L’Almanach international
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28 février : le massacre du « 228 » à Taïwan, symbole des années de dictature
Depuis vingt ans, le 28 février est un jour férié à Taïwan (le 2-28) qui commémore un massacre qui remonte à 1947 et fait resurgir toute la mémoire des quatre décennies de dictature du KMT qui ont suivi.
Depuis vingt ans, le 28 février, Peace Memorial Day (和平纪念日) est un jour férié à Taïwan qui commémore un massacre qui remonte à 1947. Ce jour-là, une altercation entre un membre du Kuomintang (KMT) et une vieille femme vendant des cigarettes de contrebande avait dégénéré en émeute populaire et en tuerie. Le nombre des victimes se comptait en dizaines de milliers.
Le KMT était le parti de Tchang Kaï-chek, l’adversaire nationaliste de Mao. Vaincu par les communistes, le parti, puissamment armé, s’était replié sur l’île de Taïwan où il avait pris le pouvoir. La population était exaspérée par cette occupation « continentale » et multipliait les manifestations. Le 28 février, l’ordre a été donné de tirer sur la foule des manifestants en colère. La répression dans les milieux d’opposition durera jusqu’en mai 1947 et fera quelque 20 000 victimes.
Ce massacre du « 228 » (二二八事件) a été le prélude à près de quatre décennies d’une dictature du KMT. La loi martiale n’a été levée qu’en 1987 et il a fallu attendre 1995 pour que le tabou soit levé, que des excuses officielles soit prononcées et que l’on envisage de dédommager les familles des victimes. Depuis 2003, l’événement fait l’objet de commémoration officielle. En 2011, un Musée du 228 a été inauguré (le site du Mémorial dédié à l’événement).
Quant au KMT, c’est aujourd’hui un parti conservateur qui a tourné la page de la dictature. Il est revenu au pouvoir en 2008, par les urnes, et il est resté la première force politique taïwanaise jusqu'en 2016. Le KMT est maintenant dans l’opposition, mais dirige la plupart des villes du pays. En 2018, a été mise en place la Commission indépendante de justice transitionnelle, par l'administration du président Tsai Ing-wen (蔡英文) dont la tâche est de reconstituer les actions du régime KMT entre le 15 août 1945 et le 6 novembre 1992, afin de dresser un tableau aussi complet que possible des crimes commis par l'État. Comme en Espagne, le souvenir de la dictature est un passé qui ne passe pas et resurgit sans cesse tant que tout n’a pas été exposé, raconté, dévoilé. En 2019, un homme s’en était pris à la statue de Chiang Kai-shek au Memorial Hall (中正 紀念堂) la veille du 28 février, pour protester contre la lenteur de la justice transitionnelle. Depuis, cette statue est protégée par la police chaque 28 février car beaucoup demandent qu’elle soit retirée de l’espace public.
À Taipei, les militants marchent depuis Nanjing West Road dans le district de Datong à partir de 09h00 , ce 28 février 2023. Le programme des manifestants est de passer devant plusieurs points de repère de la ville, notamment la maison de thé Tianma, l'ancienne succursale du Monopoly Bureau Taipei, le mémorial Taipei 228, l’ancienne station de radiodiffusion de Taipei (qui est aujourd'hui le musée commémoratif de Taipei 228) et l'Executive Yuan. Chaque année, des centaines de personnes pourraient participent pacifiquement aux manifestations. Pour ce 228 Memorial Day, les autorités ont fermé des routes le long du parcours de la marche de protestation à partir de 15h00 le 27 février.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde