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1881, Premières nations, 5 novembre, Nouvelle-Zélande Bruno Teissier 1881, Premières nations, 5 novembre, Nouvelle-Zélande Bruno Teissier

5 novembre : la mémoire de la lutte non violente des Maoris de Nouvelle-Zélande

En Nouvelle-Zélande, la tradition de la Guy Fawkes Night est en concurrence avec la mémoire maorie qui, le 5 novembre, commémore la destruction de la localité de Parihaka en 1881 par les troupes coloniales. Les Maoris militent aujourd’hui pour l’instauration, à cette date d'un jour férié, un Parihaka Day qui serait aussi une célébration de la non-violence.

 

En Nouvelle-Zélande, la tradition de la Guy Fawkes Night est en concurrence avec la mémoire maorie qui, le 5 novembre, commémore la destruction de la localité de Parihaka en 1881 par les troupes coloniales. Les Maoris militent aujourd’hui pour l’instauration, à cette date d'un jour férié, un Parihaka Day qui serait aussi une célébration de la non-violence.

En Nouvelle Zélande la communauté autochtone n’a pas été anéantie dans les mêmes proportions qu’en Australie. Les Maoris représentent aujourd’hui 15% de la population du pays et se penchent aujourd’hui sur leur histoire. Les exactions ont été nombreuses lors de la conquête du pays par les Européens, on ne peut pas les commémorer toutes, mais ce fait-là est très emblématique.

Au cours des années 1860, des milliers de Maoris se sont retrouvés sans terre du fait des confiscations par les autorités coloniales. En 1866, menés par Te Witi, un chef maori qui avait déjà fait parler de lui, quelques centaines d’entre eux s’installent sur des terres qui étaient promises à la colonisation. Le village de Parihaka est fondé. Il  est situé dans la région de Taranaki. La communauté s’organise et, en dépit des interdictions, laboure systématiquement les terres en vue de les cultiver. Lassés des guerres qui ont fait beaucoup de victimes au cours des années précédentes, les habitants de Parihaka opposent une résistance résolument non violente. C’est ainsi que l’a voulu leur guide, Te Wiki qui dans ses enseignements, mêle la spiritualité maorie à la rhétorique du christianisme apprise auprès des missionnaires. Par de simple sit-in, les habitants de Parihaka obtiennent certains succès, jusqu’à empêcher la construction de routes. Ce lieu de résistance passive attire l’admiration et le soutien de Maoris de tout le pays, notamment sous forme de livraison de nourriture.

Finalement, les autorités anglaises exaspérées font envoyer la troupe. 1600 cavaliers débarquent le matin du 5 novembre 1881 dans ce village de 2000 habitants. Ils sont accueillis par des villageois assis sur le sol, et une chorale d’enfants menée par un vieil homme. Les chefs du village, ainsi qu’une partie des hommes, seront arrêtés et emprisonnés, sans jugement. Le village est pillé et presque entièrement détruit, des femmes sont violées. La population est éparpillée sans nourriture dans la région. Aucun journaliste n’a été autorisé à assister au méfait. Te Whiti est déporté pour sédition dans l’île du sud jusqu’en 1883. Mais son enseignement demeure. Ici et là, des labours vont continuer, la résistance non violente va s’imposer au fils des années comme mode de protestation des Maoris, un demi-siècle avant que les Indiens ne fassent de même pour chasser les Anglais de l’Inde.

L’événement, oublié aujourd’hui (sauf par les Maoris) avait fait du bruit dans la presse anglaise de l’époque, qui pendant des années a relaté le mode de résistance des Maoris de Nouvelle-Zélande. Le Mahatma Gandhi s’en serait inspiré pour forger sa politique de désobéissance civile contre les Anglais. Martin Luther King et Rosa Parks sont également les héritiers de Te Witi o Rongomai.

Depuis quelques années, à l’approche du 5 novembre, des associations maories organisent des manifestations, font circuler des pétitions pour que soit abandonnée la tradition de la Guy Fawkes Night, la célébration anachronique et surtout infondée dans le Pacifique Sud, d’un événement survenu au XVIIe siècle, à l’autre bout du monde. D’autant plus que morceaux de mémoire britannique à laquelle reste attachés beaucoup de Néo-Zélandais, occulte une autre date célébrée discrètement par les Maoris et qu’ils aimeraient voir partager par la nation tout entière : l’anniversaire de la destruction de Parihaka, le 5 novembre 1881. Cette date est connue sous le nom de « Te Rā o te Pāhua » ou « Jour du pillage ».

Ce qui reste de Parihaka, aujourd’hui : trois maraes (espace communautaire maori) et les tombes de Te Witi et Tohu Kākahi , les guides spirituels de la communauté. Chaque 5 et 6 novembre, un hommage leur est rendu. Ainsi que le 18 et 19 de chaque mois (Te Witi est mort le 18 novembre 1907). Chaque année un festival international de la paix s’y déroule. Le 24 octobre 2019, les excuses officielles ont été prononcées et un projet de loi de réconciliation (Te Pire Haeata ki Parihaka) ont finalement été adoptées. Chris Finlayson, ministre des négociations du Traité de Waitangi et procureur général de Nouvelle-Zélande, a reconnu, au nom de la Couronne, que les événement qui se sont déroulés à Parihaka, il a 138 ans, étaient « parmi les plus honteux de l’histoire de notre pays ».

#Parihakaday est le hashtag qui sert à exprimer son soutien à l’instauration d’un jour férié le 5 novembre, ou au moins d’une commémoration officielle ce jour-là.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 4 novembre 2024

 
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1840, fête du travail, Nouvelle-Zélande Bruno Teissier 1840, fête du travail, Nouvelle-Zélande Bruno Teissier

24 octobre : la fête du travail en Nouvelle Zélande

Ce jour férié, qui tombe le quatrième lundi d’octobre, rappelle le moment où la journée de travail de huit heures a été officieusement adoptée en Nouvelle-Zélande. C’était en 1840.

 

Comme tous les pays anglo-saxons, la Nouvelle-Zélande a une fête du travail (Labour Day ) distincte du 1er mai. Elle a été fixée le quatrième lundi d’octobre, un jour de semaine pour que les travailleurs puissent toujours en profiter. La date fluctuante rappelle le moment (en octobre) où la journée de travail de huit heures a été officieusement adoptée en Nouvelle-Zélande.

On fait remonter cela à l’initiative d’un jeune charpentier anglais, nommé Samuel Parnell, débarqué en Nouvelle Zélande en1840. Profitant de la pénurie de main-d’œuvre qualifiée dans ce pays, à l’époque, il sut imposer ses conditions au moment de l’embauche : 8 heures de travail par jour (8 heures de loisir et 8 heures de sommeil), selon la formule lancée par Robert Owen en 1817. Il ne s’est pas tenu à son cas personnel : Samuel Parnell accueillait les navires arrivant à Port Nicholson et disait à tous les nouveaux migrants de ne pas travailler plus de huit heures par jour. Il arriva à ses fins quand, lors d'une réunion ouvrière en octobre 1840, il fut convenu que les gens ne devaient travailler que huit heures par jour, soit entre 8h et 17h. Il fut dit également que quiconque accepterait des conditions de travail moins favorables devait être jeté au port…

Pour le cinquantième anniversaire de la réunion, le 28 octobre 1890, Samuel Parnell a dirigé un défilé de la fête du Travail réunissant quelque 1 500 personnes pour commémorer son établissement de la journée de huit heures. Il mourut quelques semaines plus tard, le 17 décembre 1890. Des milliers de personnes ont assisté à ses funérailles publiques trois jours plus tard. Il est enterré au Bolton street Mémorial Park et sa tombe fait partie du sentier commémoratif. Les célébrations annuelles de l'événement ont donc commencé. 

En 1890, la journée de travail de huit heures était devenue la norme pour les commerçants et les ouvriers, mais de nombreux groupes de travailleurs, tels que les ouvriers agricoles, les domestiques, les cheminots, les vendeurs et les commis, travaillaient faisaient encore de plus longues journées. La fête du travail chaque fin octobre a permis de faire connaitre leurs revendication.

C’est en 1900, que la fête du travail est devenue un jour férié. Mais, chaque province avait choisi sa propre date pour l'observer. Depuis 1910, la fête est marquée le quatrième lundi d'octobre dans toute la Nouvelle-Zélande. Il n’y a plus aujourd’hui de manifestations syndicales traditionnelles ce jour-là, c’est juste un jour de congé en plus des quatre semaines légales. Les syndicats ont tenté d’instaurer une tradition du 1er mai en Nouvelle Zélande, mais sans grand succès.

48 heures est le maximum légal par semaine, mais aujourd’hui, la plupart des salariés ne travaillent qu’environ 40 heures. Comme en Californie, le passage à 32 heures hebdomadaire est discuté.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 

Samuel Parnell à la fin de sa vie

La prescription de George Owen (1771-1858), chef d’entreprise britannique et théoricien socialiste

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1840, 6 février, Nouvelle-Zélande Bruno Teissier 1840, 6 février, Nouvelle-Zélande Bruno Teissier

6 février : fête nationale contestée en Nouvelle Zélande

L’ambiance de la fête nationale de Nouvelle Zélande n’est pas pas plus sereine qu’en Australie car c’est la date d’un traité entre les autochtones maoris et les colons anglais qui a été choisie. Ce traité a été signé à Waitangi, le 6 février 1840. C’était, il a 180 ans jour pour jour.

 

La Nouvelle Zélande a le mérite de ne pas avoir choisi comme fête nationale l’anniversaire de l’arrivée des premiers Euro­péens, comme le très controversé Australia Day. L’ambiance n’est pas pour autant plus sereine car c’est la date d’un traité entre les autochtones maoris et les colons anglais qui a été choisie. Ce traité a été signé à Waitangi, le 6 février 1840. C’était, il a 180 ans jour pour jour. D’année en année, les activistes maoris ont fait de Waitangi Day une journée de protestation contre l’iniquité du traité qui leur a été imposé par le Royaume Uni. Beaucoup sont, en effet, convaincus que ce traité qui devait les protéger, les a en réalité grandement défavorisés. Surtout, depuis qu’ils ont pris conscience que les versions du texte en anglais et en maoris ne disait pas vraiment la même chose.

Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, les Maoris ont perdu le contrôle d’une grande partie des terres qu’ils possédaient, le plus souvent après des confiscations. Le fameux traité, était alors totalement ignoré. À partir des années 1950, les Maoris ont de plus en plus cherché à utiliser le Traité comme une base pour revendiquer des droits et récupérer les terres perdues. Les gouvernements des années 1960 et 1970 ont répondu en donnant au Traité un rôle de plus en plus central mais selon l'interprétation qu’en ont fait les Anglais. Car, comme on l’a vu, les deux versions divergent.

De fait, peu de commémorations importantes sont organisées pour l’anniversaire de ce jour fondateur de la Nouvelle-Zélande. Les Néo-Zélandais profitent généralement de ce jour férié qui tombe à la période la plus chaude de l’été, pour aller à la plage. Ceux qui ne partent pas, pourront se rendre au Summer Vibes North Shore Waitangi Day Festival à Auckland.

À Waitangi, lieu de signature du traité, les commémorations commencent généralement la veille, le 5 février. Dans les années 2000, des violences avaient régulièrement lieu, au point que la cérémonie avait été déplacée à Wellington. Aujourd’hui, cela se limite à des débats vigoureux auxquels des politiciens néozélandais sont invités à participer.

Célébré depuis 1934, ce jour n’est férié que depuis 1974, d’abord sous le nom de New Zealand Day puis, aujourd’hui, de Waitangi Day. À londres, la ville où vivent le plus d’expatriés néo-zélandais, il est d’usage de faire la tournée des pubs en utilisant la Circle Line du métro londonien. Ce “Kiwi barathon” aura lieu ce samedi, le 8 février.

 
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