28 octobre : les Tchèques célèbrent leur indépendance
La République tchèque commémore par un jour férié la création de la Tchécoslovaquie, le 28 octobre 1918, sur les décombres de l’Empire austro-hongrois dont la dissolution interviendra trois jours plus tard. La Bohême et la Moravie qui constituent (avec une petite portion de la Silésie), la Tchéquie actuelle, vivaient sous la coupe des Habsbourg depuis 1526. Antérieurement, le Royaume de Bohême avait eu un passé glorieux du XIIIe au XVe siècles. C’est dire l’importance de cette indépendance obtenue après quatre siècles vécus sous la tutelle de l’Autriche.
Le 28 octobre est aujourd’hui célébré comme le Jour de la création de l’État tchécoslovaque indépendant (Den vzniku samostatného československého státu). Chaque 28 octobre, une importante cérémonie, avec défilé militaire, se déroule au Mémorial national de Vítkov, lieu d’un fait d’armes important du XVe siècle contre les armées catholiques. Après une minute de silence, une gerbe est déposée sur la tombe du soldat inconnu.
Le président et les principaux membres du gouvernement se rendent ensuite dans le parc du château de Lány, non loin de Prague, sur la tombe de Tomáš Masaryk pour un dépôt de fleurs. Tomáš Garrigue Masaryk a été le premier président de la Tchécoslovaquie, élu le 14 novembre 1918, réélu en 1920… Il a dirigé le pays jusqu'au 14 décembre 1935. Sa figure symbolise la Tchécoslovaquie indépendante de Vienne, de Berlin et de Moscou. À Brno, une cérémonie se déroule au pied de sa statue.
Une réception est donnée au château de Prague, résidence du président de la République, Les personnalités du pays sont invitées salle Vladislav à une cérémonie de remise de décorations (I'Ordre du Lion blanc, la plus haute décoration d'État , mais aussi de l'Ordre de Tomáš Garrigue Masaryk, la Médaille de l'héroïsme et la Médaille du mérite). Devant le château, place Hradcany, se déroule la cérémonie de prestation de serment des membres de l'armée de la République tchèque.
La Slovaquie qui n’a pas eu la même histoire, ne célèbre pas cet anniversaire. Elle a choisi, au contraire, pour fête nationale, l’anniversaire de la disparition de la Tchécoslovaquie, le 1er janvier 1993. Il existe néanmoins une discrète« journée du souvenir » célébrant chaque 30 octobre, l'anniversaire de l'adhésion officielle des Slovaques à la Tchécoslovaquie.
Le 28 octobre 1918, à Genève, une délégation du Comité national dirigée par Karel Kramář entamait des négociations avec le représentant de la résistance étrangère anti-autrichienne, Edvard Beneš, sur la création et la forme d'un État tchécoslovaque indépendant. Entre autres choses, ils sont parvenus à un accord selon lequel le nouvel État serait une république (une monarchie avait également été envisagée ), Masaryk deviendrait président et Kramář serait le premier ministre. La nouvelle de la reconnaissance par l'Autriche-Hongrie des conditions de paix s'est répandue. Les conditions comprenaient notamment la reconnaissance de l'autonomie des peuples d'Autriche-Hongrie, que le peuple a interprété comme une reconnaissance de l'indépendance. Cette nouvelle a donné lieu à des manifestations de joie spontanées au cours desquelles la population a détruit les symboles de l'Autriche-Hongrie. Le prêtre Isidor Zahradník s'est adressé à la foule sur la place Venceslas, près du monument à Saint-Venceslas et a proclamé un État tchécoslovaque indépendant. Dans la soirée du 28 octobre, le Comité national a promulgué des premières lois, celle prévoyant la création d'un État tchécoslovaque indépendant et la proclamation du Comité national du « Peuple tchécoslovaque ». Les deux documents ont été signés par Antonín Švehla, Alois Rašín, Jiří Stříbrný, Vavro Šrobár et František Soukup, des personnalités qui seront appelés plus tard « Les hommes du 28 octobre ». Le même jour, quatre représentants ont été ajoutés au Comité National ; mais les représentants des Allemands et des Hongrois n’ont pas été invités.
Dès 1919, le 28 octobre a été célébré comme la fête nationale du nouvel État. À l’époque de l’occupation nazie, la fête nationale a été abolie, mais la journée a été celle de grandes manifestations de résistance, vivement réprimées par les Allemands. Le 28 octobre 1939, deux personnes ont été tuées et quinze blessées lors de la manifestation. Parmi les morts se trouvait l'étudiant en médecine Jan Opletal , dont les funérailles, tenues le 15 novembre, devinrent un prétexte pour de nouvelles protestations contre l'occupation, auxquelles les Allemands répondirent le 17 novembre 1939 en fermant les universités tchèques . Après la Seconde Guerre mondiale, la fête nationale a été célébrée jusqu'en 1951, date à laquelle son nom a été changé par les autorités communistes en Journée de la nationalisation du patrimoine. À nouveau en 1988 et 1989, le 28 octobre a été l’occasion de grandes manifestations contre la dictature. La fête nationale a été rétablie en 1990 et a été célébrée jusqu’en 1992.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde