L’Almanach international
Parce que chaque jour est important quelque part dans le monde
11 avril : l’anniversaire de la libération du camp de Buchenwald
Le 11 avril 1945, les Américains libéraient 21 000 personnes, dont 9 000 enfants de ce camp de concentration allemand établi par les nazis près de Weimar. Environ 250 000 personnes y ont été internées. C’est aujourd’hui le 79e anniversaire de la libération de Buchenwald, situé dans une région aujourd’hui rongée par une extrême droite toujours tentée par les mêmes démons.
Le 11 avril 1945, les Américains libéraient 21 000 personnes, dont 9 000 enfants de ce camp de concentration allemand établi par les nazis près de Weimar. Environ 250 000 personnes de tous les pays d'Europe furent internées entre juillet 1937 et avril 1945 à Buchenwald. Au total, 34 375 décès sont enregistrés dans les dossiers du camp. Mais ne sont officiellement pas recensés les prisonniers de guerre soviétiques, assassinés d'une balle dans la nuque, les prisonniers de la Gestapo achevés dans le crématoire de Buchenwald (estimés à 1100), les victimes des convois d'évacuation des camps de l'Est arrivées à Buchenwald ou celles évacuées du camp dans des marches de la mort par les SS au printemps 1945. Parmi les survivants célèbres de ce camp : Jorge Semprun, Stéphane Hessel, Elie Wiesel…
Le Mémorial de Buchenwald, inauguré le 14 septembre 1958, aux environs de Weimar, est le plus grand site commémoratif des camps de concentration allemands et un témoignage fondamental sur les crimes nazis. Il se situe dans le Land de Thuringe, où, avec 23,4 % des voix aux élections législatives d’octobre 2019, l’extrême droite incarnée par l’Alternative pour l’Allemagne (AfD) occupe la deuxième place au Parlement régional. Le chef de file régional de l'AfD, autrefois proche des milieux néonazis, incarne le visage le plus extrémiste du parti. En avril 2024, la formation est créditée en Thuringe de 35 % des intentions de vote, loin devant la CDU et surtout le SPD du chancelier Scholz, qui a pratiquement disparu du paysage local. Des élections régionales sont prévues en septembre 2024 dans ce Land, ainsi que dans deux autres Länder d'ex-RDA, le Brandebourg et la Saxe. Lors d’une élection locale dans un district de Thuringe, en janvier 2024, le candidat de l’AfD a recueilli 47,6 %. En septembre 2023, on a même craint que l’AfD remporte la mairie de Nordhausen, la commune où se situe le camp de Buchenwald. Si finalement, le maire sortant, sans étiquette, a été reconduit avec près de 55% des voix, son adversaire d’extrême droite a tout de même fait 45%...
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 10 avril 2024
11 avril : la Journée de la poésie hongroise
Cette journée est fêtée en Hongrie depuis 1964. C’est la seule célébration nationale héritée de la Hongrie communiste. Le 11 avril, est l'anniversaire d'Attila József. Un poète qui fut un peu le Rimbaud hongrois, adolescent prodige, mort jeune... Communiste, mais pas trop. C’est aujourd’hui, l’occasion en Hongrie d’un marathon de poésie.
La Journée de la poésie (költészet napja) est célébrée en Hongrie depuis 1964. C’est la seule célébration nationale héritée de la Hongrie communiste. Le 11 avril, est jour de l'anniversaire d'Attila József. Un poète qui fut un peu le Rimbaud hongrois. Né en 1905 dans un milieu très défavorisé, cet enfant précoce a été l’adolescent prodige des milieux littéraires hongrois dès 1922. Il est mort en 1937 à 32 ans écrasé par un train, dans des circonstances qui font penser à un suicide.
Il a été communiste, dès 1919, d’où ce choix de la date à l’époque de Kádár, mais il avait été exclu du parti pour idéalisme, d’où le maintien de cette figure dans la Hongrie post-communiste. Sa statue, réalisée par Marton László, regarde le Danube du pied du Parlement hongrois. L’emplacement, choisi en 2009, est inspiré d’un de ses poèmes fameux, Au bord du Danube.
La poésie joue toujours un rôle particulier dans l’espace culturel hongrois. On ne lit plus des poèmes dans les usines comme à l’époque communiste, chaque 11 avril, mais on organise des soirées de performances littéraires comme le fameux marathon de poésie (Költészeti maraton) organisé depuis 2010, où une centaine d’auteurs (147 en 2022) se relaient pendant 24 heures pour lire des textes en public.
La figure d’Attila Jozsef n’est pas oubliée. Chaque 11 avril, sur la tombe du poète, au cimetière de la rue Fiumei, à Budapest, l'Institut national du patrimoine (NÖRI), organise un événement. Cette année est donné un concert de poèmes d’amour mis en musique avec chanteurs et musiciens.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde
11 avril : le Costa Rica fête son héros national
Costa Rica, pays sans armée, a pour héros national un soldat que l’on célèbre par des défilés d’enfants habillés de pseudo-uniformes militaires.
On peut trouver paradoxal que le Costa Rica, pays sans armée, ait un soldat pour héros national que l’on célèbre par des défilés d’enfants habillés de pseudo-uniformes militaires. Sa geste, en partie légendaire remonte, toutefois, au milieu du XIXe siècle. Il s’agissait de sauver le pays menacé par, William Walker, un chef de guerre américain qui tentait de mettre toute l’Amérique centrale sous sa coupe.
Le héros costaricain s’appelle Juan Santamaría, il est né le 29 août 1831. Il a rejoint l'armée de son pays lorsque le flibustier américain William Walker a conquis le Nicaragua et tenté de conquérir les autres pays d'Amérique centrale.
C’est le 11 avril 1856 que les troupes costaricaines ont affronté les forces nicaraguayennes dirigées par William Walker lors de la deuxième bataille de Rivas (c’est cet anniversaire que l’on célèbre aujourd’hui par un jour férié). Selon le récit traditionnel, le général José María Cañas a demandé à un volontaire de s'approcher de la forteresse des flibustiers et d'y mettre le feu. Santamaría s'est portée volontaire pour le faire et a réussi, provoquant la fuite de l'ennemi. Malheureusement, il a été mortellement blessé par des tirs de tireurs d'élite, mais son sacrifice a aidé les Costariciens à gagner.
L'anniversaire de sa mort au combat fut proclamé jour férié en 1891 : El día de Juan Santamaría. Il existe deux statues de Juan Santamaría au Costa Rica : l'une dans la capitale du pays, San José, et l'autre à Alajuela, sa ville natale, là où il a aussi perdu la vie. Autre hommage notoire, l’aéroport de la capitale porte le nom de Juan Santamaría.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde
11 avril : le centenaire de la Jordanie sur fond de frictions dans la famille royale
La Jordanie fête son centenaire en tant qu’État. Un État encore sous tutelle britannique. Le pays n’était pas encore indépendant en 1921, il ne le sera qu’en 1946, mais ce 11 avril 2021, le pays a tenu à célébrer le centième anniversaire de la formation, par l’émir Abdallah, du tout premier gouvernement jordanien.
La Jordanie fête son centenaire en tant qu’État. Un État encore sous tutelle britannique. Le pays n’était pas encore indépendant en 1921, il ne le sera qu’en 1946, mais ce 11 avril 2021, le pays a tenu à célébrer le centième anniversaire de la formation, par l’émir Abdallah, du tout premier gouvernement jordanien.
On parle très peu de la Jordanie, laquelle s’est pourtant offert ces derniers jours une crise politique peu habituelle : la brouille entre le roi Abdallah (arrière-petit-fils de l’émir fondateur du pays) et son demi-frère, Hamzah. Comme il se doit, cette affaire de famille a été réglée promptement dans la discrétion des palais feutrés du royaume. C’est toutefois une crise politique qui pourrait bien ressurgir et avoir des répercussions sur la stabilité de ce pays fragile.
Il y a un siècle, bien peu auraient parié sur l’avenir politique de ce territoire inventé par les Anglais pour de simples raisons conjoncturelles. Le pays ne repose sur aucune réalité historique hormis de majestueuses ruines antiques dont le souvenir s’était totalement perdu. Ce bout de désert délimité par les Britanniques n’abritait au début du XXe siècle que quelques bourgades de quelques milliers d’habitants et des tribus bédouines nomades et réfractaires à l’idée de frontière. Aucune richesse connue à l’époque et aujourd’hui encore.
Pendant la Première guerre mondiale, Français et Anglais avaient fait la promesse aux élites locales de la création d’un grand royaume arabe bâti sur les décombres de l’Empire ottoman (alors alliés à l’Allemagne). Hussein, le chérif de La Mecque, de la famille des Hachémites, se voyait déjà le monarque de cet État qui aujourd’hui, grâce au pétrole, serait devenu une puissance incontestable.
On le sait, la promesse n’a pas été tenue. Elle ne devait de toute manière pas l’être puisque Français et Anglais se sont partagé secrètement la région dès 1916 (accords Sykes-Picot). La Syrie aux Français, tout le reste aux Anglais. En 1918, le chérif Hussein qui avait envoyé son fils Fayçal à la conférence de Versailles, le comprend très vite. On cherche alors des compensations. Sur un malentendu, Fayçal monte sur le trône de Damas. Il sera très vite chassé de Syrie par les Français qui ne voulaient gérer un royaume. Les Anglais lui proposent le trône d’Irak qui avait été promis son frère Abdallah. Pris de court on propose donc à ce dernier de venir régner à Amman, sur le petit territoire de Transjordanie délimité par les Anglais et qui n’avait pas du tout vocation de devenir un royaume. Damas et Bagdad avaient été des capitales arabes prestigieuses au Moyen Âge, Amman au contraire était une petite ville de province sans aucune prestance. Ce choix imposé ne fut pourtant pas le pire. La monarchie irakienne a été balayée quelques décennies plus tard alors qu’Amann est toujours la capitale d’une monarchie et la couronne sur la tête d’un descendant d’Abdallah.
À l’époque, ce petit pays a été baptisé Transjordanie, un nom inventé pour l’occasion car vu de Jérusalem où étaient établis les Anglais, ce territoire était situé de l’autre côté du fleuve Jourdain. En 1950, la Cisjordanie viendra agrandir le royaume qui désormais s’appellera Jordanie. On le sait, depuis 1967, la Cisjordanie est occupée par Israël, mais le pays réduit aujourd’hui à l’ancienne Transjordanie a conservé son nouveau nom.
Pourquoi avoir ainsi inventé un pays ? Ce territoire n’était, de fait, pas destiné en devenir un. Londres voulait juste créer un espace tampon pour stabiliser la géopolitique régionale. Devenant un petit royaume, cette zone tampon a parfaitement joué son rôle. Pour les Anglais, il fallait d’abord, borner le mandat britannique par rapport aux Français. Depuis Damas, ces derniers pouvaient avoir des visées sur la région.
Ensuite, il fallait surtout empêcher un éventuel royaume arabe dont l’idée n’était pas totalement abandonnée, d’atteindre la Méditerranée. Un émir du Nejd, de la famille des Séoud, commençait à élargir son influence. Sa conquête du ventre mou désertique de l’Arabie n’inquiétait guère. On n’avait pas conscience à l’époque de la richesse pétrolière de la région et de l’importance géopolitique qu’aurait cette matière un peu plus d’un demi-siècle plus tard. Il fallait surtout que Abdelaziz Ibn Séoud ne mette pas la main sur la Palestine, la région la plus riche à l’époque en raison de ses ressources en eaux. L’Arabie Séoudite sera créée en 1932, cantonnée par les Anglais au centre de la péninsule.
Enfin, les Anglais qui n’étaient pas avares de promesses avaient aussi promis en 1917 la constitution d’un « foyer national juif » en Palestine (déclaration Balfour). Ce n’était d’un courrier du ministre des Affaires étrangères britannique à un membre éminent de la communauté juive de Londres, mais cette missive a eu un tel impact politique que Londres a craint de se laisser déborder. Borner la Palestine au niveau du Jourdain paraissait plus prudent.
Finalement, c’est l’utilité géopolitique de ce territoire qui lui a valu de se pérenniser et de finalement, un quart de siècle plus tard, être admis aux Nations Unis comme État indépendant, le morcellement du Proche orient étant alors perçu comme définitif. La Jordanie a surmonté bien des crises. Le conflit israélo-palestinien a bien failli provoquer sa perte. Mais le roi Hussein, père du monarque actuel, a tenu bon. Mais cette question demeure sa principale fragilité. Comment exister face à la puissance israélienne sans avoir l’air de trahir les Palestiniens ? Eux-même constituent la majorité de la population, la plupart toujours considéré comme des réfugiés provisoires, même si on en est aujourd’hui à la troisième ou quatrième génération.
Et si, au contraire, la principale fragilité se nichait au cœur même du Palais royal ? Dans la brouille entre le roi Abdallah et son jeune demi-frère le prince Hamzah. Ce dernier était le préféré du roi Hussein, leur père commun, disparu en 1999. D’ailleurs, il lui ressemble tellement que la population en le voyant est prise de nostalgie. Les Jordaniens ont du mal à s’identifier à Abdallah, ce roi aux yeux bleus qu’ils trouvent bien trop occidentalisé. Hamzah ne complote pas vraiment contre son frère mais se plaît à écouter les doléances du peuple, notamment les critiques concernant la corruption des élites proche du Palais. Cela de quoi profondément agacer Abdallah qui a ordonné la semaine dernière une série d’arrestations dans l’entourage du prince. À la mort du Hussein, Abdallah a hérité du trône et Hamzah du titre de prince héritier. Titre qui lui a été retiré par le roi au profit de son propre fils. La logique est dynastique mais l’humiliation a été grande pour le prince rebelle sûr de son soutien parmi le peuple. Mais comme en 1921, personne n’a intérêt à une déstabilisation de la région. Joe Biden s’est précipité la semaine dernière pour soutenir le monarque lequel s’était mis à dos Donald Trump. Depuis, tout est sous contrôle, affirme-t-il. Le centenaire du 11 avril peut être célébré de manière sereine. Au moins en façade.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde