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Bruno Teissier Bruno Teissier

8 mars : le peuple Balkar se souvient de sa déportation par Staline

Les Balkars, peuple turcique du nord du Caucase, ont été déportés sur ordre de Staline après avoir été occupés par les Allemands en 1942-43. Chaque 8 mars ils commémorent leur exil forcé.

 

Les Balkars, peuple turcique, vivent dans le nord du Caucase, une région qui a été colonisée par la Russie au XIXe siècle. Avec la formation de l’URSS, ils se sont retrouvés dotés d’une région, soi-disant autonome, appelée Kabardino-Balkarie, puis en 1936 d’une république soviétique « autonome » du même nom.

Leurs malheurs se sont aggravés avec la Seconde Guerre mondiale. Leur république a été occupée par les Allemands en 1942. Certains y ont vu l’espoir d’une libération du joug russe. Après que l’Armée rouge a réoccupé la région, les Balkars, ainsi que d’autres peuples de la région, comme les Tatars de Crimée, ont été désignés comme traîtres par Staline et Lavrentiy Beria a ordonné leur déportation vers l’Asie centrale ou la Sibérie. Celle des Balkars a eu lieu brutalement le 8 mars 1944. Ils n’ont eu que deux heures pour faire leurs bagages. Leur territoire fut alors rebaptisé RSSA de Kabardie. Le 28 mars 1957, la population balkare fut autorisée à réintégrer sa région d'origine, dont le nom de Kabardino-Balkarie fut dès lors rétabli.  Mais environ le quart d’entre eux, morts en déportation, ne sont pas revenus.

En 1989, l’URSS reconnaît enfin l’illégalité de leur déportation, leur collaboration avec les nazis n’ayant pas été établie. En 1991, une journée de commémoration est instaurée : la Journée à la mémoire des victimes du stalinisme et de la déportation des Balkars (Balkar Xalkının Sürgün Qurbanları Üçün Anı Günü). Le Conseil des anciens du peuple Balkars organise chaque 8 mars un programme de commémoration devant le monument de l'exil dans la capitale Naltchik. Dans les mosquées on prie pour les âmes des victimes décédées pendant l'exil. Cette commémoration s’est faite plus discrète ces dernières années car les Balkars vivent toujours sous la colonisation russe et Staline a été pleinement réhabilité par Poutine. Il n’est plus question en Russie, aujourd’hui, d’évoquer les déportations, persécutions et le goulag. Il est encore moins question de lutte anticoloniale depuis que Poutine a calmé les ardeurs indépendantiste tchétchène, peuple voisin, au prix de 300 000 morts.

En 1943 ou 1944, les Tchétchènes, les Ingouches, les Karatchaïs, les Tatars de Crimée, les Meskhètes et les Kalmouks ont subi le même sort que les Balkars, sous le même prétexte. Chacun cultive cette mémoire à une date différente.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 7 mars 2025

 
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1957, URSS, Russie, Kabardino-Balkarie, 28 mars Bruno Teissier 1957, URSS, Russie, Kabardino-Balkarie, 28 mars Bruno Teissier

28 mars : le Jour de la renaissance de la nation Balkar

La république autonome de Kabardino-Balkarie, composante de la Fédération de Russie, célèbre sa restauration le 28 mars 1957, après 13 ans de déportation du peuple Balkar.

 

Les Balkars sont un peuple turc habitants au nord du Caucase, ils n’ont pas été massacrés par Poutine comme leurs voisins les Tchétchènes, mais ils ont subi sous Staline, le 8 mars 1944, une déportation, dans leur totalité, comme les Tatars de Crimée et d’autres minorités ethniques de l’ex-URSS.

En 1942, une partie importante de la république soviétique autonome de Kabardino-Balkarie a été occupée par les troupes allemandes. Au début de l’année 1943, l'Armée rouge l’a libéré. Mais, l'année suivante, le chef du NKVD (le ministère de l'Intérieur) Lavrentiy Beria ordonne la déportation de tous les Balkars. 

La raison officielle de cette déportation était la prétendue collaboration des Balkars avec les nazis. En réalité, l'expulsion des Balkars faisait partie d'un programme de colonisation forcée et de transfert de population qui a touché des millions de personnes appartenant à des minorités ethniques soviétiques. L'ordre de commencer la déportation des Balkars fut donné au petit matin du 8 mars 1944. En deux heures environ, toute la population des Balkans a été transportée à Naltchik (la capitale). De là, ils ont été déportés vers le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan, l'oblast d'Irkoutsk et l'Extrême-Nord dans des convois ferroviaires. 20% d’entre eux sont morts pendant cette déportation. Leur république devient la Kabardie.

Après la mort de Staline, en 1953, la situation évolue. En 1956, ils seront autorisés à revenir et le 28 mars 1957, la Kabardie redevient la Kabardino-Balkarie. C’est cet anniversaire qui est fêté aujourd’hui comme le Jour de la renaissance de la nation balkar (Balkar halkynnyn yılnı xalqın tənouu günu).  Les Balkars ont trouvé leurs maisons ou leurs fermes pillées et en ruines. On les a aidés à les reconstruire, mais ils n'ont jamais reçu de compensations financières pour leurs biens perdus ou leurs souffrances en exil. 

Cette journée de commémoration a été officiellement instituée par le président de Kabardino-Balkarie, Valeriy Kokov, en 1994, à l’occasion de la célébration du cinquantenaire de la déportation. Certains habitants de la république estiment toutefois que les festivités auraient dû être calées sur le 3 mai, date anniversaire du retour, en 1957, des premiers déportés.

La Journée du renouveau du peuple balkar est marquée par des concerts, des spectacles, des expositions, des compétitions sportives, des courses de chevaux, des courses automobiles et d'autres événements organisés dans toute la république. Chaque année, des fleurs sont déposées sur le monument à Kaysyn Guliyev, poète national.  Une procession et un rassemblement équestre ainsi qu’un rallye de voitures tout-terrain sont organisés à Naltchik, sur le trajet de la déportation.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 7 mars 2022

 
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