L’Almanach international
Parce que chaque jour est important quelque part dans le monde
7 mars : retour du soleil au Spitzberg !
L’apparition du premier rayon de soleil après plusieurs mois d’obscurité est une fête à Longyearbuen, 2000 habitants, la ville la plus septentrionale du monde, capitale du Spitzberg (ou Svalbard).
L’apparition du premier rayon de soleil après plusieurs mois d’obscurité est une fête à Longyearbuen, 2000 habitants, la ville la plus septentrionale du monde, capitale du Spitzberg (ou Svalbard, l’île principale d’un archipel situé à mi-chemin entre la Norvège continentale et le pôle Nord). Plusieurs dizaines de personnes viennent le guetter sur les marches d’un ancien hôpital détruit pendant la Seconde Guerre mondiale. Quand le soleil sera assez haut, c’est le premier lieu de la ville à être éclairé. Quand le jour précis est connu, le rendez-vous est fixé à 12h15.
Chaque année, le soleil se couche vers le 25 octobre pour ne réapparaître que début mars, généralement vers le 6-8 mars. Cette longue nuit n’est pas sans effet sur le moral de la population. En ville une psychologue travaille à plein temps sur les troubles liés à ce manque de lumière. Le retour de la lumière est souvent gâché par un ciel chargé de nuage, mais il reste un jour de fête qui se prolongera toute la semaine. Quelques courts spectacles se déroulent en plein air, ainsi qu’un office religieux si la température le permet. Mais, dans les bars des groupes de musique vont se succéder tous les soirs de la semaine dite du Solfestuka. En 2022, cette fête se déroule du 4 au 12 mars.
Le traité de Paris de 1920 qui a attribué la souveraineté de l’archipel Svalbard à la Norvège, mais ce traité prévoit aussi que tous les États signataires de ce traité dont l’URSS à l’époque, peuvent s’y livrer à des activités économiques sur un pied d’égalité. De fait aujourd’hui des entreprises russes sont implantées à Barentsburg afin de maintenir une présence russe dans l’Antarctique. Le Svalbard reste toutefois un sanctuaire naturel totalement démilitarisé.
22 juillet : il y a 12 ans, le massacre d'Utøya endeuillait la Norvège
Jour de recueillement en Norvège pour commémorer les terribles attentats d'un extrémiste de droite en 2011, principalement dans l'île d'Utøya, contre la jeunesse de gauche : 77 morts. Douze ans plus tard, celle-ci est au pouvoir en Norvège et le terroriste est toujours en prison.
Jour de recueillement en Norvège pour commémorer les terribles attentats commis par un extrémiste de droite en 2011, d’abord à Oslo puis dans l'île d'Utøya contre la jeunesse de gauche. Avec 77 morts, la petite Norvège fut bien plus terriblement touchée que les États-Unis, le 11 septembre 2001. Un carnage de masse, des victimes incarnant le multiculturalisme, un "manifeste" diffusé au moment du massacre et censé le justifier avec une idéologie qui a inspiré l’auteur de la tuerie de Christchurch, le 16 mars 2019.
Cette tuerie a en effet engendré d’autres, pas seulement en Nouvelle Zélande : le 22 juillet 2016, cinq ans jour pour jour après Utøya, un jeune homme psychologiquement fragile, décrit comme obsédé par Breivik, avait abattu neuf personnes dans un centre commercial à Munich, avant de se suicider. On le savait déjà, le nazisme n’est pas mort avec Hitler.
En attaquant Utøya, comme il l’a écrit dans son manifeste, le terroriste voulait tuer le Parti social-démocrate. C’est, en effet, la jeunesse de ce parti qui se réunissait sur l’île norvégienne. Dix ans plus tard, en octobre 2021, cette formation remportait à nouveau les élections et formait le gouvernement norvégien, qui est dirigé depuis cette date par Jonas Gahr Store. Deux des jeunes ministres sont des survivants de l’attaque d’Utøya.
Le site du mémorial : 22. juli-senteret
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde
6 février : la fête nationale des Lapons (ou Samis)
Les Samis, dernier peuple autochtone d’Europe, fête aujourd’hui sa culture et son unité par delà les frontières.
Chaque année le 6 février est un grand jour en Laponie, c’est l’occasion de sortir la gákti, le costume folklorique et de chanter le Sámi soga lávlla l’hymne du peuple sami, écrit par Isak Saba, le premier député norvégien d’origine samie, en 1906. L’an dernier, le 6 février, la reine Silvia et le roi Carl XVI Gustaf de Suède leur avaient, en personne, rendu visite par -15°. Mais, cette année, en raison de l’épidémie de covid, la cérémonie est organisée à Stockholm et diffusée sur YouTube.
Les Lapons, appelés Samis localement, sont la dernière minorité autochtone d’Europe. Comme les Inuits du Canada ou les Aborigènes d’Australie, leur reconnaissance culturelle est récente. Ils ont été maltraités jusqu’au milieu du XXe siècle, leur langue interdite, les femmes stérilisées, les chamans persécutés et leurs territoires pillés par les compagnies minières et forestières. C’était un peuple d'éleveurs de rennes et de chasseurs. Autrefois, le renne leur offrait tout ce dont ils avaient besoin pour leur survie : viande et graisse pour la nourriture, peaux et cuir pour l'habillement. Leur vie était rythmée en huit saisons selon le cycle de vie de l'animal. Mais, aujourd'hui, ils ne sont plus que 10% à vivre de l'élevage.
Un début d’organisation politique s’est opéré au début du XXe siècle, le 6 février 1917, alors que l’Europe était à feu et à sang et que la révolution couvait à Pétrograd, 150 Sames de différents groupes de Suède et de Norvège, se réunissaient dans une église méthodiste de Trondheim en Norvège pour évoquer les problématiques en lien avec leur peuple. C’est l’anniversaire de cette première rencontre internationale qui est célébré aujourd’hui, depuis l’instauration de cette fête nationale samie (Sámi álbmotbeaivi) en 1992. Il leur a fallu attendre jusqu’aux années 1980 pour l’obtention de droits politiques, l’élection de parlements locaux en Laponie norvégienne, suédoise et finlandaise reconnus par les autorités. Celui des Sames de la péninsule de Kola, en Russie, n’est pas encore officiel.
Cette nation qui a, aujourd’hui, en partie perdu sa langue (seuls 40% des Lapons parlent le same), ne représente plus que 80 à 100 000 personnes, les autres se sont fondus dans la population des pays nordiques. Ce n’est pas facile de peser politiquement quand on est si peu nombreux et répartis sur quatre États. En particulier quand il s’agit de lutter contre l’industrie minière, très lucrative mais qui a aussi créé d'énormes dégâts. La région arctique renferme d’importantes réserves d’uranium, d’or, de diamant, de zinc, de platine et de nickel, ainsi que du gaz et du pétrole. Tout comme en Australie, la logique économique et la préservation de l'espace vital d’un peuple s’affrontent. Les Lapons ont le sentiment qu’aujourd’hui, on les entend, on valorise enfin leur culture, mais qu’on ne les écoute pas vraiment.
On peut toutefois noter quelques avancées récentes, en Norvège, le Finnmark, la région septentrionale est depuis 2005 cogérée par les Samis. En 2016, après une âpre lutte judiciaire, un village sami de Suède a récupéré les droits exclusifs pour le contrôle de la chasse et de la pêche dans sa région. La Finlande a révisé sa législation sur la gestion des forêts l’année dernière, mais une clause qui prévoyait de ne pas affaiblir la culture same n’a, finalement, pas été intégrée dans la version finale de la législation. En Russie, on n’a jamais tenu compte de leurs revendications autres que linguistiques. Le peuple lapon est toujours en lutte, le 6 février est l’occasion pour lui de se montrer uni à travers les frontières étatiques.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 6 février 2021