14 août : l'invention du Pakistan il y a 77 ans
Le jour de l’Indépendance (یوم استقلال) est férié, il débute par un lever de drapeau au Parlement, les discours télévisés du président et du premier ministre, puis par la relève de la garde au mausolée de Mohammed Ali Jinnah, le père de la nation pakistanaise.
Le drapeau national est partout, jusque dans l’habillement vert et blanc que certains citoyens s’appliquent à arborer en ce jour de fête nationale qui est l’anniversaire de l’indépendance de 1947. Celle-ci permit à la fois de chasser les Anglais et, au nom de l’islam, de se séparer de l’Inde (laquelle fête l’événement le 15 août).
Cet après-midi sera l’occasion de faire voler des cerfs-volants en famille. Ce soir, on fera brûler des bougies dans les rues. À Lahore, la journée se terminera par un feu d’artifice. Une journée de fête qui permet d’oublier pendant quelques heures les problèmes du pays, ses contradictions identitaires, sa mauvaise image internationale, notamment en raison du soutien pakistanais apporté ces dernières années aux talibans afghans... un soutien qui aujourd’hui se retourne contre lui.
Mohammed Ali Jinnah a milité contre le colonialisme anglais aux côtés des hindous. Mais, dans les États indiens sous tutelle britannique, les musulmans étaient souvent perçus par les hindous comme des intrus et traités comme des citoyens de seconde zone. D’où l’idée de leur inventer un État séparé. Au grand dam de Gandhi et Nehru, Jinnah a fini, en 1939 par se rallier à cette idée en cherchant appui auprès de Londres qui, en 1947, parrainera la partition de son ancien empire. A-t-il réussi son pari ? Au Pakistan, il est désigné comme le père de la nation pour avoir œuvré à la création du pays. Mais sur le demi-milliard de musulmans d’Asie du sud, seuls 180 millions vivent aujourd’hui au Pakistan. Les musulmans de l’Inde qui sont aussi nombreux, lui reprochent amèrement la partition de 1947. Les 500 millions de musulmans d’Asie du sud auraient actuellement une tout autre influence face aux 800 millions d’hindous s’ils n’avaient pas été répartis sur deux, puis trois États (avec le Bangladesh) séparés.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 13 août 2024