La France restitue à l'Algérie 24 crânes de combattants anticoloniaux du XIXe siècle
Signe d’un dégel entre Paris et Alger, à l’occasion du 58e anniversaire de l’indépendance de l’Algérie, La France restitue 24 crânes de ces combattants tués au début de la colonisation française au XIXe siècle. Parmi les têtes des rebelles les plus illustres des débuts de la colonisation, figurent celles de cheikh Bouziane, le chef de l'insurrection des Zibans, dans l'est de l'Algérie, en 1849, et de ses compagnons d'armes. Capturés par les Français, ils avaient été fusillés puis décapités. Les crânes étaient considérés comme des « trophées de guerre » par les militaires français. Ils étaient depuis des décennies entreposés au Musée de l’Homme où ils avait été oubliés parmi des milliers d’autres de toutes provenances. C’est l’historien algérien Ali-Farid Belkadi qui a alerté sur la présence de ces crânes en 2011. En 2017, le président Macron s’était engager à les restituer. La demande officielle de l’Algérie a été formulée en 2018.
Une cérémonie d’accueil très solennelle leur a été réservée. Les 24 cercueils, recouverts du drapeau national, ont été lentement portés par des soldats, au son de 21 coups de canon. Ils ont ensuite été transférés au Palais de la Culture où ils ont été exposés toute la journée du 4 juillet 2020, avant d’être enterrés dimanche 5 juillet à Alger dans le carré des martyrs du cimetière d’El Alia, aux côtés des combattants tombés dans la lutte pour l’indépendance et de résistants à la conquête coloniale, comme l’Émir Abdelkader.
La mémoire est un enjeux diplomatique majeur entre les deux capitales. Alger veut aussi remettre sur la table le dossier des « disparus » pendant la guerre d'indépendance (1954-1962) – plus de 2.200 selon Alger – et celui des essais nucléaires français dans le Sahara algérien qui « ont fait et continuent à faire des victimes ». En outre les autorités algériennes continuent à réclamer à Paris de véritables excuses pour 132 ans de colonisation de leur pays.
Un an de Hirak en Algérie
Le 22 février marque un an de protestations populaires en Algérie, tous les vendredis (les mardis pour les étudiants), toutes générations confondues, une lame de fond qui a pris le nom de Hirak. Un an de manifestations, depuis le 22 février 2019, qui ont impressionné par leur civisme et leur pacifisme face à un pouvoir qui, de son côté, n’a pas osé faire couler le sang comme cela avait été le cas lors des émeutes d’octobre 1988.
La vague de protestations, d’abord dirigée contre l’ancien président Abdelaziz Bouteflika qui a, finalement, démissionné et contre le chef d’état-major de l’Armée nationale populaire Gaïd Salah, décédé avant la fin de l’année, continue de demander un changement de régime. Car la nouvelle version du régime, avec en tête un président de 74 ans, Abdelmajid Tebboune, et un chef d’état-major du même âge, Saïd Chengriha, ne représente en réalité qu’un changement dans la continuité. Les arrestations et les condamnations de manifestants du Hirak se multiplient, le régime tente de reprendre la main.
Cela-dit, si rejeter le régime est une chose, avoir une vision claire sur la meilleure manière de le renverser en est une autre. Le Hirak est aujourd’hui victime de sa nature décentralisée et apolitique. On voit mal sur quoi il peut déboucher à court terme alors que l’Algérie voit son environnement régional chanboulé. Le danger d’une déstabilisation totale de Sahel, la guerre civile en Libye et un conflit au Sahara occidental qui sans être chaud, s’éternise.
Pour un point sur la situation de l’Algérie, lire : Géopolitique de l’Algérie de Kader A. Abderrahim
Le Maroc propose un dialogue direct et franc à Alger
Cette proposition va-t-elle avoir un écho ? Sachant que la frontière entre l'Algérie et le Maroc est totalement fermée depuis 1994, et que la dernière rencontre entre les chefs d'État algérien et marocain remonte à 2005.
L’allocution royale du 6 novembre 2018 coïncide avec le 60e anniversaire de la conférence de Tanger – qui avait vu les mouvements de libération du Maroc, d’Algérie et de Tunisie se prononcer pour l’unité du Maghreb – et avec les 43 ans de la « Marche verte » : le 6 novembre 1975, 350 000 Marocains entreprenaient à l’appel de leur roi de marcher de sur le Sahara occidental, à l’époque sous occupation espagnole, au nom de l’appartenance de ce territoire au Maroc.
à lire dans la Géopolitique du Maroc de Kader A. Abderrahim