d’Istanbul.

Les yeux du monde sont rivés sur Gaza, Recep Tayyip Erdoğan n’aura pas l’exposition médiatique qu’il espérait, malgrès sa prise de position en faveur du Hamas, tout en levant son veto à l’entrée de la Suède dans l’OTAN, afin de monter la puissance politique de la Turquie, un pays à cheval sur deux mondes. Après cette déclaration, les cérémonies du centenaire risquent d’être perçues comme la suite des manifestations de soutien au Hamas organisée par l’AKP, beaucoup plus que comme l’heure de gloire d’une puissance émergente.

Recep Tayyip Erdoğan, qui est au centre des commémorations, avait promis, en 2011,  que la Turquie figurerait parmi les dix premières puissances mondiales en termes de PIB. Le pays n’est aujourd’hui que le dix-neuvième. Et surtout, en termes de PIB par habitant, on est encore très loin du compte. La chute de la livre turque a provoqué un effondrement du pouvoir d’achat… voyant que sa “Vision 2023” ne serait pas atteint Erdoğan avoue à présent des horizons plus lointain :  2053 (anniversaire de la prise de Constantinople) ou encore 2071 (le millénaire de l’arrivée des Turcs en Anatolie).

Le 29-Octobre est un jour férié qui commémore la fondation de la république en 1923 sur les ruines de l’Empire ottoman. Cette république existait déjà depuis la convocation d’une Grande Assemblée en 1920 par le général Mustapha Kemal mais elle n’était pas reconnue par  le Sultan et les dirigeants ottomans. C’est la fin de la guerre, qui s’est conclue par une victoire turque, en 1922, et le traité de Lausanne qui lui est très favorable, en 1923, qui permettront à Mustafa Kémal, dit Ghazi » (le Victorieux), d’abolir le sultanat et de proclamer officiellement la république, le 29 octobre 1923. Il en est devenu le premier président. Plus tard, fort de son pouvoir absolu, il sera surnommé Atatürk.

Vainqueur des dernières présidentielles, Tayyip Erdogan est au pouvoir depuis 20 ans et le sera encore pour près de cinq ans. Son ambition est de s’imposer dans les mémoires comme l’autre leader, après Kemal, qui aura marqué la Turquie. Aujourd’hui, le pays est divisé, la moitié de la Turquie a voté pour lui, mais son parti l’AKP a perdu la majorité absolue. L’autre moitié le déteste vraiment. À ce jour, la deuxième force politique du pays n'est autre que le Parti républicain du peuple (CHP), le parti fondé par Mustafa Kemal lui-même, que Kemal Kilicdaroglu, le candidat malheureux à l'élection présidentielle de mai dernier, continue de diriger.

Les deux leaders charismatiques s’opposent sur bien des points. Mustafa Kemal a procédé à une occidentalisation et à une sécularisation à marche forcée de cette Turquie nouvellement fondée. En 1924, il a aboli le califat, l'autorité islamique de l'Empire ottoman et fait fermer les écoles coraniques, remplacées par des écoles républicaines. La charia est également abandonnée au profit du droit positif… La politique ismalo-conservatrice d’Erdogan est à l’opposé de celle de Kemal. Il a favorisé le voile des femmes, interdit par Atatürk, le budget du Diyanet, qui nomme les imams et gère les mosquées, a explosé sous ses gouvernements. Erdogan se voit en leader du monde islamique et cherche à se concilier les opinions publiques du monde arabes, d’où sa prise de position en faveur du Hamas, après l’attaque terroriste du 7 octobre. Il partage néanmoins avec Mustapha Kemal, une vision ethnique de la Turquie, la négation des minorités et celle du génocide arménien. Il partage surtout un souci de puissance. Le régime du 29 octobre 1923 est né d’une victoire militaire, celle de la guerre d’indépendance turque (1919-1922) menée par Mustafa Kemal contre les puissances alliées d’occupation et l’armée du sultan. En mai 2023, c’est avant tout un leader régional que les électeurs ont élu. Au début du XXe siècle, la Turquie a failli disparaître. Aujourd’hui, c’est un pays qui compte, même si c’est souvent pour le pire (Syrie, Haut-Karabagh, Libye, le Hamas, les Loup gris…). Erdogan à vendu à ses électeurs une Turquie puissance mondiale, c’est ce que les Turcs célèbrent chaque 29 octobre.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 
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1922, Grèce, Turquie, 9 septembre Bruno Teissier 1922, Grèce, Turquie, 9 septembre Bruno Teissier

9 septembre : il y a 100 ans, l'incendie de Smyrne / l'indépendance d'Izmir

Les familles de Grecs d'Asie mineure se souviennent de l'incendie de Smyrne en 1922 qui a fait quelques dizaines de milliers de morts… Les Turcs célèbrent, eux, la prise de la par l’armée turque.

 

Alors que les Turcs célèbre l’ “ indépendance » d’Izmir, les familles des Grecs d'Asie mineure se souviennent de l'incendie de Smyrne en 1922 qui a fait quelques dizaines de milliers de morts, pas seulement des Grecs, aussi des Arméniens et tant d’autres. Les rescapés ont dû quitter la ville en hâte se réfugiant sur les navires dépêchés par plusieurs pays européens lesquels ont assisté à la destruction de la ville sans intervenir. Seuls les Italiens se sont montrés un pays plus actifs dans les actions de sauvetage des populations. Aujourd'hui peuplée uniquement de Turcs, la cité est aujourd’hui connue sous le nom d'Izmir.

Le Jour de l'indépendance d'Izmir (İzmir Bağımsızlık Günü) est un jour du souvenir célébré en Turquie chaque 9 septembre. Il commémore la libération de Smyrne (Izmir) de l'occupation grecque par Mustafa Kemal Atatürk en 1922. L’armée grecque avait débarqué à Smyrne le 15 mai 1919, dans ce qui était l’Empire ottoman à l’agonie. Environ la moitié de la population de la ville était grecque et ces dernier ont vu le débarquement grec à Smyrne comme une libération plutôt qu'une occupation. L'occupation de Smyrne a été l'un des événements qui ont déclenché la guerre gréco-turque.

Lorsque les forces turques ont vaincu l'armée grecque lors de la bataille de Dumlupınar le 30 août 1922, les troupes grecques se sont retirées vers Smyrne. Le 9 septembre, l'armée turque est entrée dans la ville d'Izmir, mettant fin à une occupation de trois ans.

Le jour de l'indépendance d'Izmir est une date importante dans le calendrier turc, mais ce n’est pas un jour férié. La journée est principalement observée dans la ville d'Izmir, où elle est marquée par des marches, des concerts, des spectacles aériens, des fêtes en plein air, des feux d'artifice et d'autres événements et activités festifs.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 8 septembre 2022

 
Η Καταστροφή της Σμύρνης

Η Καταστροφή της Σμύρνης

Ahmet Ziya Akbulut, Türk Ordusunun İzmir'e Girişi, (Atatürk ve Kurtuluş Savaşı Müzesi)

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1938, Turquie, 10 novembre, héros national Bruno Teissier 1938, Turquie, 10 novembre, héros national Bruno Teissier

10 novembre : que reste-t-il aujourd'hui d'Atatürk, père fondateur de la Turquie ?

À 9 h 05, ce matin, des sirènes retentissent et toute la Turquie se fige. La circulation s’arrête, le temps de deux minutes en hommage à Mustapha Kemal, dit Atatürk, le père fondateur de la république turque, décédé à 57 ans, le 10 novembre 1938. Mais, avec Recep Tayyip Erdoğan au pouvoir, que reste-il aujourd'hui du kémalisme ?

 

À 9 h 05, ce matin, des sirènes retentissent et toute la Turquie se fige. La circulation s’arrête, le temps de deux minutes en hommage à Mustapha Kemal, dit Atatürk, le père fondateur de la république turque, décédé à 57 ans, le 10 novembre 1938. Mais, avec Recep Tayyip Erdoğan au pouvoir, que reste-il aujourd'hui du kémalisme si ce n’est l’exaltation patriotique dans le cadre de conflits tous azimuts ?

​​Mustapha Kemal a combattu pour rétablir une Turquie indépendante, quitte à empiéter sur le territoire d’autres peuples : Arméniens, Kurdes... Son lointain successeur semble vouloir reconstituer un semblant d’Empire ottoman : guerres en Syrie, Arménie, Libye, tensions en Méditerranée, implantation au Soudan… À l’intérieur du pays, la situation est de plus en plus tendue. Devenues quotidiennes, les purges décidées par le président Erdoğan s’abattent sur tous les opposants : ceux de gauche, les syndicalistes, les militants des droits de l’homme et de la cause kurde. Tout le monde est sous la menace, les gens sont tétanisés par la peur. Les héritiers politiques d’Atatürk ont toutefois gagné, l’an dernier, les mairies d’Istanbul et d’Ankara. Le kémalisme, représenté par le principal parti d’opposition, n’a sans doute pas dit son dernier mot.
Ce matin, des centaines de personnes se rassemblent devant le palais de Dolmabahçe, à Istanbul, sur les rives du Bosphore où Atatürk a rendu son dernier souffle, le 10 novembre 1938, à 9h05. Heure à laquelle toutes les pendules du palais ont été arrêtées. Traditionnellement, une marche est organisée le 10 novembre par la municipalité de Beşiktaş jusqu’au palais de Dolmabahçe. Habituellement, une gigantesque chaîne humaine porte un drapeau turc mesurant plus d’un kilomètre de long. Cette année, en raison de la pandémie, les cérémonies sont beaucoup plus modestes.

D’ordinaire, à Ankara, des milliers de personnes affluent sur la colline d’Anıttepe où se trouve le mausolée Anıtkabir. La dépouille de Mustapha Kemal y a été transférée en 1953, lors de funérailles nationales. Le site accueille plus de 3 millions de visiteurs par an. Le mausolée abrite aussi un musée consacré à Atatürk et à la Guerre d’indépendance turque (1919-1922).

 
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