L’Almanach international

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1933, Allemagne, Livres, Nazisme, 10 mai Bruno Teissier 1933, Allemagne, Livres, Nazisme, 10 mai Bruno Teissier

10 mai : il y a 90 ans les nazis brûlaient les livres

L’Allemagne célèbre chaque 10 mai la Journée du livre en mémoire de l’une des monstruosités du régime nazi : les bûchers de livres organisés par l'Union des étudiants allemands dès l’arrivée de Hitler au pouvoir. En Allemagne de l’Ouest cette célébration a été instaurée en 1983 après quatre décennies de non-dits sur la censure et la destruction des livres à l’époque nazie.

 

L’Allemagne célèbre chaque 10 mai, la Journée du livre (Tag des Buches ), appelée aussi la Journée du livre libre (Tag des freien Buches) en mémoire de l’une des monstruosités du régime nazi : les bûchers de livres organisés par l'Union des étudiants allemands.

Hitler est arrivé  au pouvoir en janvier 1933, dès le mois de mars l’Union des étudiants allemands lançait une campagne pour brûler cérémonieusement des livres jugés « non allemands » selon l’idéologie nazie. C’est-à-dire les livres écrits par des auteurs juifs, religieux, pacifistes, communistes, socialistes, anarchistes et libéraux classiques.

L’un des bûchers les plus tristement célèbres eu lieu le 10 mai 1933 à Berlin sur la Bebelplatz, mais aussi dans de nombreuses villes universitaires allemandes dont Munich, Francfort-sur-le-Main et Bonn. Cette nuit-là, des étudiants nationalistes ont brûlé environ 25 000 livres « non allemands ». Parmi les auteurs germanophones dont les livres ont été brûlés figurent Bertolt Brecht, Albert Einstein, Friedrich Engels, Lion Feuchtwanger, Sigmund Freud, Heinrich Heine, Franz Kafka, Stefan Zweig, Rosa Luxembourg, Heinrich Mann, Karl Marx, Karl Marx, Stefan Zweig, et plein d'autres. Beaucoup d’auteurs, moins connus, tombèrent totalement dans l'oubli, leurs œuvres disparues des librairies n’ayant pas été republiées après la guerre.

« Là où on brule des livres, on finit par bruler des gens aussi », avait écrit presque prophétiquement Heinrich Heine en 1820. Cette phrase figure sur le mémorial de la Bebelplatz à Berlin. Les œuvres de cet écrivain allemand qui a terminé sa vie réfugié en France, ont elles aussi été mises à l'index par les nazis.

La première Journée du livre a été organisée le 10 mai 1947 à Berlin. Mais, après la division de l’Allemagne, seule la RDA continuera à célébrer le 10 mai. À l’Ouest, le sujet de la censure et de la destruction des livres par les étudiants à l’époque nazie, est resté tabou jusqu’aux années 1970. La Journée du livre a fini par être instaurée en 1983, sur l’insistance de l’Union des libraires allemands, à l’occasion du 50e anniversaire du régime nazi .

Aujourd’hui, à Berlin, un mémorial des autodafés nazis a été construit sur la Bebelplatz, où a eu lieu l'autodafé du 10 mai. Conçu par Micha Ullman, il se compose d'une plaque de verre encastrée dans les pavés, donnant une vue sur des bibliothèques vides suffisamment grandes pour contenir tous les livres brûlés.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 

Autodafé de livres organisé par des étudiants

La première journée du livre, le 10 mai 1947, à Berlin

Le mémorial de Bebelplatz (anciennement Opernplatz) à Berlin : la Bibliothèque engloutie (Versunkene Bibliothek) de l’artiste Micha Ullman

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Allemagne, 1919, Socialisme, Communisme, révolution Bruno Teissier Allemagne, 1919, Socialisme, Communisme, révolution Bruno Teissier

12 janvier : hommage à Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht

Comme chaque année, le dimanche qui précède l’anniversaire de l’assassinat de Rosa Luxemburg, plusieurs milliers de personnes, un œillet rouge à la main, se pressent dans le cimetière de Friedrichsfeldeen à Berlin, pour lui rendre hommage, ainsi qu’à Karl Liebknecht, l’autre socialiste révolutionnaire assassiné le même jour.

 

Comme chaque année, le dimanche qui précède l’anniversaire de l’assassinat de Rosa Luxemburg, plusieurs milliers de personnes, un œillet rouge à la main, se pressent dans le cimetière de Friedrichsfeldeen à Berlin (le cimetière socialiste), pour lui rendre hommage, ainsi qu’à Karl Liebknecht, l’autre socialiste révolutionnaire assassiné le même jour. Inutile de chercher un fleuriste, pendant plusieurs jours, des dizaines de vendeurs à la sauvette de cette fleur symbole des luttes ouvrières, attendent les militants dès la sortie de la station de métro Lichtenberg. La gauche française y envoie chaque année des représentants qui y rencontrent les Allemands de Die Linke, ainsi que d’autres membres de la gauche de la gauche en Europe.

Le matin du 15 janvier 1919, des miliciens d’extrême droite sont venus chercher Rosa Luxemburg à son domicile pour la conduire à l’hôtel Eden où elle doit être interrogée. En sortant de l’hôtel, ils l’ont assommé d’un coup de crosse de fusil et embarqué. Dans la voiture, l’un des hommes lui a tiré une balle dans la tête. Son corps est jeté au fond du Landwehrkanal. Il ne sera retrouvé que quatre mois plus tard.

La RDA a disparu avec la chute du mur de Berlin, pas les célébrations qui y étaient organisées, notamment la coutume de déposer des fleurs au Mémorial du socialisme de Friedrichsfeldeen (Berlin) en l’honneur de Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht assassinés par des miliciens d’extrême-droite, le 15 janvier 1919, alors qu’ils tentaient d’instaurer une république soviétique allemande.

Le cimetière central de Friedrichsfelde est situé Gudrunstraße 20, 10365  Berlin - site internet -

Si vous avez raté le grand rassemblement de ce dimanche, rendez-vous le 15 janvier, à 18 heures, place Olof Palm, pour une procession jusqu’au mémorial de Tiergarten.

 
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1989, 1938, 1923, 1918, Nazisme, Communisme, Démocratie, Guerre froide Bruno Teissier 1989, 1938, 1923, 1918, Nazisme, Communisme, Démocratie, Guerre froide Bruno Teissier

9 novembre : l'impossible fête nationale allemande

Le 9 novembre 1989, le mur de Berlin tombait, amorçant la fin de la Guerre froide. Une date idéale pour célébrer l’Allemagne réconciliée et retrouvée, mais impossible d’en faire la nouvelle fête nationale… car le 9 novembre évoque d’autres journées, plus sombres pour certaines

 

Le 9 novembre 1989, le mur de Berlin tombait mettant fin à 50 années d’antagonismes entre les deux Allemagne et amorçant la fin de la Guerre froide. Une date idéale pour célébrer l’Allemagne réconciliée et retrouvée, mais impossible d’en faire la nouvelle fête nationale… car le 9 novembre évoque d’autres journées, plus sombres pour certaines : En 1938, la « Nuit de cristal » (pogrom contre les juifs), le même jour, en 1923 Adolf Hitler tentait un putsch à Munich. Quelques années auparavant encore, c’est le 9 novembre 1918 que furent proclamés simultanément deux régimes concurrents : la république de Weimar et la République socialiste libre, vite écrasée. Enfin, le 9 novembre 1848 vit l’exécution du parlementaire allemand Robert Blum par les contre-révolutionnaires, après l’insurrection viennoise d’octobre 1848. C’est un peu comme si une seule date racontait l’histoire de l’Allemagne au XXe siècle. Cette date a été baptisée schicksalstag, le jour du Destin ! Le gouvernement lui préféra donc le 3 octobre, date officielle de la réunification en 1990.

Cette année, les cérémonies officielles mettent l’accent sur le 80e anniversaire de la Nuit de cristal. Angela Merkel se rendra notamment à Berlin dans l’une des synagogues profanées à travers tout le pays par les nazis. Au moins 90 Juifs avaient été tués cette nuit-là, et 30 000 déportés vers les camps de concentration.

Mais, c’est aussi le centenaire de l’instauration de la république, celle de Weimar, la mal aimée… dont on évitera de parler. À tort, car c’était pourtant une première expérience de démocratie en Allemagne. Ce régime a notamment donné le droit de vote aux femmes et permis bien des progrès sociaux.

Hitler, en 1923, et Goebbels, en 1938, n’avait pas choisi le 9 novembre par hasard. L’extrême droite tente toujours de s’approprier le 9 novembre. Cette année encore, les autorités berlinoises ont dû interdire une manifestation prévue par l’extrême droite qui voulait organiser aujourd’hui une « marche du deuil pour les victimes de la politique ».

L’an prochain, on fêtera les 30 ans de la chute du mur.

 
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